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PUBLICATIONS  DE  L’INSTITUT  PASTEUR 


Service  de  Parasitologie  agricole 


Les  Campagnols 


].  DANYSZ 


LAVAL 

L.  BARNÉOUD  & C%  IMPRIMEURS 


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Les  Campagnols 


PUBLICATIONS  DE  L’INSTJTUT  PASTEUR 


Service  de  Parasitologie  agricole 


Les  Campagnols 


J.  DANYSZ 


LAVAL 

L BARNÉOUD  & 0%  IMPRIMEURS 


1913 


1 


i 


•*1 


INTRODUCTION 


LKS  CAMPAGNOLS  (miCROTINÆ) 


De  tous  les  petits  rongeurs  (jui  causent  des  doniniages  à Tagri- 
eullurc,  les  caiiipaguols  sont  les  plus  nomhreux  et  les  plus 
réj)andus. 

On  les  trouve  dans  tous  les  pays  de  la  zone  tem2)crée  de  l’hémi- 
splière  nord  aussi  bien  dans  les  plaines  et  inêinc  dans  les  bas-fonds 
marécageux  que  sur  les  plus  hauts  plateaux  des  montagnes,  dans 
les  cliamps  cultivés  et  dans  les  prairies,  partout  en  un  mot  où  la 
nature  du  sol  leur  permet  de  creuser  des  galeries  souterraines. 

La  pluj)art  de  ces  rongeurs  et  notamment  les  espèces  qui  babi- 
tent  les  ])laines  cultivées  vivent,  en  ellèU  dans  des  galeries  creu- 
sées sous  terre  parallèlement  à la  surface  du  sol  à une  ])rofondeur 
qui  ne  déjnassc  qu’exccptionncllement  10  à 15  centimètres.  On  les 
découvre  donc  facilement  en  labourant  les  champs  à la  charrue. 

Ces  galeries,  percées  de  regards  de  place  eu  place,  sont  rami- 
fiées dans  tous  les  sens  sans  plan  spécial  et  comjnuniqucnt  les 
unes  avec  les  autres,  de  sorte  (pi’elles  forment  un  réseau  continu 
où  les  campagnols  peuvent  se  déplacer  sur  de  grandes  étendues 
sans  sortir  de  terre. 

La  surface  des  chaiîips  envahis  par  les  campagnols  est  égale- 
ment sillonnée  en  tous  sens  par  un  réseau  de  sentiers  qui,  s’il  ne 
correspond  pas  exactement  au  réseau  des  chemins  souterrains,  en 
<lonne  une  parfaite  image. 

Le  long  de  galeries  souterraines  on  trouve  de  place  en  place  des 
excavations  un  peu  plus  profondes  dont  les  unes  servent  de  nids, 
les  autres  de  magasins  dans  lesquels  les  campagnols  amassent 
des  réserves  de  grains  ou  de  racines  pour  la  mauvaise  saison. 


Danysz 


1 


CHAI'ITRE  PREMIER 


C.ARACTÈRKS  ZOOLOGIQUES  ET  ELASSIFICATION 


Iléunis  d’abord  dans  le  seul  genre  Arvicola,  les  campagnols  sont  classés 
aujourd’hui  dans  la  famille  des  mnridés  et  constituent  la  sous-famille  des 
Microlinœ  comprenant  quatre  genres  : Ecolomijs,  Microtus,  Pili/mi/s  et 
Arvicola. 

Nous  n’entrerons  pas  dans  les  détails  de  cette  classification  que  l’on  trou- 
vera dans  des  ouvrages  spéciaux  (1)  et  notamment  dans  l’excellent  « cata- 
logue des  mammifères  d’Europe  » de  E.  Trouessart,  professeur  au 
-Muséum  d’Ilistoire  naturelle. 

11  nous  suffira  d’indiquer  ici  les  principaux  caractères  qui  permettent 
de  distinguer  h première  vue  les  campagnols  de  tous  les  autres  petits  ron- 
geurs qui  vivent  dans  les  champs  et  qui,  bien  que  nuisibles,  comme  tous 
les  rongeurs  en  général,  sont  infiniment  moins  dangereux  pour  l’agricul- 
ture que  les  campagnols  proprement  dits. 

Par  la  forme  de  son  corps,  un  campagnol  ressemble  plutôt  à une  taupe 
qu’(à  une  souris  ou  un  rat.  11  est  presque  régulièrement  cylindrique,  très 
bas  sur  pattes,  terminé  en  avant  par  une  tète  forte,  à museau  court  et  en 
arrière  par  une  queue  poilue  et,  elle  aussi,  relativement  très  courte. 

Le  rapport  entre  la  longueur  du  corps  et  de  ta  queue  constitue  le  carac- 
tère le  plus  commode  pour  distinguer  les  quatre  genres.  Les  P i/limi/s  sont 
caractérisés  par  les  queues  les  plus  courtes,  elle  dépasse  rarement  le  quart 
de  la  longueur  du  corps.  Chez  tes  Microtus  ce  rapport  est  de  1 à 3 ; chez 
les  Ei'otomijs  et  les  Arvicola  la  longueur  de  la  queue  atteint  et  dépasse  quel- 
quefois la  moitié  de  la  longueur  du  corps  de  l’animal. 

En  France  on  connaît  23  espèces  de  campagnols  dont  3 appartiennent 
au  gr.  Evolomys,  6 au  gr.  Microtus,  10  au  gr.  Pilijmys  et  4 au  gr.  Arvicola. 

Nous  en  donnons  une  courte  description  d’après  Trouessart. 

Evotomys  VA.SCONMÆ,  Miller.  — Longueur,  corps  et  tète,  160  mm.  ; queue 
52  mm.  ; pied  18,5  ; crilne  23,0  X 14  mm. 

I*elage  : Raie  dorsale  d’un  rouge  ferrugineux,  mat  délimitée,  côtes  et 


— 4 — 


flancs  rouge-brun.  Dessous  d’un  gris-châtain  pâle.  Pieds  plus  clairs.  Queue 
finement  poilue,  l)icolore,  foncée  dessus,  blanchâtre  dessous. 

IJabilat  : Sud-Ouest  (Hautes-Pyrénées). 

Evoto.mys  glaheolus,  Schreber.  — Longueur  corps  et  tête  134  mm.  ; 
queue  47  ; pied  18,3  mm. 

Pelage  : L’aire  dorsale  rouge  cannelle  foncé.  Côtés  des  joues  et  flancs 
brun-flave,  ventre  gris-flave.  Queue  nettement  bicolore,  brun  foncé  dessus, 
blanc  sale  dessous.  Pieds  blancs,  lavés  de  brun.  Oreilles  de  la  couleur  du 
dos  avec  quelques  poils  blancs  en  arrière. 

Habitat  : Nord-Est  surtout  dans  les  forêts. 

Evotomys  glaheoi.l’s  helveticus,  Miller.  — Longueur,  corps  et  tête, 

93.4  mm.  ; queue  44,6  ; pied  17,9  : crâne  22,2  X 13,6  mm. 

Pelage  : Aire  dorsale  de  couleur  noisette  fortement  mêlée  de  gris,  mal 
définie,  s’étend  des  yeux  à la  base  de  la  queue.  Flancs  et  joues  châtain- 
écru,  finement  parsemé  de  noir.  Face  plus  foncée  que  les  joues.  Ventre 
gris-blanchâtre.  Queue  bicolore,  presque  noire  dessus,  blanc  flave  dessous. 
Pieds  blancs.  Oreilles  de  la  couleur  du  dos,  avec  une  touffe  de  poils  blan- 
châtres à leur  base  en  arrière. 

Habitat  : Toute  la  contrée  basse  entre  les  Alpes  et  le  Jura. 

Microtus  auvalis,  Pallas  (Syn.  Arvicola  arvalis  Sélys).  — Longueur, 
corps  et  tête,  98  à 110  mm.  ; queue  30  mm.  ; pied  17  à 18  mm. 

Pelage  : Dessus  brun -jaune  avec  la  base  des  poils  d’un  gris  ardoisé  pres- 
que noir,  ventre  et  pieds  d'un  gris  blanchâtre  sans  ligne  de  démarcation 
sur  le  ventre.  Queue  faiblement  bicolore,  brunâtre  dessus,  blanchâtre 
dessous.  Oreilles  velues  dépassant  peu  les  poils. 

Habitat  : L’espèce  la  plus  répandue.  On  la  trouve  presque  partout  dans 
les  plaines  et  même  sur  les  hauteurs  du  centre. 

Microtus  arvalis  jmeridianus,  Miller.  — Longueur,  tête  et  corps, 
1 1 6 mm.  ; queue  32;  pied  16  mm.  Semblable  au  tj'pe  précédent,  mais 
d’une  coloration  beaucoup  plus  pâle. 

Habitat  : Basses-Pyrénées. 

Microtus  acrestis,  Linné  (Arvicola  agvestis  Sélys).  — Longueur,  tête  et 
corps,  113  à 130,  parfois  160  mm.  ; queue  2a  à 40;  pied  17  à 20;  crâne 

27.5  X 17  lum. 

Pelage:  Dos  d’un  brun-grisâlre  plus  clair  sur  les  flancs;  ventre  d'un 
blanc  pur  assez  nettement  séparé  de  la  couleur  du  dos.  Pieds  d’un  blanc 
brunâtre  ou  grisâtre.  Queue  nettement  bicolore,  brun  foncé  dessus,  blan- 
châtre dessous.  Oreilles  velues  dépassant  nettement  le  pelage. 

Habitat  : Nord  de  la  France,  plaines. 

Microtus  acirestis  neguîctus,  Jenyns.  — Longueur,  corps  et  tête,  90  à 
123  mm.  ; queue  23  à 33  ; pied  14  à 18;  crâne  25  X 19  imi'- 


DilTère  peu  de  M .arvalis;  s’en  distingue  pourtant  par  une  teintejaunàtre 
du  pelage  sur  le  ventre  au  lieu  de  gris-blanc. 

Habitai  : Très  commun  partout  comme  le  M.  arvalis. 

.Miciiotus  (Cuiono.mys)  nivalis  aquitanius,  iMiller.  — Longueur,  corps 
et  tète,  1 1 1 mm,  ; queue  59  ; pied  21  mm. 

Pelage  : D’un  gris  de  fumée  en  dessus,  fortement  lavé  de  bistre  sur  le  dos 
et  souvent  de  jaune  pâle  sur  les  lianes  ; ventre  blanchâtre  ; pieds  et  queue 
blanchâtres,  celle  ci  non  nettement  bicolore. 

Hnhilal  : Pyrénées-Orientales,  Ariège,  Hautes-Pyrénées. 

Microtus  (Chio.xomys)  LEmiuxi,  Crespon.  — Longueur,  tète  et  corps, 
122  mm.  ; queue  66  ; pied  18,8  ; crâne  27,4  X 15  mm . 

Semblable  â M.  nicalis,  s’en  distingue  par  une  queue  entièrement 
blanche. 

Habilal  : Dép.  du  Gard. 

Micitorus  (CuioNü.MYs)  Lebrum  ceucuuus.  Gerbe.  — Longueur,  tête  et 
corps,  120  mm.  ; queue  68  ; piofl  19  mm. 

Pelage  : Dos  d’un  gris  de  fumée  pâle  légèrement  lavé  de  brun. 

Habitai  : Basses-Alpes,  dans  les  rochers. 

PnY.MYs  suBTERRAXEus,  Sélys  {Avv.  subterraneus  Sélys).  — Longueur, 
tète  et  corps,  82  mm.  ; queue  24  ; pied  20  mm. 

Pelage  ; Dessus  d’un  gris  noirâtre,  gorge  cendrée  ; dessous  blanc  avec  la 
base  des  poils  cendrée.  Pieds  d’un  cendré  foncé.  Queue  noirâtre  dessus, 
blanchâtre  dessous.  Oreilles  presque  nues.  Yeux  très  petits  (moitié  plus 
petits  (jueceux  à.'arvalis). 

Habilal  : Mêmes  régions  que  le  M . arvalis. 

PiTY.MYs  suBTEiiBAXEUs  cAPUcixu.«,  .Miller.  — Lougueui',  tète  et  corps, 
102  mm.  ; queue  33  ; pied  15  mm.  ; crâne  23,4  X 13,3  mm. 

Semblable  au  précédent  mais  plus  grand  sur  des  pattes  plus  courtes. 

Habitai  : Puy-de-Dôme  (Mont  Dore). 

PiTY.MYs  Gebbei,  Dc  l’isle. — Longueur  tête  et  corps  95  mm.  ; queue  28  ; 
pied  17  ; crâne  22,5  â 23,5  X 13,5  à 14  mm. 

Pelage  : Dessus  d’un  ferrugineux  obscur  ; dessous  gris  ardoisé,  les  deux 
couleurs  se  fondant  insensiblement;  museau  noirâtre.  Oreilles  petites,  ova- 
les, poilues,  mais  laissant  voir  la  couleur  chair,  cachées  par  le  pelage. 
Queue  brune  dessus,  cendrée  dessous.  Pattes  minces  à ongles  grêles  d’un 
gris-bi‘un.  Veux  très  petits. 

Habilal  : Vendée. 

PiTY.MYs  SÉLYsii,  Gerbe. — Longueur,  tèteet  corps,  100  mm.  ; queue  40  ; 
pied  18  ; crâne  23  X 11  mm. 

Pelage  : Dessus  d’un  brun  ferrugineux;  dessous  d’un  blanc  cendré  pâle 
assez  nettement  séparé  de  la  couleur  du  dessus  par  une  ligne  un  peu  plus 
claire.  Le  blanc  du  dessous  remonte  jusqu’aux  narines,  traverse  les  épaules 
et  teint  légèrement  la  face  antérieure  des  cuisses.  Les  pieds  sont  d’un 


— 6 — 


Blanc  cendré.  Les  oreilles  courtes  brunes  velues.  La  queue  brune  dessus, 
jaunâtre  dessous  avec  un  petit  pinceau  terminant  d’un  blanc  sale.  Yeux 
très  petits. 

Habilat  ; Dép.  du  Var  (Montagnes  de  Barcelonnette  jusqu'à  2.000  m, 
d’alt.).  Sud-Est  de  la  France. 

PiTYMYs  Savii,  Sélys.  — Longueur  tête  et  corps  90  mm.  ; queue  23  ; pied 
18  mm.  ; crâne  23  X 15. 

Pelage  : Gris-brun  dessus,  cendré  dessous.  Queue  bicolore  brunâtre  des- 
sus, blanchâtre  dessous.  Pieds  d’un  gris  blanchâtre. 

Habilat  : Sud-Est  de  la  France  (Tessin,  Lombardie,  Calabre,  Grèce). 

PiTYMYs  pnENAicus,  Séljs.  — Diiiiensions  non  indiquées,  petite  taille. 

Pelage  ; Brun  bistre  dessus,  cendré  dessous.  Oreilles  très  velues  à poils 
noirâtres.  Queue  bicolore  brune  dessus,  blanchâtre  dessous. 

Habitat  : Pyrénées  (Pic  du  Midi  à une  grande  élévation). 

PiTY.MYs  PYHENAICUS  BHUMEus,  Miller.  — Longueur  tête  et  corps  93  mm.  ; 
queue  2(3  ; pied  15  mm. 

Pelage  : Semblable  au  type,  mais  plus  brunâtre. 

Habitat  : Toute  la  région  entre  les  Pyrénées  et  la  Gironde. 

PiTYMYs  PRoviNciALis,  Miller.  — Longueur  tête  et  corps  96  mm.  ; queue 
22  ; pied  14,6  ; crâne  22,4  X 14,4  mm. 

Pelage  : Dessus  brun  de  bois  clair,  plus  pâle  et  passant  au  blanc  crème 
sur  les  flancs.  Dessous  gris  clair  par  le  mélange  du  gris  ardoisé  de  la  base 
des  poils  avec  le  blanc-crême  de  la  pointe;  pieds  d’un  blanc  sale.  Queue 
entièrement  blanchâtre,  le  dessus  assombri  par  quelques  poils  noirs. 

Habitat  : France  Sud-Est. 

PiTY.MYs  DUODEciMcosTATus,  Sélys. — Longueui’  tête  et  corps  101  mm.  ; 
queue  33  ; pied  18  ; crâne  24  X 15,5  mm. 

Pelage  : Dessus  d’un  brun  jaunâtre  avec  le  museau  d'un  brun  noirâtre; 
dessous  et  pieds  blanchâtres,  quelquefois  teintés  de  gris  ou  de  jaune  sale  ; 
région  lombaire,  en  avant  d’un  jaune  clair  qui  s’étend  sur  les  flancs  entre 
la  couleur  du  dos  et  du  ventre  (Le  nombre  de  12  paires  de  côtes  attribuées 
à l’espèce  n’est  basé  que  sur  une  anomalie  individuelle). 

Habitat  : Sud  Est  depuis  le  dép.  du  Var  jusqu’à  l’Hérault  et  au  Nord 
jusqu’à  l’Isère. 

Arvicola  terhestris  (L.),  Savi.  — Longueur  140  mm.  ; queue  63  ; pied 
22  ; crâne  35  X 20  mm. 

Pelage  ; Dessus  d’un  brun  plus  ou  moins  jaunâtre,  jaunâtre  sur  les 
côtés  ; dessous  cendré,  lavé  de  jaunâtre  ; côtés  de  la  tête  comme  les  flancs. 
Queue  brune  dessus,  plus  pâle  dessous  ; à poils  courts.  Pieds  à poils  très 
courts  d’un  cendré  blanchâtre. 

Habilat  : Dans  les  montagnes  du  Jura  et  des  Ardennes. 

.\nvicoLA  TEnnESTius  MONTicoi.A,  Sélys.  — Longueur  tête  et  corps 
197  mm.  ; queue  73  ; pied  25  ; crâne  37  X 23  mm. 


/ 


Pelnfje  : Dessus  d’un  gi’isjaun;'Ure, mélangé  de  jaunAlre  pAIesurles  flancs  ; 
dessous  et  pieds  cendré  blanchâtre.  Le  pelage  est  doux,  égal  et  laineux 
sans  mélange  sur  le  dos  de  poils  plus  longs  que  porte  Ar.  Amphibins.  La 
queue  porte  environ  100  anneaux  écailleux,  avec  des  poils  hérissés  cendré 
pâle. 

Hobilat  : .Montagnes,  Pyrénées,  Saint-Bernard. 

.\»vicoLA  SciiEiiMAX,  Scliaw  ; .\r.  TEXEniucus,  Miller;  .\rv.  Scherman 
MoxTicuLA,  Sélys.  — Rspèces  très  voisines  habitant  les  hauts  plateaux  de 
la  Savoie,  de  l’.\u  vergue  et  des  Pyrénées. 

Toutes  les  espèces  de  campagnols  que  nous  venons  d’énumérer  ne  sont 
pas  également  redoutables  pour  l’agriculture.  La  plupart  habitent  des  ter- 
rains incidtes,  ne  causent  que  des  dommages  peu  appréciables  et  n’éveillent 
guère  l'attention  des  cultivateurs.  Quelques  espèces  seulement,  et  notam- 
ment les  Mici'oliis  arva/is  et  ngn’stis  et  le  PHtjmijs  subterraneux  dans  les 
plaines  et  VArvkola  Scherman  monlicola  sur  les  hauts  plateaux  de  la  Savoie 
et  du  Cantal  envahissent  de  temps  en  temps  les  champs  cultivés,  s’y  multi- 
plient avec  une  rapidité  déconcertante  et  leur  nombre  devient  alors  telle- 
ment énorme  qu’ils  dévorent  toutes  les  cultures  à ras  de  terre. 

Sur  les  hauts  plateaux  de  la  Savoie  VArv.  monlicola  est  connu  sous  le 
nom  de  Tarpa. 


i 


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f fi 


CHAPITRE  II 


IMPORTANCE  DES  DOMMAGES  CAUSÉS  PAR  LES  CAMPAGNOLS 


En  parcourant  les  champs  envahis  par  les  campagnols  on  décou- 
vre un  trou  de  campagnol  presc^ue  à chaque  pas  dans  toutes  les 
directions. 

Evaluer  exactement  le  nombre  de  campagnols  vivant  dans  les 
galeries  souterraines  d’après  le  nombre  de  ces  ouvertures  n’est 
pas  chose  aisée.  Un  seul  campagnol  peut,  en  effet,  se  ménager 
plusieurs  orifices  de  sortie,  comme  un  seul  orifice  peut  servir  à 
toute  une  nichée  de  ces  animaux.  On  constate  souvent  aussi  que 
bon  nombre  de  ces  trous  conduisent  à des  galeries  depuis  long- 
temps abandonnées. 

Pour  éliminer,  au  moins  en  partie,  ces  causes  d’erreur  et  arriver 
à une  appréciation  aussi  juste  c[ue  possible,  on  peut  procéder  de 
la  façon  suivante  : 

On  compte  les  trous  sur  une  partie  du  champ  envahi,  on  les 
bouche  avec  de  la  terre,  on  attend  un  ou  deux  jours  et  on  compte 
les  orifices  nouvellement  ouverts.  On  trouve  en  moyenne  un  trou 
nouveau  sur  dix  anciens.  En  faisant  labourer  cette  partie  du 
champ  entourée  d’abord  par  un  sillon  assez  profond  pour  couper 
toutes  les  galeries  et  empêcher  ainsi  les  campagnols  de  fuir  sous 
terre  au  dehors  de  la  partie  réservée,  on  trouve  à peu  près  autant 
de  campagnols  que  l’on  a compté  de  trous  nouvellement  ouverts. 

En  parcourant  les  régions  fortement  envahies  on  trouve  assez 
fréquemment  des  chanqis  dans  lesquels  le  nombre  de  trous 
dépasse  100.000  à l’iiectare  et  qui  contiennent  par  conséquent  au 
moins  10.000  campagnols.  Ür  chaque  campagnol  doit  manger  au 


— 0 -- 


moins  5 gTammcs  de  grains  on  deux  ou  trois  fois  autant  do  verdure 
par  jour  pour  ne  pas  mourir  de  faim  et  il  gAcho  beaucoup  plus 
qu’il  ne  mange  en  coupant  les  tiges  des  céréales  pour  en  faire  tom- 
ber les  épis,  en  jiiétinant  l'herbe  de  ses  sentiers  et  en  faisant  des 
réserves  dans  scs  magasins. 

11  est  donc  facile  d'évaluer  les  dommages  que  peut  causer  une 
grande  invasion  de  ces  petits  rongeurs. 

11  est  certain  qu'un  millier  tle  campagnols  mangent  et  dété- 
riorent dans  un  cbamp  de  céréales  au  moins  10  kilogrammes  de 
grains  par  jour,  ce  qui  ferait  une  jmrte  de  3 à i quintaux  pendant 
la  durée  de  la  saison  sans  compter  la  perte  en  paille.  Quand  l’inva- 
sion arrive  à son  maximum  de  développement  au  milieu  de  l'été, 
il  n'est  j)as  rare  de  trouver  des  champs  de  blé  et  surtout  dos 
cbanips  d’avoine  tellement  ravagés  ([ue  les  cultivateurs  n'y  trou- 
vent plus  rien  à récolter. 

Pendant  la  grande  invasion  qui  a désolé  le  département  de 
l’Aisne  do  1009  à 1011,  l’administration  préfectorale  a fait  drosser 
un  aperçu  des  dégâts  causés  par  les  campagnols  dans  chaque  com- 
mune envahie. 

\ oici  cet  aperçu  qui  m’a  été  obligeamment  communiqué  par 
M.  Guerrapain,  professeur  départemental  d’agriculture. 


Importance  des  dégâts  causés  par  les  campagnols  dans  le  département 
de  l'Aisne  de  l’automne  1900  ci  l'automne  1911. 


CO.M.ML’.NES 

ÉVALUATIO.N 

des  perles 

OBSEnVATlONS 

J 

\7‘rondissement 

le  Laon 

frcTncs 

Noiivioii-le-ComIc.  . . . 

non  évaluées 

.30  lieclarea  de  prairies  arlifi- 

cielles  dél miles. 

.\clicrv 

10.000 

.\ngnilcoml-le-Sorl  . 

38.000 

-Mavol 

10.000 

•\  rcporler 

38.000 

— 10  — 


COMMUNES 

ÉVALUATION 

des  pertes 

OBSERVATIONS 

francs 

Re[)orl 

1.371.150 

Hannappos 

1.225 

Groiigis 

20.000 

Vaux  Andignj  . ... 

» 

1.035  hectares  envahis. 

Arrondissement  de  Saint-Quentin 

SainlQuenlin 

30  000 

Essigny 

35.000 

Poiisoinme 

103. 000 

Harly ... 

30.000 

llomblières.  

72.000 

Lerdins 

75.000 

Marig  . ... 

15.000 

Mesnil  Saint-Laurent  . 

3.000 

.Morcourt 

100.000 

Orignv 

88.960 

Remancourt  

non  évalué 

Tout  le  territoire  envahi,  dé- 

giïls  considérables. 

Rohain  . . .... 

102.000 

Recquigny  . 

1 500 

Rrancourt  

200.000 

Croix  J 

150.000 

Ercemfont  .... 

55.400 

Fontaine 

70.000 

Frenoy  

200.000 

.\  reporter 

2.725.235 

— 1^2  — 


COMMUNES 

ÉVALUATION 

des  perles 

OUSEUVATIONS 

Iteporl 

francs 

2.725.235 

Monbrohaiii 

70  000 

Premionl 

O 

O 

O 

Uainicourl  . 

40.000 

Aubcncheul  

60.000 

Beaurevoii' ....... 

160.410 

Hellenglise.  . . 

40.000 

Beilicoui'f 

)) 

600  hectares  envahis. 

Bouy 

18.000 

Eslrès 

60.000 

Gouy 

200.000 

Joucouii 

41.000 

Lebancourt  

45.000 

Levergier  

100.000 

Magny 

16  000 

Noi'oy 

30  000 

Segucliart 

60.000 

Vendhuille 

8.000 

Villerest 

40  000 

, 

Moy 

)) 

Invasion  peu  considérable. 

Hanicourl 

» 

100  hectares  envahis. 

Brusav 

55.000 

Brissy 

21.000 

Clu\liIlon-siir-Oise.  . . . 

)) 

DégîUs  considérables. 

A reporter  . . . . 

3.823.645 

COMMl'NES 

ÉyALUATlON 

des  pertes 

OBSEnVATlO.NS  < 

Report 

francs 

3.823.tU5- 

Mont  cTOrigny 

liS.OOO 

Neuvilletle 

t)4.000 

Origny  Sainl-Benoile  . . 

100  000 

l’arpenollc 

15  000 

Selve 

15.000 

Regnv 

90.000 

Rcnansart 

15.000 

Sery 

)) 

Grande  partie  du  territoire 

Sirry 

envaliie. 

)) 

Dégâts  considérables. 

Siirronlainc 

4 000 

Gcnellcs 

21.000 

Castres  . 

)> 

1 /20  do  récolte  perdueon  1910; 

Dailon.  . 

0 000 

t 4 en  1911. 

nation 

05.000 

Fontaine 

4.000 

Gaucliy  .... 

8.900 

(!  rugi  es 

» 

250  hectares  envahis. 

Ilappencourt 

10.000 

SerancourI 

91.000 

'l’iigny 

» 

275  liectares  envahis. 

Villers  Saint-Christophe . 

» 

900  hectares  envahis,  dégâts 

Aubigny  . . 

très  considérables. 

» 

Dommages  très  im[)ortants. 

Beauvoir.  . 

)' 

Dommages  très  importants. 

A reporter  .... 

4.435.145 

— 14  — 


CO.MMUNES 

ÉVALUATION 

des  pertes 

OBSERVATIONS 

francs 

Report 

4.455.145 

Douchy  

» 

221  hectares  envahis. 

Etrevi  11ers  

15.100 

Fayet  

25  000 

ÏLiqiiières 

» 

60  hectares  envahis. 

Francilly 

6 800 

Germanie 

» 

Tout  le  territoire  envahi. 

Gricourt 

90.000 

Holuon 

120.000 

Lauchy  

» 

Tout  le  territoire  envahi. 

.Maissemy 

25.000 

Poulru 

)) 

1/10  de  la  récolle  détruite. 

Poutruet 

30.000 

Roupy 

40.000 

Vaux 

38  500 

Le  Verguier 

5 000 

ïretron  ...  ... 

» 

Blé  1/12  seigle  hivernages; 
1/3  prairies  artiï’.  ; 1/2  détruites. 

Total 

4.817.545 

lün  comptant  les  pertes  non  évaluées,  mais  <[ue  l'on  peut  appré- 
cier approximativement  d’après  le  nombre  d’hectares  déclarés 
comme  envahis  ou  la  proportion  dos  récoltes  détruites,  on  peut 
donc  estimer  les  pertes  subies  par  les  cultivateurs  des  l iO  com- 
munes du  département  de  l’Aisne  à plus  de  6 millions  de  francs, 
en  deux  ans. 

Des  invasions  aussi  considérables  et  même  beaucoup  plus  inten- 
ses et  plus  étendues  que  celle  de  l’Aisne  ne  sont  pas  rares  en 
France.  Il  ne  m’a  été  guère  possible  de  recueillir  à ce  sujet  de 


— 15  — 


renseignements  d’une  exactitude  absolue.  Il  n’y  a pas  d’organisa- 
tion fjui  soit  chargée  de  signaler  les  invasions  de  campagnols 
partout  où  elles  se  produisent,  d’en  apprécier  l’étendue  et  l’inten- 
sité, d’évaluer  les  dommages  causés.  Pourtant  des  renseignements 
précis  de  cette  nature  seraient  très  utiles,  ils  permettraient  à celui 
([ui  serait  chargé  de  les  centraliser  de  mieux  étudier  la  vie  et  les 
mœurs  des  campagnols  et  de  tirer  de  cette  étude  cpielques  lois 
générales  sur  les  conditions  l)iologiques  de  l’évolution  de  ces  ani- 
maux. Les  invasions  soudaines  de  campagnols  dans  certaines 
régions  on  troupes  incalculables  et  leur  disparition  presque  aussi 
rapide  doivent  avoir  des  causes  précises,  doivent  être  détermi- 
nées par  un  ensemble  de  conditions  dont  la  connaissance  nous 
permettrait  très  probablement  d'intervenir  utilement  avant  ({uo  le 
mal  ne  soit  devenu  irréparable.  Les  dommages  causés  par  ces  peti- 
tes bêtes  sont  tellement  élevés  et  se  répètent  si  souvent  qu’un 
eübrt  sérieux  et  soutenu  serait  pleinement  justifié. 

En  elfet,  depuis  181)3,  c’est-ii-dire  depuis  bientôt  20  ans  que  nous 
nous  occupons  de  cette  question,  nous  avons  assisté  à plusieurs 
grandes  invasions  de  campagnols  en  France  et  depuis  11)03,  grâce 
à une  meilleure  organisation  du  service  de  Parasitologie  agricole 
à l’Institut  Pasteur,  grêce  aussi  au  concours  dévoué  des  professeurs 
départementaux  et  spéciaux  d’agriculture,  nous  avons  pu  suivre 
ces  invasions  avec  plus  de  soin  et  enregistrer  leur  évolution  d’an- 
née en  année.  Nous  avons  jm  noter  ainsi  les  grandes  invasions  : 

Kn  1904  dans  plus  de  500  coimmines  réparties  dans  14  départements. 


1905 

— 

90 

— 

— 

3 



1900 

— 

16 

— 



4 

— 

1907 

— 

22 

— 



5 

..  — 

1908 

— 

22 

— 



5 

1909 

— 

138 

— 



10 



191 1 

— 

135 

— 



7 

— 

1912 

— 

t.OOO 

— 

— 

25 



Ainsi,  en  8 ans  2.000  communes  ont  subi,  du  fait  de  campa- 
gnols, des  dommages  comparables  à celles  que  nous  venons  d’in- 
diquer pour  l’Aisne,  c’est-à-dire  une  perte  d’à  peu  près  80  millions 
do  francs. 

Pour  micu.x  suivre  les  invasions  de  campagnols  qui  nous  avaient 
été  signalées  chaque  année,  nous  les  avons  indiquées  sur  une  série 


— 16  — 


(le  cartes  (ii°  1 à ii°  10)  en  désignant  les.  départements  envahis  par 
des  traits  plus  ou  moins  rapprochés,  suivant  l’intensité  et  l’éten- 
due de  l’invasion. 

Ces  cartes  nous  montrent  que,  si  les  grandes  invasions  de  cam- 
pagnols ne  se  produisent  qu'cà  des  intervalles  de  temps  assez  éloi- 
gnés, il  y a aussi  des  régions  où  des  invasions  partielles  se  repro- 
duisent presque  chaque  année. 

Ainsi  nous  avons  eu  une  grande  invasion  générale  de  1003  à 
1905,  embrassant  : d’une  part  les  Charentes  presque  en  entier  et 
partiellement  la  Vendée,  les  Deux-Sèvres  et  la  Vienne  ; d’autre  part 
tout  l’Est,  de  la  Meurthe-et-Moselle  jusqu'au  Jura,  tout  le  Bassin 
de  Paris,  de  l'Indre  jusqu’au  Pas-de-Calais  ; le  Puy-de-Dôme  au 
centre  et  l’Ariège  au  sud,  en  tout  15  départements. 

Une  autre  invasion  moins  intense  que  la  précédente  s’étendait 
sur  10  départements  (carte  n°  G),  et  une  très  grande  invasion,  la 
plus  importante depuis  20  ans,  qui  a débuté  au  printemps  1912 
dans  10  départements  de  l’Est  et  du  Sud-Est,  s’est  étendue 
ensuite  peu  à peu  vers  l’Ouest  sur  23  départements  (carte  no  9). 
Mais  à côté  de  ces  grandes  invasions,  nous  voyons  que  les  canq)a- 
gnols  apparaissent  chaque  année  sur  des  étendues  plus  restrein- 
tes, dans  le  Bassin  de  Paris  et  dans  l’Est,  moins  souvent  dans  le 
Sud-Ouest,  le  Centre  et  le  Sud. 

Il  y a donc  des  régions  où  les  campagnols  existent  toujours  en 
plus  ou  moins  grand  nombre,  des  foyers  où  ils  peuvent  pulluler  à 
certaines  époques  particulièrement  favorables  à leur  multiplication 
et  d’où  ils  se  répandent  sur  des  centaines  et  quelquefois  même  sur 
des  milliers  de  kilomètres  carrés. 


I FRANCE 


Carte  N«  2.  — Invasion  de  Campagnols  en  1905. 

Danysz. 


2 


Carte  N°  3.  — Invasion  de  Campagnols  en  1906. 


. — Invasion  de  Campagnols  en  1907. 


Carie  N°  I 


1 


— 21  — 


Carie  N“  6.  — Invasion  de  Gampaynols  en  1909. 


Carte  N’  7.  — Invasion  de  Campagnols  en  1910. 


Carte  N°  8,  — Invasion  de  Ganipa^nols  en  19H. 

9 


> 


w 


I 


2 


D 


FRANCE 


frange 


' i ( * , ' f. — ' 

Caj'te  :V°  .9.  — Invasion  de  Campagnols  on  1912. 

1 i T Tt T^— 1 

1— "H — -1 r : — r-f i — 

Carte  iV“  10.  Los  parties  ombrées  indiquent  les  régions  dans  lesquelles  les 
invasions  de  Campagnols  se  sont  produites  une  ou  plusieurs  fois  entre  les 
années  1903  et  1913. 


CHAPITRE  III 


DlSTRini  TlON  GÉOGRAPHIQUE  DES  CAMPAGNOLS  UN  FRANCE 


Sur  la  carte  11“  10  nous  avons  indiqué  tous  les  départements  qui 
ont  été  envaliis  par  les  campagnols  une  ou  plusieurs  fois  depuis 
1893. 

Les  traits  plus  ou  moins  rapprochés  indiquent,  coimne  sur  les 
cartes  précédentes,  Tintensité  et  l’étendue  plus  ou  moins  grandes 
de  l’invasion,  les  différentes  directions  des  traits  indiquent  la  fré- 
quence des  invasions. 

Nous  voyons  donc  sur  cette  carte  que  le  territoire  à campagnols 
comprend  44  départements. 

Les  cinq  départements  de  l’Ouest  : les  Charentes,  la  Vendée, 
les  Deux-Sèvres,  la  Vienne  forment  un  ilôt  relié  au  Bassin  de 
l‘aris  par  l’Indre  et  le  Loir-et-Cher.  ^ 

Le  Bassin  de  Paris  forme  un  deuxième  ilôt  à campagnols  où  il 
faudrait  peut-être  distinguer  deux  foyers,  Lun  au  Sud-Sud-Ouest 
de  Paris  comprenant  le  Loiret,  l’Eure-et-Loir  et  la  Seine-et-Oise, 
l’autre  au  Nord-Est  comprenant  la  Seine-et-Marne,  l’Aisne,  l’Oise, 
la  Somme  et  le  Pas-de-Calais. 

Un  troisième  îlot  très  nettement  distinct  existe  au  Sud-Est  com- 
prenant les  départements  des  Vosges,  Haute-Saône,  Doubs,  Jura, 
Haute-Manie  et  Côte-d’Or  avec  des  ramifications  allant  dans  la 
Meurthe-et-Moselle  et  la  Meuse  au  Nord,  dans  la  Saône-et-Loire 
au  Sud-Ouest,  (iet  Ilot  est  réuni  au  Bassin  de  Paris  par  la  Marne 
et  l’Aube. 

En  plus  de  ces  trois  foyers  principaux  on  eu  trouve  encore  trois 
autres  de  moindre  importance  et  sans  liaison  apparente  entre  eux 
et  entre  les  précédentes.  Le  plus  important  se  trouve  en  Auver- 
gue  (Puy-de-Dôme  et  Cantal)  avec  une  ramification  dans  l’Avey- 


— ^28 


ron.  Les  deux  derniers,  les  moins  importunts  de  tous,  se  trouvent 
d’une  part  dans  l’Isère  et  la  Drôme,  d’autre  part  dans  l’Aude  et 
l’Ariège. 

Dans  tous  les  autres  départements  il  n’y  a pas  eu  d’invasion  de 
campagnols  depuis  20  ans,  il  est  donc  fort  probable  qu’ils  n’y 
trouvent  pas  de  conditions  favorables  à leur  développement  et 
surtout  à ces  multiplications  excessives  qui  de  temps  en  temps 
produisent  les  grandes  invasions. 

Quelles  sont  donc  ces  conditions  défavorables  au  développe- 
ment des  campagnols  ? 

En  premier  lieu  il  faut  les  clierclier  dans  la  nature  du  sol  et 
surtout  du  sous-sol. 

En  superposant  notre  carte  n°  10  à une  carte  géologique  de  la 
France  on  remarque  que  la  zoiie  à campagnols  correspond  pres- 
que exactement  aux  formations  secondaires  et  tertiaires. 

En  partant  des  Cliarentes  elle  passe  en  effet  entre  le  massif 
armoricain  et  le  massif  central  pour  s’étendre  au  Nord  et  au  Nord- 
Est  sur  le  Bassin  de  Paris  jusqu’à  Arras,  et  contourner  le  massif 
central  pour  s’étendre  au  Sud  jusqu’au  delà  de  Grenoble. 

On  n’a  jamais  signalé  d’importantes  invasions  de  campagnols 
au  delà  du  Jurassique  aussi  bien  en  Bretagne  et  dans  le  Cotentin 
que  dans  le  massif  central  et  il  faut  bien  en  conclure  que  ces  ani- 
maux n'aiment  pas  les  territoires  où  affleurent  les  formations  pri- 
maires et  les  roches  éruptives.  Mais  il  y a aussi  de  vastes  étendues 
de  terrains  calcaires  qui  se  trouvent  dans  le  même  cas.  Ainsi,  il 
n’y  a pas  de  campagnols  dans  le  Bassin  de  la  Garonne  qui,  excepté 
les  Landes,  présente  une  conformation  géologique  très  voisine  de 
celle  du  Bassin  de  Paris.  En  suivant  les  zones  Jurassique  et  Cré- 
tacée qui  limitent  au  Sud  le  massif  armoricain  et  côtoient  ensuite 
le  massif  central  jusqu’aux  environs  de  Montauban,  on  constate  que 
les  invasions  des  campagnols  s’arrêtent  sur  une  ligne  que  l’on 
pourrait-traccr  entre  Pons  (Charente-Inférieure)  et  BulTec  (Cha- 
rente), l)ien  qu’au  point  de  vue  géologique  il  n’y  a pas  de  diffé- 
rence appréciable  entre  les  terrains  situés  au  Nord  et  au  Sud  de 
cette  ligne. 

11  n’y  a pas  de  campagnols  dans  les  départements  du  Calvados, 
de  la  Seine-Inférieure,  de  l’Oise,  de  l’Eure,  il  y en  a beaucoup  en 
Scine-ct-Oisc  et  dans  l’Eure-et-Loir  et  pourtant  ici  aussi  ce  sont 
partout  à peu  près  les  mêmes  formations  géologiques  (terrains 
tertiaires  et  quaternaires  avec  des  îlots  crétacés).  Par  contre  il  y a 


— so- 


cles ilôts  de  campagnols  sui‘  les  hauts  plateaux  du  Puy-de-Dôme, 
du  Cautal  et  de  la  Savoie. 

Il  résulte  doue  de  reusemble  de  ces  faits  que,  si  les  campagnols 
marquent  une  certaine  préférence  pour  les  terrains  calcaires,  ils 
j)euvent  vh’re  et  se  développer  aussi  sur  d'autres  terres  et  que  ce 
n’est  jcrohablement  pas  autant  la  natiq*e  chimique  du  sol  que  sa 
constitution  physique  qu’il  importe  de  considérer  pour  trouver 
l’ensemble  des  conditions  les  plus  favorables  à leur  développe- 
ment. On  peut  admettre  que  ces  conditions  se  trouveront  réalisées 
})artont  on  le  sol  sera  assez  profond  et  pas  trop  meuljle  pour  la 
construction  des  galeries  et  des  nids  et  le  sous-sol  assez  perméable 
pour  ])crmcttre  l’écoulement  facile  des  eaux  de  pluie. 


CHAPITRE  IV 


LES  DÉPLACEMENTS  DES  CAMPAGNOLS 


Les  campagnols  ne  sont  pas  des  animaux  migrateurs  propre- 
ment dits,  comme  les  criquets  pèlerins  ou  certains  oiseaux,  mais 
il  arrive  quelquefois,  lors  de  grandes  invasions,  qu’ils  quittent 
brusquement  et  en  masse  leurs  terriers,  traversent  les  rivières,  les 
lignes  de  chemin  de  fer  et  même  des  bourgs  assez  importants  pour 
s’éparpiller  sur  des  étendues  lieaucoup  plus  grandes  à quelques 
dizaines  de  kilomètres  du  lieu  de  leur  départ. 

On  dit  alors  communément  que  les  campagnols  ont  disparu,  on 
ne  sait  ni  où  ni  comment.  Et  par  le  fait  on  n’en  trouve  pas  de 
morts  à la  surface  du  sol  ni  dans  leurs  terriers,  et  personne  ne  les 
a vu  partir  ni  arriver  nulle  part.  Ces  disparitions  ont  toujours 
intrigué  les  agriculteurs  et  les  naturalistes  et  resteraient  probable- 
ment encore  longtemps  mystérieuses  si  dans  certains  cas,  bien 
rares  il  est  vrai,  les  campagnols  n’avaient  pas  laissé  de  traces 
bien  visibles  de  leurs  passages,  et  que  le  hasard  a fait  découvrir 
et  noter. 

Ainsi,  en  1892,  lors  d’une  visite  d’une  ferme  envahie  par  les 
campagnols  dans  la  Bric,  un  fermier  m’a  raconté  qu’en  revenant 
la  nuit  en  voiture  à la  maison,  il  avait  été  surpris  par  les  mouve- 
ments insolites  de  son  cheval,  le  lendemain  matin,  en  passant  par 
la  même  route,  il  y a trouvé  une  grande  quantité  de  ces  petits 
rongeurs  écrasés  par  les  roues  de  la  voiture  et  les  sabots  du  che- 
val. Il  est  donc  certain  que  ces  animaux  ont  dû  traverser  cette 
route  en  grand  nombre.  Un  autre  fait  analogue  nous  a été 
raconté  par  les  lial)itants  de  Rutfee  en  1904,  à la  fin  de  la  grande 
invasion  de  campagnols  dans  les  Cbarentcs.  Ils  ont  trouvé,  un 


— 31  — 


matin,  des  campagnols  noyés  dans  des  auges  et  des  réservoirs. 
— Une  armée  de  ces  rongeurs  a donc  dû  traverser  une  partie  de 
la  ville  pendant  la  nuit  précédente. 

Enfin  j’ai  assisté  moi-même  à un  exode  de  campagnols  traversant 
la  ligne  du  chemin  de  fer  de  Paris  à Bordeaux  à la  gare  de  Lou- 
lay,  près  de  Saint-Jean  d’Ângély.  — C’était  vers  9 heures  du  soir 
en  1905  en  hiver.  Ils  étaient  tellement  nombreux  que  j’ai  pu  en 
attraper  quelques-uns  vivants  sur  le  quai  de  la  gare. 

Les  disparitions  mystérieuses  des  campagnols  d’une  localité 
peuvent  donc  être  expliquées  assez  aisément,  par  ce  fait  que  ces 
animaux  ne  se  mettent  en  route  ([u’après  le  coucher  du  soleil, 
qu’ils  savent  éviter  autant  que  possible  les  endroits  balntés  et 
(pie  c’est  tout  à fait  par  liasard  que  l’on  peut  rencontrer  un  de  ces 
exodes  ou  ses  traces  dans  une  ville  ou  sur  une  route.  Il  y a aussi 
de  bonnes  raisons  de  ne  pas  les  retrouver  ailleurs,  du  moins  peu 
de  temps  après  leur  disjmrition.  ‘D’abord  il  en  périt  beaucoup, 
probablement  le  plus  grand  nombre,  en  route,  noyés  dans  les 
cours  d’eau  ou  les  fondrières,  et  comme  le  campagnol  sorti  de  son 
trou  et  de  son  sentier  est  pour  ainsi  dire  sans  défense,  un  grand 
nomlire  en  est  mangé  par  les  chats  et  les  petits  carnassiers  sanva- 
ges,  les  fouines,  les  Indettes,  dont  le  nombre  augmente  en  même 
temps  c|ue  celui  des  campagnols  dans  les  régions  qui  en  sont  infes- 
tées ; ensuite,  il  est  fort  probable  cju’ils  s’éparpillent  sur  des  éten- 
dues lieaiicoup  plus  grandes  cpie  celle  qu’ils  viennent  de  ejuitter  et 
comme  ils  creusent  de  suite  sur  les  nouveaux  territoires  des  gale- 
ries souterraines  dans  lesquelles  ils  se  cachent  et  ne  praticpient 
au  début  cpi’un  petit  nombre  d’orifices  de  sortie,  il  est  facile  de 
comprendre  qu’ils  échappent  pendant  un  certain  temps  à l’atten- 
tion des  cultivateurs.  Cinquante  ou  même  cent  campagnols  épar- 
pillés sur  l’étendue  d’un  hectare  y disparaissent  complètement 
surtout  au  début  de  l’invasion.  Le  cultivateur  ne  s’aper<j’oit  de 
leur  présence  dans  ses  cultures,  qu'il  ne  visite  probablement  pas 
tous  les  jours  en  détail,  que  (juand  ils  ont  eu  le  temps  de  tracer 
des  sentiers  bien  visibles,  de  manger  l'herbe  autour  de  leurs  trous 
et  surtout  de  taire  des  petits  et  de  devenir  ainsi  cinq  ou  six  fois  plus 
nombreux.  — Les  places  dénudées  par  les  petites  colonies  appa- 
raissent alors  de  loin  comme  des  taches  de  pelade  plus  claires 
sur  1 ensemble  du  champ  plus  sombre.  — La  présence  des  cam- 
pagnols dans  de  tels  champs  est  facile  à reconnaître,  même  de 
loin,  et  c est  généralement  alors  seulement  que  le  cultivateur 


— 32  — 


constate  l’invasion  qui,  en  réalité,  s’est  produite  deux  ou  trois  mois 
auparavant. 

11  ne  nous  a pas  été  bien  difficile  de  déterminer  les  causes  de 
ces  exodes  en  masses. 

Quand  on  tue  un  campagnol  pris  dans  un  cliamp  envahi  depuis 
longtemps,  et  qu’on  le  jilace  aussitôt  après  sa  mort  sur  une  feuille 
de  papier  lilanc,  on  voit  cette  feuille  se  couvrir  littéralement  en 
quelques  instants  de  puces  et  quelquefois  aussi  de  petits  acariens. 

L’habitation  prolongée  dans  le  même  nid  sous  terre  favorise 
beaucoup  le  développement  de  ces  parasites  dont  l’animal  est 
incapable  de  se  débarrasser  par  ses  propres  moyens  et  leur  nom- 
bre devient  à la  longue  tellement  considérable  que  la  vie  dans  son 
nid  lui  devient  impossible.  — 11  est  donc  obligé  de  le  quitter  et 
comme  il  ne  peut  pas  s’établir  dans  le  voisinage  immédiat,  parce 
qu'il  y a tout  autour  d’autres  campagnols  qui  se  trouvent 
d’ailleurs,  eux  aussi,  dans  le  même  cas,  ils  s’en  vont  tous  ensem- 
ble chercher  au  loin  des  territoires  encore  non  envahis. 

L’invasion  des  campagnols  dans  l’Aisne  qui  a duré  quatre  ans, 
du  printemps  1908  à l’automne  1911  et  que  nous  avons  pu  étudier 
sur  place  d’une  façon  suivie,  peut  servir  d'exemple  de  ces  migra- 
tions successives  dans  toutes  les  directions  en  partant  d’un  foyer 
relativement  très  restreint. 

Nous  l’avons  indiquée  sur  la  carte  n°  11  d’après  les  indications 
qui  m’ont  été  fournies  surplace  par  les  cultivateurs,  par  M.  Guer- 
rapain  professeur  d’agriculture  et  surtout  par  M.  Fleury,  rédac- 
teur au  Journal  de  Saint  Quentin  qui  a eu  la  bonne  idée  de 
demander  aux  lecteurs  de  son  journal  de  lui  indiquer  les  localités 
envahies  par  les  campagnols  avec  les  dates  de  leur  apparition  et 
de  noter  ces  renseignements  sur  une  carte  de  l’arrondissement. 

On  peut  très  bien  suivre  sur  cette  carte  les  progrès  de  l'invasion 
à partir  d’un  foyer  unique  constitué  par  la  commune  d’Etreilles 
et  qui  s’étend  d’abord  dans  la  direction  du  Nord-Nord-Est  et 
ensuite  dans  celle  du  Sud-Sud-Est. 

L’intervention  des  cultivateurs,  sous  la  direction  énergique  de 
M.  Guerrapain,  a eu  à la  fin  raison  de  cette  invasion.  Les  campa- 
gnols ont  disparu  à peu  près  complètement  à la  fin  de  l’année  1911. 

En  ettet,  en  1912,  on  n’a  signalé  dans  l’Aisne  que  quelques 
petites  taches  sans  grande  importance  malgré  (]ue  l’année  1912 
ait  été  extrêmement  favorable  au  développement  des  campagnols. 
— Dans  le  courant  de  cette  année  il  s’est  ])roduit,  la  })lus. 


33 


Curie  N°  11. 


— Extension  progressive  de  l’invasion  dos  campagnols  dans  les 
environs  de  Saint-Quentin  de  191)8  à 1911. 


Danysz 


3 


forte  invasion  que  nous  ayons  eu  à enreg'istrer  eu  France  depuis 
vingt  ans.  — Ainsi  (juc  le  montre  la  carte  n"  9,  cette  invasion  s’éten- 
dait sur  2o  départements  avec  plus  ou  moins  d'intensité.  Les  terri- 
toires des  départements  des  Vosges,  llaute-Saone,  llaut-Rliin. 
Doubs  et  Jura  étaient  envahis  presque  en  entiers. 

Il  est  impossible  d’admettre  que  ce  soient  les  campagnols  de 
l’invasion  de  1911  dans  l’Aisne  qui  sont  venus  peupler  toute  cette 
vaste  région  et  leur  apparition  presque  simultanée  sur  de  nom- 
breux  points  situés  dans  la  zone  comprise  entre  Mézières  et  Cham- 
béry d’une  part,  Delfort  et  CluUeauroux  d’autre  part,  dans  la  Cha- 
rente-Inférieure et  dans  la  Gironde,  exclut  toute  idée  d’invasion 
progressive  par  émigration. 

IvCS  cultivateurs  que  nous  avons  consultés  à ce  sujet  nous  ont 
tous’  répondu  (pi'ils  ne  se  sont  apcr(;us  de  la  présence  d’un 
grand  nombre  de  campagnols  dans  leurs  champs  qu’au  moment 
de  la  récolte  du  blé.  — Us  en  trouvaient  un  grand  nombre  sous  les 
javelles  que  le  mauvais  temps  les  obligeait  de  retourner  plusieurs 
fois  avant  de  les  rentrer. 

Ensuite  ce  sont  les  chanqis  d’orge  et  d’avoine  et  enfin  les  tuber- 
cules qui  ont  été  envahis  et  en  ont  beaucoup  souffert. 

En  réalité  il  y avait  cerfainement  des  campagnols  déjà  en  hiver 
partout  oii  on  a constaté  leur  présence  en  juillet,  mais  ils  n’étaient 
pas  alors  assez  nombreux  pour  attirer  l’attention  des  cultivateurs. 
D’ailleurs  ils  devaient  être  cantonnés  dans  les  prairies  artificielles 
et  surtout  dans  les  terrains  incultes  dont  personne  ne  s'occupe, 
et  leur  multiplication  rapide  peut  s’expliquer  facilement  par  le 
temps  exceptionnellement  doux  et  beau  du  printemps  de  cette 
année. 

En  consultant  les  cartes  1 à 9 nous  voyons  (juc,  depuis  1903,  il 
y avait  dans  cette  zone  })lusieurs  invasions  de  campagnols,  tan- 
tôt dans  une  région  tantôt  dans  une  autre. 

Ainsi  en  1901  il  y en  avait  dans  le  Jura,  la  Côle-d'Or  et  la  Haute- 
Marne, on  1907  dans  la  C(ke-d'Or  et  la  Haute-Marne,  en  1908  dans 
le  Jura  et  dans  les  \ osges,  et  en  1909  dans  le  Jura,  le  Douhs  et  les 
Vosges. 

On  peut  donc  affirmer  que  toute  cette  vaste  région  comprenant 
la  Lorrabie,  V Alsace,  l;i  Franche-Comté  et  une  partie  de  la  Cham- 
pagne et  de  la  Ilourgogne  est  particulièrement  favorable  à la  vie 
et  au  ch;\ (doppement  des  campagnols,  (jue  ces  petits  rongeurs  y 
existent  toujours  dans  un  grand  nond)re  de  foyers  et  que  cha(|ue 


36  — 


fois  que  les  conditions  climatériques  leur  deviennent  particuliè- 
rement favorables,  ils  se  multiplient  d’une  façon  excessive  et 
envahissent  des  territoires  plus  ou  moins  étendus. 

Les  deux  seules  espèces  de  campagnols  que  nous  y ayons  trouvées 
sont  le  Microlns  agrestis  et  le  Mici'otm  arvalü.  — Dans  les  régions 
boisées  on  trouve  aussi  en  assez  grand  nombre  des  mulots  [Mus 
sylvaticus). 


CHAPITRE  IV 


LKS  MOYENS  DE  DESTRUCTION 


Dans  la  lutte  avec  les  campagnols,  comme  d’ailleurs  avec  tout 
autre  animal  nuisible,  il  y a plusieurs  points  à considérer  et  notam- 
ment : l'efficacité  des  moyens  et  produits  destructeurs,  la  façon  de 
les  employer  et  surtout  l'organisation  de  la  lutte. 

Les  moyens  et  les  produits  dont  on  peut  se  servir  pour  détruire 
les  campagnols  sont  nombreux.  — Nous  allons  indiquer  ceux 
(pu  ont  été  reconnus  comme  les  plus  efficaces. 

Les  trous  de  tarières.  — On  creuse,  de  place  en  place,  sur  les 
sentiers  fréquentés  par  les  campagnols,  des  trous  de  30  à iO  cm. 
de  profondeur  et  de  8 à 10  cm.  de  diamètre  à parois  bien  vertica- 
les et  bien  lisses.  On  a construit  des  tarières  spéciales  pour  les 
creuser. 

Les  animaux  qui  toml)ent  dans  ces  trous  pendant  la  nuit  ne  peu- 
vent plus  en  sortir  facilement.  On  les  y trouve  le  matin  et  on  peut 
ainsi  en  détruire  un  assez  ffrand  nombre. 

O 

Ce  moyen,  plus  ou  moins  efficace,  suivant  la  quantité  de  trous 
creusés,  n'est  jamais  radical.  Tous  les  campagnols  ne  se  laissent 
pas  prendre  de  cette  façon.  On  ne  peut  pas  creuser  des  trous  nom- 
])reux  dans  tous  les  champs  sans  de  grands  dommages  pour  les 
cultures,  et  les  terres  meubles  et  friables  ne  s’y  prêtent  pas  du 
tout. 

Ce  moyen  ne  peut  donc  être  recommandé  que  dans  des  cas  parti- 
culiers, dans  les  jardins  ou  les  toutes  petites  propriétés  dans  les- 
quelles il  serait  facile  d’entretenir  les  trous  toujours  en  Ijon  état  et 
de  les  visiter  très  souvent. 


— 38  — 


LES  POISONS 


Arsenic.  — M.  Giierrapain,  professeur  cléparlemental  d’agriculLure  de 
l’Aisne,  a fait  employer  dans  son  département  sur  de  grandes  étendues  du 
grain  arséniqué  qu’il  a préparé  en  collaboration  avec  M.  Demolon. 

Voici  ce  qu’il  en  dit  lui-même  (1)  : « Les  résultats  donnés  par  l’empoi- 
sonnement par  l’arsenic  sont  assez  réguliers,  quoique  toujours  incomplets. 
I^a  préparation  des  appâts  a ici  une  importance  capitale  11  faut  en  elfet 
compter  avec  l’extrême  finesse  des  rongeurs  et  masquer  habilement  les 
substances  toxiques. 

« Nous  signalons  deux  modes  d’emploi  de  l'arsenic  qui  ont  donné  un 
assez  grand  nombre  d’insuccès  et  qui  ne  paraissent  pas  recommandables. 
Ce  sont  : 

1°  l’empoisonnement  de  la  graine  de  betterave  par  l’arséniate  de  soude 
(macération  de  la  graine  de  betterave  dans  une  solution  d’anhydride  arsé- 
nieux en  présence  de  la  soude  Solvay); 

2“  l'emploi  de  betteraves  hachées  saupoudrées  d’arsenic. 

La  technique  suivante  semble  être  celle  qui  s’est  montrée  le  plus  cons- 
tamment satisfaisante. 

« Mouiller  légèrement  le  grain  (blé  ou  de  préférence  avoine  aplatie)  avec 
un  sirop  de  sucre  ou  delà  mélasse  diluée  de  manière  à ce  qu’elle  colle  légè- 
rement aux  doigts  ; puis  praliner  avec  un  mélange  de  farine  et  d'arsenic 
en  parties  égales.  Il  faut  environ,  pour  100  kilos  de  grains,  a kilos  de 
mélasse  ou  de  sucre  et  12  kilos  d’arsenic  avec  un  poids  égal  de  farine. 

« Le  grain  peut  être  déposé  directement  dans  les  trous  au  moyen  d’une 
spatule.  On  peut  encore  le  placer  soit  sous  des  ruchettes  de  paille,  soit  dans 
des  tuyaux  de  drainage  ou  de  briques  creuses  qu’on  déplace.  La  protec- 
tion du  gibier  se  trouve  ainsi  assurée. 

11  convient  d’opérer  par  temps  sec.  Le  poison  exerce  son  effet  pendant 
plusieurs  jours  et  même  parfois  pendant  plusieurs  semaines  ». 

Noix  vomique.  — Les  préparations  à la  noix  vomique  agissent  surtout 
par  la  strychnine  qu’elles  contiennent  en  quantité  plus  ou  moins  grande 
suivant  la  provenance  et  l’état  de  conservation  de  ces  noix. 

Suivant  les  instructions  données  par  M.  Dubourg,  professeur  départe- 
mental d’agriculture  de  la  Charente-Inférieure  qui  a préconisé  cette  pré- 
paration et  en  a fait  employer  des  quantités  considérables  dans  l’arrondis- 
sement (le  la  llocbelle,  lors  de  la  grande  invasion  de  campagnols  en  1904 
et  1905,  on  prépare  les  appâts  à la  noix  vomique  de  la  façon  suivante  : 

Dans  une  chaudière  d’une  contenance  de  150  litres  environ  on  met 

(I)  Bulletin  men.'u/.c/ de  l’Office  des  renseignements  agricoles  du  ministère  de 
l’agricullurc.  Septembre  1912. 


— 39  — 


d’abord  5 kilos  de  noix  vomique  en  poudre,  50  grammes  d’acide  tartrique 
et  50  litres  d’eau  et  quand  ce  mélange  aura  bouilli  pendant  quelques  minu- 
tes on  y ajoute  50  kilos  de  blé  ou  de  tout  autre  grain  entier  ou  aplati.  On 
continue  encore  h cbaulTer  en  remuant  jusqu’au  moment  où  tout  le  liquide 
soit  absorbé  par  le  grain. 

L’opération  du  chaufTage  doit  durer  environ  1 heure  1/2. 

Les  grains  ainsi  préparés  peuvent  être  ensuite  distribués  dans  les  champe 
envahis  par  lescampagnols. 

Les  inconvénients  de  ce  moyen  de  destruction  sont  de  la  même  nature, 
mais  encore  plus  graves  que  ceux  que  nous  avons  signalés  pour  l’emploi  des 
préparations  arsénicales  La  stiycbnine  est,  en  elîet,  un  poison  beaucoup 
plus  violent  et  par  conséquent  plus  dangereux  que  l’acide  arsénieux  et  si 
on  l’emploie  sans  prendre  les  précautions  nécessaires  (tuyaux  de  drains, 
briques  creuses,  paniers)  on  tue  une  quantité  considérable  d’animaux  uti- 
les et  notamment  de  petits  oiseaux  et  de  gibier.  ' 

Carbonate  de  banjtnn.  — On  a encore  conseillé,  pour  détruire  les  campa- 
gnols, l’emploi  de  carbonate  de  baryum. 

Nous  avons  essayé  l’efTet  de  ce  poison  sur  des  campagnols  en  captivité. 

Nous  avons  mélangé  avec  l’eau  5,  10,  15  et  20  grammes  de  carbonate  de 
baryum  (qui  est  absolument  insolubledans  l’eau  ordinaire)  par  litre  d’eau. 
Un  litre  de  ce  mélange  peut  servir  à tremper  2 kilos  d’avoine  aplatie  et 
donne  ainsi  3 kilos  d’appdt,  qui  contiennent  respectivement  5,  10,  15  et 
20  gr.  de  carbonate  de  baryum. 

Ln  supposant  une  invasion  moyenne  de  2.000  campagnols  ù l’hectare  et 
une  distribution  de  10  kilosd’appàtspar  hectare,  chaque  campagnol  pour- 
rait donc  en  absorber  5 grammes. 

Nous  avons  donc  donné  5 grammes  de  ces  dilTérents  mélanges  à chaque 
campagnol  placé  isolément  dans  un  bocal  en  verre  et  laissé  préalablement 
à jeun  pendant  12  heures. 

Sur  8 animaux  mis  en  expérience  il  en  est  mort  deux,  un  de  ceux  qui 
ont  reçu  le  mélange  à 5 pour  mille  et  un  de  ceux  qui  ont  reçu  le  mélange 
à 10  pour  mille. 

Leux  qui  ont  reçu  le  mélange  à 5 pour  mille  ont  mangé  h peu  près  tout  le 
grain  préparé;  le  mélangea  10  pour  mille  n’a  été  mangé  qu’en  partie,  les 
mélanges  a lo  et  a 20  pour  mille  ont  été  à peine  touchés,  — bien  que  les 
campagnols  n’aient  pas  reçu  d’autre  nourriture  pendant  24  heures. 

Le  résultat  est  un  peu  ditlérent  quand  on  mélange  le  carbonate  de 
bai  juin  avec  un  bouillon  que  1 on  ensemence  ensuite  avec  un  microbe  qui 
acidifie  un  peu  .son  milieu  de  culture. 

Fin  nourrissant  un  certain  nombre  de  campagnols  avec  des  appâts  pré- 
parés de  cette  façon,  nous  avons  constaté  une  mortalité  de  30  0/0. 

t.ette  dilféience  d.ans  les  résultats  observés  peut  être  due  à deux  causes  : 
Les  campagnols  mangent  un  peu  plus  d’un  appât  imprégné  de  bouillon  que 


— 40 


d’un  appât  imprégné  d’eau,  et  l’acidité  du  bouillon  de  culture  provoque 
la  formation  de  composés  solubles  et  plus  toxiques  au  dépens  ducarbonate 
de  baryum. 

Gaz  toxiques  (d’après  MM.  Guerrapain  et  Demolon). 

Acide  stdfiireux.  — « L’emploi  de  l’acide  sulfureux  (gazClayton)  pour  la 
dératisation  des  navires  nous  a inspiré  l’idée  de  tenter  un  moyen  de  des- 
truction des  souris  par  ce  moyen.  Dans  ce  but  nous  avons  fait  construire 
un  appareil  permettant  d’injecter  directement  dans  les  galeries  de  l’anhy- 
dride sulfureux  liquide.  ladose  de  20  grammes  par  trou  les  résultats  ont 
été  nuis.  Le  gaz  sulfureux  diffuse  rapidement  et  n’imprègne  pas  le  sol 
comme  le  fait  le  sulfure  de  carbone,  dont  les  vapeurs  très  denses  gagnent 
progressivement  toutes  les  galeries  et  y persistent. 

Les  appareils  d’enfumage  se  sont  montrés  peu  efficaces  et  onéreux. 
Là  où  on  obtient  l’asphyxie  il  est  d’ailleurs  permis  de  se  demander  si  le 
résultat  n’est  pas  dû  à la  production  d’une  certaine  quantité  de  sulfure  de 
carbone  provenant  de  la  combustion  du  soufre  et  en  présence  de  charbons 
en  ignition.  » 

Sulfure  de  carbone.  — « Nos  expériences  personnelles  et  les  essais  qui 
ont  suivi  dans  six  communes  ont  démontré  d’une  manière  indiscutable, 
l’efficacité  du  sulfure  de  carbone  au  point  de  vue  de  la  destruction  des 
campagnols.  Cette  unanimité  des  avis  doit  attirer  l’attention  sur  ce  mode 
de  destruction.  L’asphyxie  se  produit  en  quelques  minutes.  Toutefois, 
pour  que  le  procédé  soit  économique  et  pratique,  il  importe  d’opérer  de  la 
manière  suivante  : 

Les  trous  sont  bouchés  la  veille  au  moyen  du  rouleau  ou  de  la  herse, 
soit  simplement  au  moyen  d’un  bâton  renflé  à son  extrémité.  Une  personne 
peut  par  ce  procédé  boucher  au  moins  1 h.  1/2  par  jour.  Là  ou  les  campa- 
gnols sont  nombreux  et  où  l’on  trouve  plus  de  10.000  trous  à l'hectare,  il 
peut  s’en  trouver  1.000  de  rouverts  le  lendemain.  On  injecte  fi  à 8 grammes 
dans  chaque  trou  et  l’on  bouche  d’un  coup  de  talon  ; le  lendemain  on 
recommence.  On  peut  retrouver  100  à 300  trous  en  tenant  compte  de  ceux 
oubliés  la  veille.  Si  l’opération  a été  bien  conduite,  la  destruction  est  com- 
plète. On  peut  user  ainsi  8 à 10  kilos  de  sulfure  à l’bectarc.  » 

« Les  pals  injecteurs  utilisés  par  les  viticulteurs  ne  conviennent  pas  pour 
cette  opération.  On  peut  utiliser  un  entonnoir  muni  d’un  tuyau  flexible 
de  plomb.  Mais  il  est  infiniment  préférable  d’avoir  un  appareil  injecteur 
spécial  d’un  maniement  commode  et  permettant  de  doser  le  liquide 
injecté.  Nous  nous  préoccupons  en  ce  moment  de  faire  construire  un  appa- 
reil répondant  à ce  desideratum.  >> 

En  ce  qui  concerne  ce  procédé  il  est  nécessaire  de  faire  remarquer  qu’il 
est  absolument  impossible  de  fermer  les  trous  de  campagnols  à l’aide  du 


— 41  — 


rouleau  ou  de  la  herse  dans  les  chaumes  ou  les  terres  incultes,  où  la  terre 
est  généralement  trop  dure,  et  il  semble  qu’il  ne  serait  guère  prudent  de 
tenter  ces  opérations  dans  les  champs  couverts  de  cultures. 

Les  inconvénients  de  l'emploi  des  poisons. 

Les  poisons  que  nous  venons  d’énumérer  tuent  sûrement  tons 
les  animaux  qui  en  absorl)ent  une  quantité  suffisante,  et  c’est  là 
leur  plus  grave  défaut.  Malgré  toutes  les  précautions  que  l’on 
peut  prendre,  on  ne  peut  pas  éviter,  surtout  quand  il  s’agit  d’opé- 
rer en  grand,  sur  des  milliers  d’hectares,  rempoisonnement  d’un 
nombre  plus  ou  moins  grand  d’animaux  utiles,  domestiques  ou 
sauvages  et  surtout  d’oiseaux. 

Ainsi,  dans  une  expérience  de  traitement  par  la  noix  vomique, 
on  a trouvé,  sur  un  champ  de  oO  liectares  : G pies,  10  alouettes, 
20  verdiers,  2 corbeaux,  l mésange,  1 pinson,  soit  40  oiseaux 
tués  par  ce  poison,  et  il  est  certain  que  l’on  n’a  j)as  découvert  tous 
les  oiseaux  tués  sur  place  ni  surtout  ceux  qui  sont  allés  mourir  un 
peu  plus  loin. 

Lu  outre  l’emploi  des  poisons,  même  les  plus  actifs,  ne  donne 
jamais  de  résultats  complètement  satisfaisants.  M.  Guerrapain  l’a 
constaté  pour  l’arsenic,  dont  il  a préconisé  l’emploi  dans  l’Aisne 
en  1909-11  de  préférence  à tout  autre  moyen.  Une  commission 
nommée  parle  ministre  de  l’Agriculture  a constaté,  par  une  expé- 
rience faite  en  1905  près  de  Saint-Jean  d’Angély  et  dont  nous  don- 
nerons plus  loin  tous  les  détails,  que  la  noix  vomique  ne  peut  don- 
ner en  moyenne  qu’une  destruction  de  70  0/0. 

On  peut  en  dire  autant  du  baryum,  de  la  pâte  j)bospboréc  et  en 
général  de  tous  les  poisons  que  le  campagnol  doit  manger  pour 
être  tué. 

Seul  le  sulfure  de  carbone  peut  donner  des  résultats  parfaits, 
c’est-à-dire  produire  une  destruction  complète,  mais  à la  condi- 
tion, bien  entendu,  d’atteindre  tous  les  campagnols  qui  infestent 
un  champ.  Dans  la  pratique,  on  obtiendra  donc  toujours  ce  résul- 
tat quand  on  n’aura  à traiter  que  de  petites  étendues  et  quand  on 
remplira  convenablement  toutes  les  galeries  frayées,  mais  quand  il 
s’agira  de  traiter  l’ensemble  d’un  vaste  territoire  embrassant  des 
dizaines  ou  même  des  centaines  de  communes,  alors  il  sera  maté- 
riellement impossible  de  traiter  toutes  les  pa  rcelles  infestées  avec 
un  soin  égal  et  il  en  résultera  toujours  une  destruction  plui  ou 
moins  incomplète. 


CHAPITUE  VI 


EMPLOI  DE  CULTURES  DES  MICROBES  PATHOGÈNES 
POUR  LES  PETITS  RONGEURS 


Pasteur  a eu  le  premier  l’idée  d’utiliser  un  virus  pour  la  des- 
truction des  animaux  nuisibles.  11  a conseillé  l’emploi  du  microbe 
du  choléra  des  poules  pour  la  destruction  des  lapins. 

Toutefois  ce  virus,  qui  a donné  d’excellents  résultats  dans  quel- 
ques expériences,  n’a  jamais  été  appliqué  en  grand,  parce  que  le 
microbe  du  choléra  des  poules,  pathogène  pour  les  lapins,  est  éga- 
lement très  dangereux  pour  un  grand  nombre  d’oiseaux  domesti- 
ques et  sauvages.  En  répandant  de  grandes  quantités  de  cultures 
de  ce  microbe  dans  les  champs  et  les  bois  fréquentés  par  les  lapins 
on  pouvait  provoquer  des  épizooties  dangereuses  parmi  les  oiseaux 
utiles. 

Aujourd’hui,  pour  détruire  les  lapins,  on  peut  se  servir  avec 
succès  d'un  microbe  voisin  du  choléra  des  poules,  qui  est  aussi 
un  pasteurélla,  mais  absolument  inoflensif  pour  tous  les  animaux 
autres  c[ue  les  lapins. 

Les  bacilles  du  type  lyphi  murium.  — Les  premières  cultures 
pathogènes  pour  les  campagnols  ont  été  employées  en  Grèce  par 
M.  Lœftler,  le  savant  professeur  de  iiactériologie  de  Greifswald. 

M.  Lœffler  a observé  une  épidémie  spontanée  parmi  les  souris 
blanches  de  son  laboratoire  ; il  en  a isolé  le  microbe,  qui  a servi 
avec  succès  à ce  premier  traitement  des  cliamps  envahis  par  les 
campagnols. 

Le  microbe  découvert  par  Ladtler  appartient  au  groupe  de 
microiies  intermédiaire  entre  le  b.  cnli  et  le  b.  d' Ëberth,  mais  plus 
nipproché  de  ce  dernier  par  l'ensemble  de  ses  propriétés  physio- 
logiques que  du  b.  coli.  On  a réuni  tous  ces  microbes  sous  le  nom 
de  paratyphiques  ou  coccobacilles  de  l'enlérile^  ou  encore  sous  le 
nom  de  Salmonella. 


— 43  — 


Plusieurs  types  ou  races  de  ces  microbes  sont  pathogènes  pour 
les  petits  rongeurs,  auxquels  ils  donnent  j)ar  ingestion  iinc  mala- 
die très  analogue  à la  fièvre  paratyphoïde  de  rhomme  : une  forte 
congestion  intestinale  avec  hypertrophie  et  quelquefois  nécrose 
des  glandes  de  Peycr,  hypertrophie  de  la  rate  et  dégénérescence 
graisseuse  du  foie. 

Pour  cette  raison,  il  nous  semble  qu’il  serait  juste  de  donner  à 
tous  ces  parai ijplüq lies  pathogènes  pour  les  petits  rongeurs,  le 
nom  générique  de  Bacilliis  Itjphi  murium  que  Lœffler  a donné, 
avec  l)eaucoup  de  raison,  au  microbe  découvert  par  lui,  bien  (jue, 
(l’après  les  travaux  les  plus  récents  et  notamment  ceux  de  Mühlens, 
Dahm  et  Fürst  (l),  le  microbe  de  laeffler  devrait  être  rangé  ])armi 
les  paralyphiqnes  B.  ou  Bac.  de  l' entérite  Type  I (Flügge)  tandis 
que  le  bac.  ratli  Dantjsz  ainsi  que  les  autres  microbes  pathogènes 
pour  les  rats,  découverts  plus  tard  par  Dunhar,  Issatchenko  et 
Neumann  devraient  former  un  groupe  à part  et  être  rangés  parmi 
les  bac.  de  l'entérite  T Y\m  II  ((Jaertner). 

D’après  Hurler  (2)  qui  vient  de  faire  paraître  (1912)  un  remar- 
quable travail  de  classification  de  toute  la  famille  de  microbe» 
allant  duco//  au  Itiphicjue,  basée  sur  leurs  pro])riétés  biochimiques 
et  sur  ragglutination  par  les  sérums  spécifiques,  et  qui  })io])osc 
pour  cette  famille  cinq  grouj)CS  distincts,  les  bac.  a})particn- 
(1  raient  au  groupe  II,  le  bac.  tjiphi  miiriimi  au  grou[)o  111,  auquel 
appartient  aussi  le  bac.  du  Hogcholera  ; les  trois  autres  groupes 
seraient  formés  : le  premier  par  les  bac.  coli.,  le  quatrième  par 
les  par alij plaques  B et  le  cinquième  par  les  bac.  typhiques. 

Il  nous  semble  inutile  d’entrer  ici  dans  tous  les  détails  de  cette 
classification,  mais  il  nous  semble  nécessaire  d'indiquer  les  réac- 
tions caractéristiques  du  microbe  préj)aré  par  l’Institut  Pasteur  de 
Paris  pour  combattre  les  invasions  de  campagnols  et  d’autres 
petits  rongeurs,  et  que  nous  appellerons  bac.  lyphi  murium, 
lype  D. 

Le  bacillus  typhi  murium,  lype  J).  — (ie  microbe  j)ousse  assez 
rapidement  dans  tous  les  milieux  de  culture  usuels,  mais  avec 
un  peu  moins  d’abondance  et  de  rapidité  que  le  bac.  coli.  A l’exa- 
men microscopique  il  se  montre  sous  forme  de  petits  bâtonnets  à 
bouts  arrondis  plus  ou  moins  longs,  depuis  la  forme  de  [coccus)  à 

(1)  Miïhleus,  Dalim  et  Fürst.  Centralblntt  f.  liakt.  Ahl.  1.  Ori".  fid  t8  tOüR- 
1909,  p.  1 

(2)  Konrad  Hurler,  Centralbl.  f.  liakt.  Abl.  1.  Orig.  Bd  03.  Ileft  4 6. 


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peine  ovoïdes  juscpi’aux  hàtonnets  10  à 20  fois  plus  longs  que  lar- 
ges. Oiielquefois,  les  formes  très  convies  forment  de  convies  chaî- 
nettes dans  lesquelles  les  microljes  sont  accoles  côte  à côte  et  non 
pas  bout  à bout.  Muni  de  cils  vibratils  ti‘ès  nombreux  et  très  longs, 
il  est  animé  de  mouvements  très  vifs. 

Les  colonies  isolées  d’une  culture  de  24  heures  sur  gélose  présen- 
tent l'aspect  de  bues  gouttelettes  translucides  qui  deviennent  avec  le 
temps  de  plus  en  plus  troubles  sans  jamais  devenir  complètement 
opaques. 

Sur  gélose  cafféinée  à 0,3  0/0  (d’après  Hurler)  le  microbe  D 
donne,  ainsique  \e.  paralyithigne  B.,  des  cultures  mobiles,  tandis 
que  tous  les  autres  microbes  appartenant  à la  famille  de  coU- 
Igphique,  y compris  les  autres  hac.  typhimnrinm,  donnent  des  cul- 
tures immobiles. 

Le  microbe  D se  distingue  encore  des  autres  Bac.  ralli  en  ce 
qu’il  ne  décompose  pas  l’acide  citrique  et  que  le  sérum  des  ani- 
maux inoculés  avec  ce  inicrol)e  devient  deux  fois  j^lus  agglutinant 
pour  lui  que  pour  les  autres  microbes  du  même  groupe. 

Il  partage  avec  tous  les  pavatyphiques  la  propriété  de  faire  fer- 
menter la  Glycosc,  la  Fructose  et  la  Maltose  et  reste  indifférent 
pour  le  Saccharose,  Lactose  et  Raffinosc  et  dilïère  en  cela  du  coli 
qui  fait  fermenter  tous  ces  sucres. 

Pour  le  distinguer  d’un  coli  les  réactions  les  plus  simples 
seraient  donc  de  le  cultiver  dans  du  lait,  qu’il  ne  coagule  pas.  tan- 
dis que  le  coli  coagule  le  lait  assez  rapidement  (en  24  à 48  heu- 
res), ou  bien  sur  la  gélose  de  Gonradi-Drygalski,  que  le  bac.  D 
colore  en  bleu,  tandis  que  le  coli  la  colore  en  rouge  vif. 

On  peut  le  distinguer  du  b.  lyphiqne  en  faisant  des  cultures 
comparatives  dans  des  milieux  contenant  un  peu  de  dulcile  ou  d’ara- 
binose.,  qu’il  fait  fermenter  tandis  que  le  microbe  d'Eberth  n’y  pro- 
duit aucune  réaction. 

Vivnlence.  — Le  bac.  lyphi  murimn  D est  pathogène  pour  tous 
les  muvirlés,  mais  à des  degrés  différents. 

L’animal  le  plus  scnsiljle  et  d’une  sensibilité  pour  ainsi  dire 
absolue  est  la  souris  l)lanchc,  qui  ne  résiste  pas  aux  doses  les  plus 
faibles  d’une  culture  d’une  virulence  moyenne  prise  par  inges- 
tion. — I^es  souris  blanches  meurent  généralement  2 à 8 jours 
après  avoir  ingéré  une  dose  quelcoinpie  de  cette  culture. 

Les  campagnols  (Microtinés)  de  toutes  les  espèces  que  nous  avons 
pu  expérimenter  et  notamment  le  Mievolus  arvalis,  le  M.  ayveslis 


et  VArvicola  terrostris  monticola  et  (juelques  autres  espèces  habi- 
tant l’Europe  centrale,  l’Espagne,  la  Péninsule  Balkanicpic  et  la 
Syrie  sont  presque  aussi  sensibles  que  les  souris  blanches.  Dans 
les  expériences  comparatives  ils  meurent  en  même  temps  ou  tout 
au  plus  avec  un  retard  d’uii  ou  deux  jours  sur  les  souris  blanches. 

Les  souris  grises  des  maisons  {Mus  mnsculus),  les  mulots  [Mus 
sijlvaticus)  et  les  rats  gris  ou  briimitres  [Mus  decumauus)  sont 
un  peu  plus  résistants;  ils  succombent  généralement  5 à 15  jours 
après  l’ingestion  d'un  peu  de  culture,  et  ceux  qui  guérissent  en 
apparence  après  une  maladie  plus  ou  moins  longue,  meurent  de 
cachexie  deux  ou  trois  mois  plus  tard. 

L’esj)éce  la  plus  résistante  des  muridés  d’Euro])e  est  le  rat  noir 
[Mus  rallus]  très  fréquent  autrefois,  mais  aujourd’hui  remplacé 
presque  partout  par  le  rat  gris  j)lus  j)rolifupie. 

Nous  avons  pu  constater  aussi  la  virulence  de  ce  microbe  pour 
les  Hamsters,  assez  communs  dans  certaines  régions  de  l’Alsace  et 
en  Hussie  et  pour  les  Taltousa,  rongeurs  aussi  grands  mais  plus 
gros  que  les  rats  commun  d’Europe  et  qui  ravagent  les  plantations 
des  bananiers  dans  l’Amérique  centrale 

Toutefois,  il  nous  faut  remarquer  que  la  virulence  de  ce  microbe 
peut  varier  beaucoup  d’une  culture  à l’autre,  surtout  pour  certaines 
es])èces.  Elle  n’est  à peu  près  constante  que  pour  les  souris  blan- 
ches et  les  campagnols  ; pour  toutes  les  autres  espèces  de  rongeurs 
que  nous  venons  d’énumérer  ])lns  haut  elle  doit  être  vérifiée  fré- 
quemment et  enti’ctenue  avec  soin. 

Pour  tous  les  autres  animaux  ainsi  que  pour  l'homme  le  ôac. 
ti//jfii  murium  I)  pris  par  ingestion  est  pratiquement  inoffensif. 

Les  animaux  de  laboratoire  tels  cpio  cobayes,  lapins,  poules, 
pigeons,  ainsi  (pie  tous  les  animaux  domesticpies,  peuvent  en  absor- 
ber de  grandes  quantités  sans  en  être  incommodés  d’une  fac’on 
appréciable. 

Inoculé  sous  la  peau  il  est  également  peu  dangereux  pour  tous 
ces  animaux,  mais  il  tue  rapidement  les  cobayes  et  les  lapins,  (piand 
on  l’inocule  dans  la  cavité  péritonéale  ou  dans  les  veines,  et  les 
pigeons  quand  on  l’inocule  dans  les  muscles  jîectoraux. 

Les  microbes  ajipartenant  au  groupe  des  paratypbiciues  auquel 
appartiennent  aussi  les  bac.  t./jp/n  murium,  sont  très  réjiandues 
dans  la  nature  et  il  semlile  que,  excepté  pour  les  petits  rongeurs, 
leur  rôle  comme  agents  pathogènes  doit  être  considéré  comme 
tout  à fait  négligeable. 


fin  eüet,  il  a été  prouvé  tout  d’abord  quo  le  bac.  du  llog-cboléra 
(<[ui  lui  aussi  appartient  au  même  groupe),  n'est  pas  le  véritable 
agent  de  cette  maladie,  causée  par  un  microbe  invisible  passant  par 
les  filtres  en  porcelaine,  et  MM.  Uhlenhut,  Huebner,  Xnlander 
et  Bohts  (1)  ont  montré  que  le  soi  disant  bac.  du  llog-cboléra  et  le 
paratyphique  B.  se  trouvent  très  souvent  dans  le  contenu  intesti- 
nal de  porcs  parfaitement  sains. 

Rimpau  (2)  a trouvé  le  paratyphique  B.  dans  les  selles  et  les 
urines  d’un  grand  nombre  de  personnes  absolument  saines  et  sans 
relation  aucune  avec  des  malades. 

Ilucbnev  (3)  a trouvé  très  souvent  le  même  microiie  dans  différents 
produits  de  la  charcuterie  conservée  ou  fraîche  et  en  a mangé  lui- 
même  ainsi  que  toute  sa  famille  sans  avoir  éprouvé  le  moindre 
mal. 

finfm,  argument  le  plus  probant,  depuis  que  les  différents  virus 
muricides  sont  employés  dans  la  pratique,  c’est-à-dire  depuis  plus 
de  vingt  ans,  des  millions  de  personnes  ont  manipulé  de  grandes 
quantités  de  cultures  de  ces  microbes  ; on  a répandu  des  millions 
de  litres  de  ces  cultures  dans  les  champs,  dans  les  fermes,  les  mai- 
sons d'habitations,  etc.  et  il  n’en  est  résulté  aucun  mal  apprécia- 
ble ni  pour  les  hommes,  ni  pour  les  animaux  domestiques. 

Il  est  donc  très  prol>able  que  dans  les  cas  d’empoisonnement  par 
les  aliments  ou  dans  certaines  entérites  dans  lesquelles  on  décèle 
la  présence  d’un  paratyphique,  on  doit  chercher  ailleurs  la  vérita- 
ble cause  de  la  maladie  et  que  le  microbe  incriminé  jusqu’à  pré- 
sent n’y  joue  qu’un  rôle  secondaire. 


COXSEflVATlON  DE  LA  VIRULENCE 


Le  bac.  lijplii  miiriurn  I)  peut  dans  certaines  conditions  conser- 
ver sa  vitalité  et  sa  virulence  pendant  très  longtemps. 

Nous  avons  do  ces  cultures  qui,  conservées  depuis  12  ans  dans 
des  ampoules  scellées,  sont  encore  aussi  virulentes  qu’au  moment 
de  leur  préparation.  Toutefois,  ces  vieilles  cultures  ne  pourraient 
pas  être  employées  telles  quelles  dans  la  pratique,  filles  ne  produi- 

(1)  llf'rliner  MiHloPi  tsIl.  (iesplhch.  21  mai  1D08. 

(2j  Douiscke  ined.  Woc/i.  1908,  jî, 

\’.ii  Ihid.,  p.  lü'it 


raient  pas  le  même  effet  (jue  les  cultures  fi-aîches,  d’abord  parce 
rpie  le  nombre  de  microbes  vivants  contenus  dans  le  meme  l)ouil- 
loii  diminue  progressivement  avec  le  temps  et  aussi  parce  que  les 
microbes  restés  vivants  dans  les  ampoules  scellées  ne  possèdent 
pas  les  mêmes  propriétés  vitales  que  ceux  d’une  culture  jeune.  Ils 
perdent  leur  mobilité  (prol)ablenient  leurs  cils  vibratiles ) et  tombent 
au  fond  du  vase. 

Une  telle  culture  doit  donc  être  rajeunie,  c’est-à-dire  réensemen- 
cée dans  un  l)ouillon  nouveau,  pour  produire  le  même  etfet  qu’une 
culture  fraîche. 

Pour  les  cultures  de  notre  microl)e,  comme  pour  beaucoup 
d’autres,  il  y a une  période  d’évolution,  pendant  laquelle  il  produira 
son  maxiTiium  d'effet.  Quand  on  ensemence  ce  microbe  dans  un 
milieu  nutritif,  on  voit  ce  milieu  se  troubler  uniformément  au  bout 
d’un  certain  temps,  d’abord  légèrement,  ensuite  de  j)lus  en  plus  for- 
tement jusqu’à  un  maximum  qui  dépend  de  la  richesse  nutritive  du 
bouillon.  — Puis  on  voit  cette  culture  s’éclaircir  peu  à peu  en  com- 
nien(,‘ant  par  en  haut  et  un  dépèt  de  microbes  se  forme  au  fond.  Un 
même  temps,  si  le  récipient  contenant  la  culture  n’est  fermé  qu’avec 
un  tanqjon  de  coton,  il  se  forme  un  vfule  à la  surface  du  liquide. 

C’est  pendant  son  maximum  de  développement  (jue  le  virus  pro- 
duira son  maximum  d’effet  et  ce  maximum  de  développement  peut 
durer  plus  ou  moins  longtemps  suivant  la  composition  du  bouillon 
et  la  température  à laquelle  la  culture  est  exposée  : un  ou  deux 
jours  dans  un  bouillon  pauvre,  ([uinze  jours  et  même  plus  long- 
temps encore  dans  un  bouillon  suffisamment  riche  en  peptones  et 
auti'cs  matières  nutritives  et  à une  température  voisine  de  30®. 

Prati(piement,  une  culture  de  virus  bien  pure,  c^’est-à-dire  ne 
contenant  pas  de  microbes  étrangers,  préparée  dans  un  bouillon  de 
viande  additionné  de  peptone  contenu  dans  une  bouteille  bien 
bouchée,  gardera  toutes  ses  propriétés  de  vitalité  et  de  virulence 
pendant  15  jours  à partir  du  jour  de  sa  préparation,  et  comme  il 
faut  compter  environ  5 jours  entre  le  moment  de  Uensemencement 
et  l’emploi  des  cultures,  les  cultivateurs  auront  encore  10  jours 
pour  choisir  un  moment  favorable  au  traitement.  Si  l’on  ne  pou- 
vait pas  employer  le  virus  dans  les  10  jours  qui  suivront  sa  récep- 
tion, alors  on  pourra  l'employer  encore  mais  à des  dilutions  moins 
foidesi  Au  lieu  de  3 litres  d’eau  par  bouteille,  il  ne  faudra  en  pren- 
dre que  !2  ou  1 litre,  ou  même  employer  le  virus  tel  quel  sans  le 
diluer  du  tout. 


48  — 


8ien  eiiteiidu  on  ne  doit  ouvrir  les  bouteilles  qu’au  moment  de 
la  prc2:)aration  des  appâts,  et  les  appâts,  une  fois  préparés,  ne  doi- 
vent pas  être  gardés  pendant  plus  de  24  heures  surtout  en  été,  — 
parce  que  toutes  sortes  de  microbes  qui  se  trouvent  dans  l'eau,  sur 
le  grain  et  sur  tous  les  objets  avec  lesquels  on  aura  préparé 
les  appâts,  se  développeraient  rapidement  dans  le  grain  écrasé  et 
mouillé  et  pourraient  diminuer  l’activité  du  virus. 

PréjmraLion  du  virus  en  grandes  quanlilés. 

Nous  avons  vu  plus  haut  que  les  invasions  de  campagnols  se  pro- 
duisent généralement  assez  brusquement  et  qu’elles  peuvent 
s’étendre  quelquefois,  presque  simultanément  sur  des  milliers  de 
kilomètres  carrés. 

Ainsi,  nous  avons  vu  qu’en  1912  les  premières  apparitions  de 
campagnols  ont  été  signalées  en  juin  dans  3 départements  ; en 
septembre  l’invasion  s’étendait  déjà  sur  10  départements,  en 
novembre  sur  25.  L’ensemble  des  territoires  envabis  comprenait 
pj,us  d'un  million  d’hectares,  et  comme,  pour  détruire  les  campa- 
gnols il  faut  employer  1 litre  de  virus  par  hectare,  il  aurait  donc 
fallu  produire  un  million  de  litres  de  ces  cultures  en  150  jours,  soit 
près  de  7.000  litres  par  jour. 

Pour  produire  un  bon  effet,  c’est-à-dire  une  destruction  à peu 
près  complète  de  campagnols  avec  1 litre  de  culture  virulente  par 
hectare,  il  faut  que  cette  culture  soit  absolument  pure  et  aussi 
riche  que  possible  ; il  est  donc  nécessaire  de  préparer  le  bouillon 
de  culture  avec  les  substances  les  plus  nutritives  pour  nos  micro- 
bes, de  le  stériliser  convenablement  (chauffer  pendant  au  moins 
20  minutes  à 116-120°)  et  de  la  maintenir  à l’abri  de  toute  conta- 
mination pendant  toutes  les  manipulations  que  ce  l)ouillon  doit 
subir  depuis  sa  stérilisation  jusqu’au  moment  de  son  emploi  sur 
place. 

Après  la  stérilisation,  qui  doit  être  faite  dans  des  récipients  bou- 
chés avec  des  tampons  de  coton  et  recouverts  de  capuchons  de 
})apier,  le  bouillon  doit  être  gardé  au  moins  pendant  24  heures 
pour  que  l’on  puisse  contrôler  sa  stérilité.  Ensuite  ou  peut  l’ense- 
mencer en  introduisant  dans  chaque  récipient  un  peu  de  culture 
virulente  et  le  transporter  dans  des  étuves  chauffées  à 36®  où  il 
doit  séjourner  pendant  24  heures  ou  davantage  pour  que  la  cul- 
ture puisse  se  déveloj)per  convenablement. 


49  — 


Quand  la  culture  est  bien  développée  et  seulement  alors,  parce 
que  le  virus  ne  poussera  plus  bien  sans  air,  on  peut  remplacer  le 
tampon  de  coton  par  un  bouchon  en  liège  stérilisé  et  pai’affiné  et 
le  récipient  rempli  de  culture  virulente  est  prêt  à être  expédié. 

A})rès  de  nondn'eux  essais  nous  avons  reconnu  que  le  récijjient 
qui  convient  le  mieux  pour  la  préparation  du  virus  en  grandes 
quantités  est  la  bouteille  en  verre  blanc  ou  très  légèrement  teinté, 
d’une  contenance  d’un  litre  au  maximum.  C'est  le  seul  récipient 
(jui  soit  encore  assez  facile  à manier  et  qui  rende  possible  le  con- 
trèle  rapide  de  la  stérilité  du  bouillon  qui  doit  être  ensemencé  et 
ensuite  le  contrôle  de  la  richesse  de  la  culture  ; deux  conditions 
indispensables  de  l’efticacité  du  virtis.  11  suffit,  en  effet,  de  regar- 
der cba<pie  bouteille  à la  lumière  pour  apprécier  la  stérilité  du 
bouillon  à sa  transparence,  et  le  degré  du  développement  de  la 
culture  à son  trouble. 

Le  virus  peut  se  dévelop})er  et  donner  des  cultures  plus  ou 
moins  abondantes  dans  toutes  sortes  de  milieux  nutritifs  : infusion 
de  foin  ou  de  paille  à 10  et  15  grammes  par  litre,  de  pomme  de 
terre  ou  de  haricots  blancs  à 200  grammes  ])ar  litre,  bouillon  de 
viande  à 2o0  grammes  par  litre  d’eau,  additionné  de  1 à 12  (►  '0 
depeptone;  mais  c’est  au  bouillon  de  viande  ou  d’extrait  de  viande 
peptonisé  (]ue  l’on  doit  donner  la  jn’éférence,  parce  que  le  bouil- 
lon de  viande  donnera  les  meilleures  garanties  au  point  de  vue  de 
la  conservation  des  propriétés  vitales  des  microbes  et  de  leur  viru- 
lence et  que,  tout  compte  fait,  les  cultures  obtenues  avec  ce  bouil- 
lon ne  coûteront  pas  beaucoup  plus  cher  que  celles  obtenues  avec 
les  infusions  de  paille  ou  de  haricots.  ■ 

Quand  on  considère,  en  effet,  la  quantité  de  microbes  produits 
dans  un  temps  déterminé,  dans  un  volume  égal  de  chacun  de  ces 
bouillons,  on  constate  que  le  bouillon  de  viande  donne  à peu 
près  5 lois  autant  de  microbes  que  l’infusion  de  paille  et  2 fois 
autant  que  le  bouillon  de  haricots.  Or  il  faut  une  certaine  dose  de 
microbes  pour  donner  au  campagnol  une  maladie  mortelle  et  nous 
avons  constaté  que,  pour  obteidr  ce  résultat,  il  faut  employer  la 
culture  en  bouillon  de  paille  telle  quelle;  que  l’on  peut  diluer  de 
son  volume  d’eau  la  culture  en  l)ouillon  de  haricots  et  de  trois 
fois  sou  volume  d’eau  les  cultures  préparées  avec  du  bouillon  de 
viande. 

L’eau  peut  être  ajoutée  à la  culture,  sur])lace,  au  moment  de  la 
préparation  des  appâts  et  comme  il  faut  \ litres  de  liquide  pour 
Dany=z  4 


1 


— 50  — 


imprégner  une  quantité  de  grains  nécessaire  au  traitement  d’un 
liectare  envahi  par  les  campagnols,  il  faudrait  stériliser,  ensemen- 
cer, cultiver  et  expédier  pour  chaque  hectare  : 

1 litres  de  houillonde  paille, 

2 litres  de  bouillon  de  haricots  (plus  2 litres  d’eau  = 4 litres). 

I litre  de  bouillon  de  viande  (plus  3 litres  d’eau  = 4 litres). 

Pour  préparer  la  môme  quantité  de  microbes  il  faudrait  donc 

compter  4 fois  plus  de  frais  d’installation,  de  main-d’œuvre,  de 
bouteilles  et  d’expédition  pour  le  bouillon  do  paille  que  pour  le 
bouillon  de  viande  et  il  est  facile  de  calculer  que  dans  ce  cas  la 
diüerence  des  frais  de  fabrication  et  d’expédition  compensera  lar- 
gement la  dilférence  des  prix  de  la  paille  et  de  la  viande. 

II  n’est  pas  dit  qu’il  sera  impossible  de  trouver  avec  le  temps 
pour  le  virus  un  milieu  de  culture  moins  coûteux  et  présentant  les 
mêmes  avantages  au  point  de  vue  de  la  quantité  et  de  la  qualité 
de  microbes  produits,  mais  en  attendant  c’est  le  Imuillon  de 
viande  peptonisé  qui  nous  semble  le  meilleur  milieu  nutritif  pour 
la  culture  du  virus. 

En  résumé,  la  préparation  de  cultures  microbiennes  pour  la 
destruction  de  campagnols  nécessite  les  opérations  suivantes  : 

1°  Préparation  de  cultures  pures  et  virulentes  pour  l' ensemence- 
ment du  bouillon  en  bouteilles.  — La  virulence  de  chaque  culture 
doit  être  vérifiée  par  des  expériences  sur  des  animaux. 

2“  Préparation  du  bouillon  de  culture.  — On  mélange  dans  des 
chaudières  d'une  contenance  convenable  10  grammes  d extrait  de 
viande,  15  grammes  de  peptone,  5 grammes  de  sel  de  cuisine  et 
5 grammes  de  carbonate  de  chaux  ou  de  baryum  par  litre  d eau  on 
cbauüe  jusqu’à  éliullition  en  remuant  de  temps  en  temps  et  on  ajoute 
une  quantité  suffisante  de  lessive  de  soude  pour  que  le  liquide 
donne  une  teinte  légèrement  violacée  au  papier  de  tournesol  rouge. 

3°  Distribution  du  bouillon  dans  des  bouteilles.  — On  fait  cou- 
ler le  bouillon  chaud  à 70°  environ  dans  les  bouteilles  en  faisant 
remuer  constamment  le  contenu  de  la  chaudière  pour  <jue  la  dis- 
tribution du  carbonate  de  baryum  ou  de  cliaux  soit  a peu  près 
égale  dans  toutes  les  liouteilles.  Les  bouteilles  remplies  doivent 
être  boiicliées  avec  des  tampons  de  coton  et  recouvertes  de  capu- 
chons en  papier. 

4°  Stérilisation.  — Aussitôt  remplies  et  bouchées,  les  bouteilles 
encore  chaudes  doivent  être  portées  à l’autoclave  et  maintenues 
pendant  30  minutes  à 115-120°. 


— ol 


L'appareil  de  stérilisation  le  plus  commode  pour  la  stérilisa- 
tion des  l)outeilios  d'un  litre  est  rétuve  verticale  de  Vaillard  et 
Besson  pouvant  contenir  105  à 100  bouteilles. 

Toute  l’opération  île  la  stérilisation,  le  chargement  etledécliar- 
gement  de  l’autoc-lave,  la  montée  et  la  descente  de  la  température 
(<pii  doivent  êti'c  surveillées  et  réglées  avec  beaucoup  de  soin  pour 
éviter  Tébullition  du  liquide  dans  les  bouteilles),  et  le  chaullage  à 
115-)20‘’,  exige  à peu  près  2 heures  1/2.  En  travaillant  pendant 
10  heures  on  peut  donc  stériliser -iOO  litres  de  bouillon  par  auto- 
clave et  par  jour. 

50  Vérifiention  dp  la  stérililé  du  boniilon.  — Les  houteilles  sor- 
ties de  l'autoclave  doivent  être  portées  dans  une  chamhi’e-étuve 
chaullée  à 30-36“  et  y séjourner  pendant  2i  heures.  Toutes  les  bou- 
teilles qui  présenteraient  aloi'S  un  trouble  suspect  doivent  être 
éliminées. 

0®  Ensemmeemenf.  — Pour  oldenir  en  24  heures  des  cultures 
aussi  abondantes  (jue  possible  il  est  nécessaire  d’ensemencer  les 
houteilles  préalablement  chaufi’ées  à 30“  et  d’introduire  dans  cha- 
que bouteille  environ  1 cc.  de  culture. 

On  peut  vérifier  avec  une  exactitude  suffisante  la  pureté  de  la 
culture  à l’odorat.  Une  culture  fraîche  de  virus  ne  doit  pas  sentir 
mauvais,  elle  dégage  une  odeur  un  peu  fade  de  viande  fraîche, 
aussi  toute  bouteille  qui  sentirait  franchement  mauvais  doit  être 
éliminée.  Le  virus  conservé  pendant  plus  d’un  mois  dans  des 
bouteilles  hermétiquement  bouchées  dégage  une  odeur  un  peu 
plus  forte. 

7°  llouchage  di's  houteilips.  — Les  houteilles  ensemencées  ne 
doivent  être  bouchées  que  quelques  heures  avant  leur  expédition. 
Les  bouchons  de  liège  stérilisés  cà  l’autoclave  à 120“  dans  un  bain 
de  paraffine  nous  out  donné  les  meilleures  garanties  d’une  ferme- 
ture aseptique  et  hermétique. 

toutes  ces  opérations  doivent  être  exécutées  avec  la  propreté  la 
plus  minutieuse,  dans  des  h>caux  bien  clairs  <jue  l’on  doit  pouvoir 
tréquemment  laver  avec  des  antiseptiques  pour  empêcher  le  déve- 
loppement des  microbes,  de  la  putréfaction  et  des  spores  de  cham- 
pignons qui  poussent  rapidement  dans  chaque  goutte  de  bouillon 
répandu  sur  les  planchers  et  les  parois  ou  laissé  dans  les  usten- 
siles et  (pii  peuvent  se  répandie  ensuite  dans  l’air  et  polluer  les 
cultures  au  moment  où  1 ou  sera  obligé  d’ouvrir  les  bouteilles 
pour  les  ensemencer  et  les  boucher. 


— 52  — 


Cette  propreté  antiseptique  parfaite  est  d'autant  plus  nécessaire 
que  la  production  est  plus  considéralde,  de  sorte  que,  si  l’on  ne 
dispose  pas  de  locaux  convenahlcinent  aménagés  et  d'un  personnel 
suffisant,  habitué  à ce  genre  de  travail,  on  sera  à chaque  instant 
exposé  à des  accidents  qui  rendront  impossible  la  production  régu- 
lière de  bonnes  cultures,  et  les  résultats  que  l’on  obtiendra  seront 
très  irréguliers. 


Jnslructio)ïs  pour  l'emploi  du  virus. 

Pour  détruire  les  campagnols  il  faut  leur  donner  le  virus  à man- 
ger, il  est  donc  nécessaire  de  mélanger  les  microbes  virulents 
contenus  dans  du  bouillon  avec  des  appâts  appropriés  et  de 
répandre  ces  appâts  dans  les  champs  envahis  par  les  rongeurs. 

Nous  avons  vu  plus  haut  que  le  bac.  ti/plii  miiriwn  est  inoüensit 
pour  riiomme,  pour  les  animaux  domestiques  ainsi  que  pour  le 
gibier  et  les  petits  oiseaux  utiles  à l’agriculture  ; on  peut  donc 
manipuler  les  cultures  et  les  appâts  et  les  répandre  partout  sans 
aucun  danger. 

Toutefois,  il  serait  dangereux  de  manipuler  le  virus  et  les  appâts 
avec  des  mains  présentant  quelcjucs  plaies  ouvertes  ou  gerçures 
parce  que  le  bouillon  dans  lequel  en  cultive  le  virus  est  aussi  un 
excellent  milieu  de  culture  pour  toutes  sortes  de  microbes  qui 
peuvent  exister  sur  le  grain  cpii  servira  d’appâts  et  que  ces  micro- 
bes pourraient  pénétrer  dans  ces  plaies  et  causer  des  abcès  dou- 
loureux. 

Préparation  des  appâts.  — Le  virus  arrive  sur  place  en  Imuteil- 
les  d’environ  un  litre.  Celui  que  l’on  prépare  à l’Institut  Pasteur 
est  très  riclie  en  micro])es,  on  peut  donc  sans  inconvénient  le  diluer 
de  3 fois  son  volume  d’eau  salée  avant  de  le  mélanger  avec  le  grain 
qui  doit  servir  d’appât. 

Voici  la  meilleure  façon  de  procéder  : 

Dans  un  baquet  en  bois  ou  un  vase  quelconque  en  terre,  pourvu 
qu’il  soit  très  propre,  en  l)ois  ou  en  fer  l)lanc,  on  verse  autant  de 
fois  3 litres  d’eau  que  l’on  veut  utiliser  de  bouteilles  de  virus  et  on 
ajoute  à cette  eau  5 grammes  (une  petite  cuillère  à café)  de  sel  de 
cuisine  par  litre  d’eau. 

On  doit  attendre  que  tout  le  sel  soit  bien  dissous  et  alors  on  peut 
y verser  le  virus. 

Avec  cbacpie  l)outeille  de  culture  on  peut  donc  préparer  i litres 


— 53  — 


(le  lujuicle  virulent  (]uc  l’on  doit  Iden  remuer  avec  une  pelle  (piel- 
compie  et  que  l’on  peut  ensuite  verser  sur  le  grain  préparé 
d’avance. 

Le  meilleur  aj)pàt  pour  les  campagnols  est  de  l’avoine  fortement 
ajdatic,  écrasée  ou  concassée. 

Le  mélange  peut  être  fait  sur  un  plancher  quelconque  à la  con- 
dition (|u’ilnesoit  pas  imprégné  d’un  antiseptique  (eau  de  javelle, 
sulfate  de  cuivre).  Un  verse  le  liquide  virulent  sur  le  grain  mis 
en  tas  et  on  doit  remuer  le  tout  avec  des  pelles  de  façon  à ce  (|ue 
t(mt  le  grain  soit  bien  régulièrement  mouillé.  11  est  nécessaire  de 
retourner  le  grain  à plusieurs  reprises  pour  lui  laisser  le  temps  de 
bien  s’inqjrégner  du  liquide. 

Pour  4 litres  de  liejuideil  faut  prendre  8 kilos  d’avoine  concas- 
sée. Avec  1 bouteille  de  virus,  dilué  dans  3 litres  d’eau  salée 
et  mélangé  avec  H kilos  de  grain  concassé,  on  prépare  donc 
12  kilos  d’appAt  prêt  à être  répandu  sur  les  champs. 

Disirihidinn  des  oppdts  dans  les  champs.  — Quand  le  grain  est 
bien  imprégné  de  virus,  ce  qui  peut  demander  2 à 3 heures,  on 
jieutles  répandre  dans  les  champs. 

Pour  bien  faire  cette  opération  il  est  néces.sairc  de  tenir  compte 
de  l’intensité  de  l’invasion  dans  les  différentes  parcelles  que  l’on 
doit  traiter,  de  l’épmpie  de  l’année,  de  la  nature  des  récoltes  (jui 
se  trouvent  dans  les  champs  et  enfin  du  temps  (pi’il  fait  au  moment 
du  traitement. 

Ce  sont  là  toutes  choses  très  familières  aux  cultivateurs  qui  com- 
prennent tous  très  bien  (jue  les  façons  doivent  varier  avec  la  nature 
du  sol  et  des  récoltes  et  (jue  les  récoltes  seront  plus  ou  moins 
abondantes  suivant  les  conditions  dans  les(juelles  ils  ont  pu  les 
préparer. 

11  n’en  est  pas  autrement  du  virus,  {]ui  donnera  des  résultats 
])lus  ou  moins  satisfaisants  suivant  (ju’il  sera  distribué  d’une  façon 
plus  ou  moins  consciencieuse  et  avec  plus  ou  moins  de  discer- 
nement. 

Ln  ellet,  on  ne  peut  espérer  obtenir  une  destruction  rapide  et 
totale  que  si  la  grande  majorité  de  campagnols  absorbent  un  peu 
de  la  préparation  virulente,  il  faut  donc  avant  tout  doser  la  quan- 
tité de  virus  à répandre  suivant  l’intensité  de  l’invasion  dans  cba- 
(pic  champ.  Ensnitc  il  faut  tenir  compte  de  ce  fait  que  le  virus  est 
un  niicrobe  vivant  ({ue  l’on  ne  peut  pas  exposer  trop  longtemps 
sans  danger  au  soleil  et  aux  intempéries,  parce  que  le  S(dcil  pour- 


rait  (lessâcher  les  appâts  virulents  et  atténuer  ou  même  tuer  le 
microbe,  tandis  (pi’uue  pluie  forte  et  persistante  aurait  pour  effet 
de  laveries  appâts  et  d’eutraiuer  les  microl)es  dans  le  sol. 

Euliu,  il  est  nécessaii*e  aussi  de  tenir  compte  de  rabondance  et 
de  la  qualité  de  nourriture  que  les  campagnols  peuvent  trouver 
dans  les  cluimps  au  moment  du  traitement. 

Ainsi,  pendant  toute  la  durée  de  la  mauvaise  saison,  du  15  no- 
vembre au  15  mars,  à peu  près,  quand  il  n’y  a dans  les  champs 
que  des  blés  nouvellement  poussés  et  des  maigres  prairies,  quand 
le  soleil  ne  chaulle  jamais  trop  fort,  alors  si  l’on  dispose  d’une 
journée  sans  pluie,  on  peut  répandre  les  appâts  en  les  distribuant 
par  petites  poignées  sur  les  sentiers  tracés  par  les  campagnols  et 
au.x  abords  de  leurs  trous  ; tandis  que  dans  le  courant  de  la  belle 
saison  et,  en  général,  quand  il  y aura  suffisamment  d’herl)e  fratclie 
dans  les  ebamps,  il  sera  préférable  d’introduire  les  appâts  dans  les 
trous,  où  les  campagnols  les  trouveront  sans  avoir  besoin  de  les 
chercher  et  où  le  virus  sera,  en  même  temps,  à l’abri  du  soleil  et 
de  la  pluie. 

La  quantité  de  virus  à répandre  par  hectare.  — L’e.xpérience 
nous  a montré  que,  si  l’on  veut  traiter  en  totalité  l’ensemble  d’un 
territoire  envahi,  il  faut  compter,  en  moyenne,  une  bouteille  de 
viims,  soit  12  kilos  d’appât  par  hectare. 

Ce  n’est  là  bien  entendu  qu’une  moyenne  et  si,  au  lieu  de  traiter 
par  exemple  tout  le  territoire  d’une  commune,  les  propriétaires 
voulaient  se  borner  à préserver  certaines  cultures,  alors  il  fau- 
drait considérer  chaque  champ  en  particulier  et  évaluer  la  quan- 
tité de  virus  à employer  en  comptant  environ  2 ou  3 grammes  d’ap- 
pât par  trou  de  campagnol. 

Dans  ces  conditions,  certaines  régions  ou  certains  champs  pour- 
raient demander  deux  et  même  trois  ])outeilles  de  virus  par  hec- 
tare ; dans  d’autres,  au  contraire,  une  ])outeille  pourrait  suffire 
pour  2 ou  3 hectares. 

Constatations.  — Les  campagnols  ne  deviennent  malades  que  3 ou 
4 jours  après  avoir  absorbé  l’appât  virulent  et  ne  meurent  que  2 à 
3 jours  plus  tard. 

Il  arrive  parfois  que  quelques  rongeurs  plus  sensibles  ou  ((ui  ont 
absorlm  une  grande  quantité  de  virus  meurent  déjàdansles  48  heu- 
res, mais  d’une  manière  générale,  la  mortalité  ne  commence  à 
apparaitre  qne  5 jours  après  le  traitement. 

Il  arrivera  au.ssi  assez  souvent,  surtout  s’il  y a de  l’herbe  Irai- 


— Sa- 
che sur  les  champs,  que  tous  les  campag^uols  ue  mang-erout  pas 
le  grain  jn'éparé  le  jour  même  du  traitement  parce  qu’une  par- 
tie de  ce  grain  sera  ramassé  et  mis  en  réserve  dans  les  magasins. 
Dans  ce  cas,  ceux  qui  auront  échappé  à la  première  infection  pour- 
ront encore  devenir  malades  et  mourir  par  contagion.  Il  n’est 
pas  rare  de  trouver  au  lal)our  plusieurs  cadavres  de  campagnols 
réunis  dans  un  nid  et  parmi  ces  cadavres  quelques-uns  à moitié 
mangés.  Les  malades  ou  mourants  sont  donc  souvent  achevés  et 
dévorés  par  les  survivants  et  propagent  ainsi  la  maladie. 

La  propagation  de  l’épidémie  peut  donc  durer  une  dizaine  de 
joui's  et  le  résultat  délinitif  ne  peut  être  exactement  apj)récié  (|ue 
1.’’)  jours  après  le  traitement. 

Ou  peut  constater  le  résultat  obtenu  en  faisant  labourer  une  par- 
tie du  champ  traité.  Si  la  terre  arable  n’est  pas  très  [)rofonde  et  si 
l’on  peut  labourer  à Ih  à 20  centimètres,  on  découvrira  de  place 
en  place  des* nids  couteuant  des  cadavres  de  campagnols  en  plus 
ou  moins  grand  nombre,  mais  si  le  sol  est  plus  profond  et  assez 
meuble,  alors  les  nids  peuvent  se  trouver  à 80  et  même  .^0  centi- 
mètres de  profondeur  et  alors  le  labour  ne  permettra  pas  d’éva- 
luer la  proportion  des  campagnols  détniits. 

Dans  ce  cas,  ou  dans  tout  autre  cas  où  uii  labour  ne  serait  pas 
possible,  on  peut  apprécier  le  résultat  obtenu  en  faisant  boucher 
tous  les  trous  de  campagnols  et  eu  comptant  le  lendemain  les 
trous  nouvellement  ouverts. 

Ou  trouve  rarement  beaucou|)  de  canipagmols  morts  à la  sur- 
face du  sol,  d’abord  j)arce  (pie  les  malades  se  rassemblent  le  plus 
souvent  dans  leurs  nids  et  n’ont  plus  la  force  d’en  sortir  et  aussi 
parce  que  les  cadavres  de  campagnols  morts  à la  surface  sont 
ramassés  par  les  chiens,  les  chats  et  les  oiseaux  rapaces. 

l’réparation  rapide  du  virus  en  bidons  de  ÿ()  litres. 

Ainsi  que  nous  l’avons  vu  dans  le  cbap.  Il,  en  1912  l’invasion 
de  campagnols  .s’est  étendue  en  France  sur  plus  d’un  million 
d’hectares. 

Pour  traiter  cette  étendue  il  aurait  donc  fallu  un  million  de  litres 
de  virus,  et  comme  il  n’existait  pas  d’installation  toute  prête  pour 
stéi’iliser  une  telle  (piantité  de  bouillon  en  quelques  mois,  il  a été 
décidé,  sur  la  demaude  de  M.  Fugène  Houx,  directeur  des  sei*\’iccs 
.scientiliques du  Ministèrede  l’agriculture,  (Forgariiser  à laluUe  nue 


— 56 


ra])i’ication  de  virus  dans  les  départemeids  les  plus  éprouvés,  — en 
euipruutaut  aux  hôpitaux  ou  au  Service  de  sauté  juilitaire  les  appa- 
reils de  stérilisation  que  l’on  pourrait  trouver  sur  place. 

Voici  comment  ou  .a  pu  organiser  cette  préparation  après  quel- 
(]ues  études  préalables  : 

Pour  simplifier  autant  que  possible  toutes  les  opérations  que 
nous  avons  décrites  plus  liant,  on  a remplacé  les  bouteilles  par 
des  pots  de  fer  blanc  d'une  contenance  de  20  litres  dont  on  se 
sert  communément  pour  le  transport  du  lait. 

Dans  chaque  bidon  on  mettait  : 

17  litres  d’eau. 

2 kilogs  de  haricots  l)lancs. 

750  cc.  de  peptone  liquide. 

100  gr.  de  sel  de  cuisine. 

200  gr.  de  carbonate  de  baryum. 

Et  7 cc.  de  lessive  de  soude  à 30°  B. 

On  le  recouvrait  d’un  couvercle  garni  de  coton  et  on  faisait 
iiouillir  le  tout  pendant  quelques  minutes  sur  des  réchauds  à gaz. 

Ensuite  on  devait  recouvrir  l’Ouverture  des  pots,  par  dessus 
le  couvercle  garni  de  coton,  d’une  feuille  de  papier  assez  fort 
que  l’on  pouvait  fixer  avec  une  ficelle  et  on  les  portait  avec  le 
liquide  encore  ])ouillant  dans  une  étuve  à stérilisation  où  ils  étaient 
cbauüés  à 115-120°  pendant  30  minutes. 

Après  la  sortie  de  l’étuve  on  attendait  que  la  température  du 
bouillon  ainsi  préparé  soit  descendue  à 40-45°  et  alors  on  pouvait 
les  ensemencer  et  les  placer  ponr  24  heures  dans  une  pièce 
chauffée  à 25°  environ.  Le  liquide  conservait  assez  longtemps 
une  température  suffisante  pour  le  développement  de  la  culture. 
On  pouvait  alors  fermer  les  i)idons  avec  leurs  couvercles  et  les 
expédier. 

Les  semences  étaient  fournies  par  l’Institut  Pasteur  dans  des 
tul)cs  scellés  d’une  contenance  de  20  cc.  eiiviron.  On  versait  le 
contenu  d’un  tube  dans  chaque  bidon. 

En  suivant  minutieusement  ces  prescriptions  et  eu  prenant  soin 
de  ])ien  régler  l’étuve  à stérilisation  de  façon  à ol3tenir  une  tempé- 
rature d’au  moins  1 15°  à l’intérieur  des  l)idons,  ou  pouvait  obtenir 
des  cultures  pures  et  assez  riches  en  microbes.  Le  contenu  de  cha- 
que l)idoii  pouvait  être  dilué  de  sou  volume  d'eau  au  momeut  de 
la  préparation  des  appèts. 

Cluujue  bidon  pouvait  donc  fournir  40  litres  de  liquide,  soit 


une  quantité  suffisante  de  virus  pour  traiter,  en  moyenne,  K)  hec- 
tares. 

Bien  entendu,  le  virus  prépare  de  cette  façon  ne  pouvait  pas 
être  conservé  aussi  lon.eteinps  que  le  virus  eu  bouteilles,  parce 
qu'il  n'était  pas  possible  de  fermer  les  bidons  d’une  façon  absolu- 
ment aseptique,  et  il  fallait  remployer  avant  que  les  micro])cs  de 
l'air  n’aient  eu  le  temps  d’envabir  le  bouillon  et  de  s’y  dévelop- 
per, c'est-à-dire  au  plus  tard  48  heures  après  l'expédition. 

On  a pu  organiser  cette  préparation  du  virus  dans  1 1 départe- 
ments (Aiii,  Aube,  Côte  d’Or,  Doubs,  Jura,  Haute-Marne,  Haute- 
Saône,  Meuse,  Meurtbe-ct-Mosellc,  Saône-et-Loire  et  Vosges)  et  on 
en  a coidié  la  direction  à M.M.  Forgent,  Bazat,  Lesage,  1)''  Mandc- 
reau.  Berner,  Boussard,  l'Osson,  Marangc,  D''  Moreyet,  Bédaride, 
vétérinaires  départementaux.  Les  laboratoires  de  fortune  ont  pu 
ju'oduire  en  deux  mois  environ  270.000  litres  de  virus  et  ont  con- 
tribué dans  une  large  mesure  à diminuer  les  dégâts  causés  par  les 
campagnols. 

H est  intéressant  de  donner  ici  à titre  de  document  les  résultats 
obtenus  par  le  virus  préparé  de  cette  façon  par  M.  Berner,  vété- 
rinaire départemental  du  Jura. 

M.  Berner  a pu  préparer  4.000  bidons  de  20  litres,  soit  une 
quantité  de  .virus  suffisante  pour  traiter  40.000  bectares. 

H résulte  du  rapport  qu’il  vient  de  nous  adresser  et  que  nous 
reproduisons  ci-dessous,  que  cette  préparation  peut  donner  d'ex- 
cellents résultats  (piand  elle  est  bien  surveillée  et  quand  le  traite- 
ment est  bien  organisé. 

Dans  la  grande  majorité  des  communes  traitées  M.  Berner  a 
obtenu,  en  ellet,  la  destruction  presque  totale  des  campagaiols  et 
les  quelques  insuccès  signalés  sont  dus  uni([uement  àTinsuftisancc 
de  son  installation,  a une  mauvaise  exécution  du  traitement,  soit 
que  le  virus  n ait  pas  été  employé  en  temps  voulu,  ou  que  les  culti- 
vateurs se  soient  bornés  à traiter  quelques  parcelles  isolées,  entou- 
rées de  cbamps  envabis  et  non  traités. 

Voici  le  texte  du  Bapport  de  iM.  Berner  : 


LA  DISTRIBUTION  DES  APPATS 

A-T-ELLE  ÉTÉ  FAITE  ? 

LES  APPATS 
ont-ils  été  préparés 

DATE 



en  commun  pour 

B 1 

NOMS  DES  COMMUNES 

(lu  traitement 

ous  les  cultivateurs 

Par  équipe 

Par  les  culti^ 

de  la  municipalité 

sous  la  surveillance 
d’un  délépué 

individueltea 
sur  leurs  pra| 

de  la  municipalité 

respectiv» 



Âi’clon 

J 3-14  oclohi-e 

)) 

)) 

oui 

Vers-sur-Monlagne  . • 

fin  octobre 

non 

non 

oui 

Le  LaleL 

‘ I> 

)) 

» 

)) 

Le  Lanlerel 

13-14  octobre 

non 

non 

oui 

Chapais 

14-15  octobre 

oui 

— 

oui 

Montrond 

24-25  octobre 

non 

» 

oui 

Besain 

15-21-24  octobre 

oui 

oui  pour  les  coni- 

oui 

muiies  seule- 
ment. 

Picarreau 

15  octobre 

oui 

» 

oui 

Fay-en-Monlagne.  . . 

18  octobre 

non 

oui 

Fied 

17  octobre 

oui 

)> 

oui 

La  Doyc 

17  octobre 

oui 

— 

oui 

ChAleau-ChîlIon.  . . . 

19  octobre 

oui 

oui 

1 

Plasne. 

en  octobre 

non 

}} 

oui  '[ 

i 

Ben-elaine 

27-28  octobre 

oui 

)) 

oui 

Chausscnaiis 

22-23  octobre 

oui 

U 

oui 

Chainole 

du  22  au  29  oct. 

» 

)) 

oui 

La  Châtelaine 

3 novembre 

oui 

)) 

ouF 

Pont  St-Héi7 

22-23  octobre 

oui 

oui  pour  les  ter- 
rains commu- 

oui 

naux  seule- 
ment. 

A 

Fonleny 

29-30  octobre 

oui 

)) 

oui 

OUI 

Chilly-sui’-Salins  . . . 

27-28-29  octobre 

non 

» 

ValcmpouHcrcs . . . 

du  30  octobre  au 

non 

)) 

OUI 

7 novembre 
du  28  octobre  au 

oui 

» 

oui 

Lemiiy 

3 novembre 

OUI 

Ivoi-y 

29-30  octobre 

oui 

» 

— 59  - 

lOtTHANT 

surs  après 
ddu  virus 
Itrouvé 
•8  nids 
Uavres 

ipflKlU  ? 

A-T-ON  OBSERVÉ 
plus  de  cadavres 
de  esmpagnols  à ta 
surface  des  champs 
et  des  prés 
Irailés  8 à 10  jours 
après  l’emploi 
du  virus  ? 

QUELS  SONT  EN  GÉNÉRAL 

les  résultats  obtenus 
pour  l’emploi  du  virus 
et  pouveï-vous  indiquer 
approximativement 
la  proportion  de  mortalité 
des  camçaÿ^nols  résultant 
de  cette  application  ? 

0BSERVATI03(3 

non 

Peu  appréciable. 

Emploi  fait  8 jours  après  expé- 

- 

non 

id. 

dilion. 

|»0 

uji 

)) 

non 

75  0/0. 

iHir 

— 

Bons  résullals. 

— 

— 

Ne  peut  préciser 

mit 

non 

SO  0/0. 

— 

— 

.-Appréciable. 

Bmii 

non 

Très  appréciable. 

Imi 

oui 

.Ne  peut  préciser. 

mii 

oui 

Bons  résullals. 

mii 

oui 

Bons  résultats. 

nui 

oui 

Bons  résullals. 

nui 

oui 

•Appréciable. 

nui 

oui 

Bons  résullals. 

mii 

oui 

La  neige  a empêché  de 

— 

oui 

vérifier. 

Bons  résultats. 

o> 

» 

Ne  peut  préciser. 

<»> 

» 

id. 

— 

oui 

Bons  résullals. 

non 

•Mauvais  résultat. 

Emploi  fait  8 jours  et  plus  après 

oui 

"20  0,  0. 

expédition. 

! ““ 

— 

•Neige  sur  le  sol. 

t 


l.ES  APPATS 
ont-ils  été  préparés 
en  commun  pour 
tous  les  cultivalenrs 
sous  la  sui'veillaiice 
de  la  municipalité  ? 

LA  DISTRIBUTION  DES  APPAT8 
A-T-ELLE  ÉTÉ  FAITE  ? 1 

NOMS  DES  COMMUNES 

DA  1 E 

du  traitement 

A 

Par  équipe 
sous  la  surveillance 
d’un  riéléRué 
de  la  municipalité 

Par  les  cultiJ 
individuelle 
sur  leurs  proj 
respectin 

Champagne 

Geraise 

28  août, 
0-28  octobre 
29-30  oclohre 

oui 

oui 

» 

» 

î 

oui 

oui 

Clucy  

2-4-0  novembre 

oui 

i> 

oui 

Saizenay 

— 

non 

» 

oui 

Monligny-sur-l’Ain  . •. 

21  octobre 

oui 

)) 

oui 

Bonnefontaine  . . . . 

2 novembre 

oui 

» 

oui 

Annoire 

2 novembre 

non 

» 

oui 

Chemin 

1-2  3 novembre 

oui 

» 

oui 

Petit  Noir 

3-4-0-7  et  8 nov. 

oui 

)) 

oui 

Perrignv 

29  octobre 

oui 

)) 

oui  j 

Lons-le-Saulnier  . . . 

1 1 novembre 

non 

» 

oui  ) 

V i 1 1 e n e U V e-sous-Py- 
mont 

28-29  30  octobre 

oui 

» 

oui 

Courhouzon  

5 novembre 

oui 

» 

oui 

■Macornay 

8 novembre 

oui 

non 

oui 

Messia 

15-16-22  nov. 

oui 

oui 

)) 

Conrians 

8 9 10  novembre 

oui 

oui 

oui 

Chilly 

8-9  novembre 

oui 

oi.i 

— 

Gevingey 

14  15  novembre 

oui 

non 

oui 

Celancev 

14  novembre 

oui 

oui 

oui , 

Conrlamine 

13  novembre 

oui 

» 

oui 

Trenal 

14-15  novembre 

oui 

)) 

oui 

Mallerey 

26  novembre 

oui 

)) 

oui 

BonnancI 

26  novembre 

oui 

» 

oui 

Sie  Agnès 

12-13-14  nov. 

oui 

» 

oui 

— 61  - 

CJRANT 

rrs  après 
QU  virus 
wouvé 
i nids 
lavres 
E?nols  ? 

A-T-OX  OBSERVÉ 

plus  de  cadavres 
de  campagnols  à lu 
surruce  des  champs 
et  des  prés 
trailés  8 à 10  jou;s 
après  l’emploi 
do  virus  ? 

QUELS  SONT  EN  GÉNÉRAL 

les  résultats  obtenus 
pour  l'emploi  du  virus 
et  pouvez-vous  indiquer 
approximativement 
la  proportion  de  mortalité 
des  campagnols  résultant 
de  cette  application  ? 

OBSERVATIONS 

ü 

oui 

Bons  résultats. 

— 

Impossible  de  conslaler, 
la  neige  couvre  le  sol. 
id. 

— 

id. 

— 

Ne  peut  préciser. 

— 

id. 

oui 

90  0/0. 

non 

— 

peu 

On  ne  peut  indi(|uer. 

)> 

Bon  résu  liai. 

non 

Ne  peut  préciser. 

oui 

•oO  0/0. 

oui 

Bons  résultats. 

non 

oui 

Impossible  d’indiquer  le 
résultat. 

7ü  0/0. 

non 

Bons  résultats. 

non 

75  0/0. 

non 

Peu  appréciable. 

» 

id. 

oui 

Ne  peut  préciser. 

oui 

id. 

» 

Impossible  d’apprécier. 

1 

oui 

non 

Bons  résultats. 

62 


DATE  1 

du  traUemeot 

LES  APPATS 

LA  DISTRJIÏ-L’TION  DES  APPAT: 
A-T-ELLE  ÉTÉ  FAiTE  ? 

NOMS  DES  COMMUNES 

en  commun  pour 
lous  les  cultivateurs 
sous  la  surveillance 
(le  la  municipalité  ? 

A 

Par  équipe 
sons  la  sorreillance 
(l’un  délégué 
de  lu  municipalité 

B 

Par  le*  cuid 
indlTÎdaelM 
sur  leurs  pr«| 
respecüi' 

Vincelles 

15  novembre 

oui 

» 

oui 

Crusse 

25  novembre 

oui 

1) 

oui 

Vercia.  . 

1(5  novembre 

oui 

oui 

)) 

Orbagna 

29  novembre 

oui 

» 

oui 

Beau  fort 

18  novembre 

oui 

)) 

oui 

Sellières 

19-21-22-23  nov. 

Municipalité 

oui 

Fonlainebriil 

22  novembre 

oui 

)) 

oui 

Les  Bepôts 

25  novembre 

oui 

oui 

» 

Larnaud 

25  noveinbre 

oui 

» 

oui 

St-Germain-les-Arlay . 

25  novembre 

oui 

non 

oui 

Arlay 

5 et  6 novembre 

oui 

)) 

oui 

Uesnes 

21  novembre 

non 

)) 

oui 

A r bois 

28  novembre 

oui 

)) 

oui 

Chemin 

1-2-3  novembre 

oui 

non 

oui 

Tavaux  

12-13-14-15 
et  IG  novembre 

oui 

oui 

- i 

Molay 

18-22  novembre 

oui 

oui 

Monls-sous-Vaudrey  . 

9 au  17  novembre 

oui 

oui 

- 

A'audrey 

13-22-24-29  nov. 
el  4 décembre 

oui 

oui 

no  . 

Clioisey 

10  2I-23-2G  nov. 
et  10  décembre 

oui 

oui 

» 

Archelange 

en  décembre 

oui 

oui 

i 

Rainans 

id. 

oui 

oui 

X 

La  Barre 

14  novembre 

oui 

oui 

1 

lai  Lnye 

otii 

oui 

1 

^ievry 

15-1()-I7-2G  nov. 

oui 

oui 

' 

- 63  — 


)OÜRANT 
cors  après 
Ida  virus 
lirouvé 
‘B  nids 
Idavres 
kignols  ? 

A-T-ON  OBSERVÉ 
plus  de  cadavres 
de  campagnols  à la 
surface  des  champs 
et  des  prés 
traités  8 à 10  jours 
après  l’emploi 
du  virus  ? 

liri 

oui 

oui 

mi 

oui 

• O 

non 

mi 

oui 

mi 

oui 

iiii 

non 

mi 

oui 

1 labours 
Its. 

non 

— 

non 

» 

)»n 

très  peu 

— 

quelques-uns 

imi 

non 

11.1  i 

oui 

iui 

— 

ui 

— 

1 labours 
its. 

— 

nui 

oui 

pas  eu 
(jour. 

— 

lui 

oui 

ui 

non 

oui 

j.ui 

non 

QUELS  SONT  EN  GÉNÉRAU 

les  résultats  obtenus 
pour  l’emploi  du  virus 
et  pouvez-voos  indiquer 
approxiniali  veulent 
la  proportion  de  mortalité 
des  campagnols  résultant 
de  cette  application  ? 


8/10. 

On  ne  voit  presque  plus 
(le  campagnols. 
Késiiltals  très  bons. 

lAésnltats  presque  nuis. 

Impossible  à fixer. 

9;i  0/0. 

Bons  résultats. 

50  0/0. 

Bons  résultats. 

Bésnilat  difficile  à con- 
stater. 

Imiiossible  ü préciser.  On 
ne  voit  plusde  campag. 
•Médiocre. 

Bésultats  incertains. 

Peu  appréciables. 

Bons  résultats. 

Très  bons  résultats. 
•Appréciables. 

Bons  résultats. 

50  0/0. 

90  0/0.  On  ne  voit  pres- 
que plus  de  campagnols. 
Très  bous  résultats. 

Bons  résultats. 

Résultats  passables,  arrêts 
des  dégfUs. 

Résultats  satisfaisants. 


OnSEBVATJONS 


— 64 

— 

f 

NOMS  DES  COMMUNES 

DATE 

du  traitement 

LES  APPATS 

onl-ils  été  préparés 
en  commun  pour 
tous  les  cultivateurs 
sous  lu  surveillance 
de  la  municipalité  ? 

LA  DISTRIBUTION  DES  APPATfc 
A-T-ELLE  ÉTÉ  l-'AITE  ? 

A 

Par  équipe 
sous  la  surveillance 
d’un  délégué 
de  la  municipalité 

B 

Par  les  caltii 
individuelle 
sur  leurs  pr<i| 
respective 

Monlbarrej 

20  21-i2  nov. 

oui 

oui 

)) 

Villevieux 

15  décembre 

oui 

non 

oui 

Rulïej 

8 décembre 

oui 

» 

oui 

Bi'éry 

4 6-7-8 -9  déc. 

oui 

» 

oui 

Cosgcs 

13-14  décembre 

oui 

oui 

— 

Quinligny 

10  décembre 

oui 

non 

oui 

L'Etoilo 

oui 

» 

oui 

Plainoiseau 

13  décembre 

oui 

— 

oui 

Salins 

9 décembre 

oui 

oui 

non 

Poligny 

4-5  décembre 

oui 

— 

oui 

Grézon 

16  décembre 

non 

— 

oui 

Saint  LoUiain 

6-7  décembre 

oui 

» 

oui 

La  iMari'e 

)) 

)) 

)) 

» 

Digna 

oui 

)> 

oui 

Ornans  

2 aoiit, 

oui 

— 

oui 

2 et  9 décembre 

Passenans 

17  décembre 

oui 

— 

oui  j 

Villers  les-13ois  . . . 

— 

» 

» 

» i| 

An  mont 

13-14  décembre 

oui 

oui 

” 

Sainl-Lamain 

17-18  décembre 

oui 

oui 

Ij 

non  1 

Saint-Didier.  . 

19  décembre 

oui 

— 

oui  1 

Kolalicr 

16  décembre 

oui 

— 

oui  j 

Darbonnay  

18-19  novembre 

oui 

— 

oui| 

l’annessiôrcs 

1*!''  décembre 

oui 

— 

omï 

Monlain 

23  décembre 

oui 

— 

ouijl 

— 65  - 

Tarant 
Inrs  après 
ftiu  virus 
IrroQ  ve 
M nids 
lavres 
ÿgnols  ? 

A-T-ON  OnSERVÉ 
plus  (le  cudiivres 
(le  campnpnols  a la 
surface  des  champ.- 
et  (les  pr(is 
traités  8 à 10  jours 
après  l'emploi 
du  virus  ? 

QUEI.S  SONT  EN  GÉNÉRAL 
les  résultats  olUeous 
pour  l'emploi  du  virus 
et  pouvez-vous  indiquer 
; approximativement 
la  proportion  de  mortalité 
des  campapnols  résultant 
de  cetle  application  ? 

OlîSERVATIONS 

lin 

Uabour) 

il 

oui 

oui 

Bons  résultats. 

Bons  résultats,  80  0/0. 

oui 

50  0/0. 

na 

l.laliour) 

1) 

non 

Bésultat  négatif. 

• 

lii 

oui 

50  0/0. 

— 

Bésultats  incertains. 

•• 

— 

Bésultats  satisfaisants. 

■üabour 

non 

Douteux. 

H 

non 

Résultats  excellents. 

— 

Résultats  presque  nuis. 

ü 

1) 

non 

Impossible  d’apprécier  les 
résultats. 

Les  résultats  ne  peuvent 
être  appréciés. 
Résultats  médiocres. 

N’a  pas  traité  en  raison  de  la 
neige. 

» 

Les  résultats  ne  peuvent 
être  appréciés. 

1 i 

— 

Résultats  passables. 

aabour 

— 

Impossible  d’apprécier. 

i 

oui 

00  0/0  de  mortalité. 

i Labour 

î • • 

néant 

Les  résultats  n'ont  jm  être 
constatés. 

2/5  de  mortalité. 

! 

oui 

Résultats  satisfaisants. 

i : • 

— 

Résultats  de  peu  de  consé- 
quence bien  que  réels. 

Danysz 

î) 

66 


! 


LES  APPATS 

ont-ils  été  préparés 
en  commun  pour 
tous  les  cultivateur.-; 
sous  la  surveillance 
de  la  raunicipaliré  ‘î 

^ 

LA  DISTRIBUTION  DES  APPATS 
A-T*ELLE  ÉTÉ  FAITE  ? 

NOMS  DES  COMMUNES 

du  traitemenl 

A 

Par  équipe 
sous  la  surveillance 
d’un  délégué 
de  la  municipalité 

B 

Parles  cnltivaii 
individuellell 
sur  leurs  propi 
respectives 

Monlry 

20  au  28  déc. 

oui 

oui 



non 

Toulouse 

19-21  décembre 

oui 

oui 

non 

Villers-Farla}’ 

23-24  décembre 

oui 

oui 

non 

Lombard 

21-22-23  déc. 

oui 

non 

oui 

iMonay 

24  décembre 

oui 

non 

oui 

Pagnoz 

en  oct.  et  déc. 

— 

oui 

oui 

Mouchard  

24-20  décembre 

— 

oui 

oui  1 

Yillerserine 

26-27  décembre 

oui 

— 

T 

oui  i 

Grange-de-Yaivre . . . 

27-28  décembre 

oui 

— 

oui.  f 

f 

Bausne  

20  décembre 

non 

oui 

non 

Ecleux 

24  décembre 

oui 

oui 

non 

Frontcnay 

24  décembre 

oui 

non 

oui 

Champagne ...... 

28  décembre 

oui 

non 

oui  'i 

Lavigny 

)} 

» 

» 

>» 

Cerlémery 

)) 

oui 

oui 

» 

Cliarnblay 

2 janvier  1913 

non 

— 

oui 

Domblans 

du  29  décembre 

oui 

oui 

— I 

Le  Yernois 

au  2 janv.  1913 
28  décembre 

non 

non 

oui  II 

Yoileur 

23  au  2.J  déc. 

oui 

oui 

* r 

Comice  de  Sl-Ajnour  . 

)J 

oui 

oui 

^ 1 

Sainl-Julien 

» 

non 

non 

)>  1 

1 


— 61  - 

:îBAr*T 
■s 8 après 
Il  vtnis 
rcouvé 
nids 
T»res 
xnols  ? 

A-T-ON  OBSERVÉ 
plds  dv  cadavres 
de  t^nmpiignnls  à.  bl. 
surface  des  champs 
et  des  prés 
traités.  & ài  10  jours 
après  li'emploL 
du  virus  ? 

QUELS  SONT  E.N  GÉNÉRAL 
les  résultats^  ohlenus 
pour  Ifemptor  du  virus 
et  pouvez -vous,  indiquer 
up  proxi  mal  i veinent 
ia  pruportion.  de‘  morlulit'è' 
des  cumpn^nolfl  résultant 
de  celie  application  ? 

OaSBHVA*TJOr(S 

ikboiir 

oui 

Hésultals  cencluanls. 

il.  coup 

oui 

Les  résu  liais  pourront  être 
constatés  ullêrieure- 
incnt  quand  les  Bîtbours 
seront  efleclués. 

80  0/ü. 

oui 

3i/-i. 

ihboiir 

1 

«Ibnur 

non 

oui 

Hésullîits  peu  apprécia- 
bles. 

Impossible  de  constater 
les  résultats, 
id. 

• 

— 

id. 

t 

quebiues  cada- 
vres sont  re- 
marqués, 
non 

id. 

Faible  mortalité. 

1 ccoup 

— 

Bons  résultats,  90  0/0. 

hboiir 

oui 

TrailcmenI  efficace. 

— 

W 0/0. 

)> 

Très  bons  elfets. 

• 

Il  bour 

» 

a -uns 
1 ‘bour 

oui 

Bésultals  médiocres. 
Bons  résiiUals. 

On  ne  peut  indiquer  une  pro- 
portion;. 

■ - 

— 

Résrrffafs  rneerfains. 

■ ..... 

l<  bour 

' 

yy 

» 

Résultats  diffictlemienil 
appréciables,  les  champs 
n’ajuni  pu  être  labon 
rés  à cause  du  mauvais 
temps. 

Excellents. 

ii  ' 

)» 

Contrarié  par  les  pluies, 
retard  ; on  ne  peut  se 
prononcer. 

•- 

68 


LES  APPATS 

ooUils  été  préparés 

LA  DISTBIBUTION  DES  APPA 
’ A-T-ELLE  ÉTÉ  FAITE  ? 

NOMS  DES  COMMUNES 

du  traitement 

en  commun  pour 
tous  les  cultivateurs 
sous  la  surveillance 
de  la  municipalité  ? 

A 

Par  équipe 
sous  la  surveillance 
d’un  délégué 
de  la  municipalité 

B 

Par  les  cuit 
individuell 
sur  leurs  prt 
respecU 

Monligny-les-Ai’sui'es . 

» 

oui 

oui 

)> 

Malhenay 

» 

oui 

oui 

)) 

Brainans 

» 

oui 

)) 

» 

Sl-Cyr 

)) 

D 

)) 

» 

Tourmont . 

*> 

oui 

non 

oui 

Biefmorin 

9 janvier 

oui 

oui 

» 

Molamboz 

3 et  4 janvier 

oui 

oui 

» 

Gray  et  Charmey . . . 

» 

oui 

oui 

» 

Bruvilly 

)) 

oui 

oui 

Loisia 

1) 

oui 

oui 

)) 

Auger 

» 

oui 

non 

D 

Loulle 

25-27  janvier 

non 

non 

)' 

Les  Arsures 

)) 

oui 

non 

» 

Oussières 

15  janvier 

oui 

non 

V 

Les  Bouchoux 

» 

oui 

oui 

i 

M.  Berner  a donc  pu  produire  du  virus  pour  131  communes  et  il 
a été  constaté  que,  sur  les  83  communes  qui  ont  pu  vérifier  les 
résultats  obtenus,  63  accusent  des  résultats  satisfaisants  et  20  des 
résultats  insuffisants.  On  peut  admettre  la  môme  proportion  de 


k 


(39  — 


rORANT 
nra  après 
J virus, 
Trouvé 
nids 
livres 
ignols  ? 


aal)Our 


•laljour 


labour 


liinhour 

luboiir 

]■ 

|:i3boiir 


a-t-on  odsehvé 
pics  lie  cadavres 
de  campagnols  à la 
surface  des  champs 
et  des  prés 
trailés  8 à 10  jours 
après  l’emploi 
du  virus  ? 

QUEI.S  SONT  EN  GÉNÉKAE 
les  résultats  obtenus 
pour  l’emploi  do  virus 
et  pouvez-vous  indiquer 
approximativement 
la  proportion  de  mortalité 
des  campagnols  résultant 
de  cette  application  ? 

OBSERVATIONS 

» 

On  ne  voit  plus  de  cani- 

pagnols  depuis  le  Irai- 

icmenl. 

» 

Très  satisl'aisanLs,  93  0/0. 

)) 

Satisfaisants. 

)) 

)) 

2 traitements  : celui  de 
l’Institut,  bons  résul- 
tats : pas  de  résullals 
apparents  pour  celui  du 
département. 

N ’a  P as  do  n n é 1 es  résu  1 1 a t s 
attendus. 

)) 

» 

On  en  voit  moins  ; diffi- 
cile il  apprécier. 

Traitement  fait  i jours  après 
expédition» 

oui 

13  0/0. 

oui 

.Mortalité  2;3. 

U 

Excellents  résultats. 

oui 

On  ne  peut  encore  se  pro- 
noncer. 

oui 

Impossible  de  rien  fixer. 

oui 

1/-4  mortalité  parce  que 
beaucoup  de  propriétai- 
res n’ont  pas  traité. 

)) 

Il  n’a  produit  aucun  effet 
dans  les  maisons  où  il 
a été  mis  en  grande 
quantité. 

oui 

On  ne  peut  se  prononcer. 

succès,  soit  70  0/0  dans  les  44,  communes  qui  n’ont  pas  pu  faire  de 
vérifications  suffisantes.  Une  seule  commune  annonce  des  résultats 
nuis. 


70  — 


Résultats  obtenus  par  le  traitement  au  virus. 

L’emploi  du  bac.  Itjphi  niurium  à la  destruction  de  camjjagnols 
s'est  généralise  en  F rance  surtout  depuis  le  commencement  de  l’an- 
née 1004. 

A cette  époque  l’attention  du  Ministère  de  l’Agriculture  avait  été 
attirée  sur  cette  question  par  une  invasion  qui  s’étendait  sur  près 
de  50.000  hectares  autour  d’Aigre,  en  Charente  et  le  Ministre  a 
décidé  de  procéder  à une  expérience  publique  qui  devait  permet- 
tre de  juger  si  les  cultures  de  ce  microbe  pouvaient  être  employées 
avec  succès  pour  combattre  cette  invasion. 

Voici  dans  quelles  conditions  cette  expérience  avait  été  faite,  et 
quels  résultats  elle  a donnés. 

Lettre  du  Directeur  de  l’Institut  Pasteur 
au  Ministre  de  l’agriculture. 

« Monsieur  le  Ministre, 

« Vous  avez  bien  voulu  me  demander  si  l’Institut  Pasteur  était 
â même  de  détruire  les  campagnols  qui  ravagent  actuellement 
certains  de  nos  départements,  en  leur  communiquant  une  mala- 
die infectieuse. 

« Je  vous  ai  répondu  que  l’Institut  Pasteur  préparait  des  cultu- 
res d’un  microbe  (1)  capable  de  tuer  les  campagnols  qui  l’ingèrent 
que  les  expériences  an  laboratoire  avaient  constamment  réussi, 
mais  qu’il  nous  était  difficile  d’affirmer  qu’il  en  serait  ainsi  en 
pleins  champs,  et  que,  pour  se  rendre  compte  de  ce  que  le  pro- 
cédé pourrait  donner  dans  la  pratique,  il  était  nécessaire  de  l’es- 
sayer sur  une  grande  étendue  de  terrain.  J’ajoutai  que  l’expé- 
rience devait  être  conduite  sous  la  surveillance  du  Ministère  de 
l’Agriculture,  sur  un  territoire  choisi  par  lui.  et  que  l’Institut  Pas- 
teur fournirait  les  quantités  de  virus  nécessaires  et  un  personnel 
compétent  pour  en  surveiller  la  manipulation. 

« Vous  avez  bien  voulu  entrer  dans  ces  vues,  et  vous  avez  dési- 
gné M.  de  Lapparent,  Inspecteur  Général  de  l’Agriculture,  pour 
tracer  le  programme  de  l’expérience,  d’accord  avec  l’Institut  Pas- 
teur. 


(1)  .1.  Danysz,  Maladies  contagieuses  des  animauæ  nuisibles.  Bergcr- 
Lcvraull,  t89.'i,  et  J.  Danysz,  Un  microbe  pathogène  pour  les  rats.  Annales 
de  l'Institut  Pasteur,  t!)01. 


— 74  — 


« Notre  collègue,  M.  Chamberlond,  chef  de  Service  à l’Institut 
Pasteur,  a l)ien  voulu  se  charger  de  la  direction  de  l’expérience. 

« J’ai  l'honneur  de  vous  transmettre  le  rapport  rédigé  par 
Chamberland. 

Extrait  du  rapport  de  M.  Ch.  Chamberland, 

Clief  (te  Service  ù rinslilul  Pasteur. 

« Le  terrain  choisi  par  M.  de  Lapparcnt  représentait  une  surface 
de  1.200  hectares  emiron,  s’étendait  sur  les  communes  d’Aigre, 
Oradour  et  Mous  (Charente).  Il  est  limité  vers  Oradour  par  un 
ruisseau  bordé  de  marais,  sur  une  longueur  de  5 kilomètres  envi- 
ron, et  sur  les  portions  d’Aigrc  et  de  Mons,  par  des  routes.  Ces 
limites  ne  constituent  pas  des  obstacles  suffisants  pour  s’opposer 
aux  migrations  des  campagnols,  mais  la  grande  étendue  du  ter- 
rain traité  permet  de  considérer  la  partie  périphérique  comme 
formant  une  zone  de  protection  pour  le  centre,  véritable  champ 
d'cxjîéricnce. 

« En  parcourant  ce  teri’ain,  on  constate  que  les  ravages  poi-tcnt 
sur  toutes  les  cultures  : Céréales,  prairies  naturelles  ou  artificiel- 
les, luzerne,  sainfoin,  jachères,  vignes  (surtout  pour  les  petites 
parcelles  isolées  au  milieu  des  champs),  topinamhour,  bf>is,  etc., 
mais  leur  importance  est  variable.  Les  campagnols  se  sont  atta- 
qués d’abord  aux  racines  et  aux  graines  ; les  semailles  d’automne 
ont  été  entièrement  détruites  ; les  luzernes  et  prairies  naturelles, 
richesses  de  cette  région  laitière  et  heurrière,  sont  totalement 
dévastées.  On  remanjue  partout,  surtout  dans  les  prairies  et  les 
jachères,  de  nombreux  trous  d’où  partent  de  petits  sentiers  très 
frayés  (pii  constituent  les  chemins  pareourus  par  les  campagnols 
lorsqu’ils  sortent  de  terre. 

<(  i.’expéricnce  a commencé  le  27  jativicr  1904.  Le  virus  était  pré- 
paré à l’Institut  Pasteur  dans  le  Laboratoire  de  M.  Danysz.  Le 
milieu  de  cidturc  est  un  houillon  de  viande  rendu  neutre  et  pep- 
toné  a 1 0 0.  Les  bouteilles  de  l)ouillon  sont  ensemencées  parle 
virus,  et  laissées  à l’étuve  pendant  12  à 15  heures.  Puis  les  bou- 
teilles sont  bouchées  et  expédiées  en  grande  vitesse  sur  le  lieu  de 
1 expérience.  Elles  sont  utilisées  dès  le  lendemain  ou  le  surlende- 
main au  plus  tard,  de  sorte  que  tout  le  virus  a été  employé  à l’état 
frais. 


n — 


Résuhats  constatés  à cc  jour. 

« 1°  Expériences  de  laboratoire . — A chaque  expédition  de  virus 
on  faisait  un  petit  prélèvement  de  virus  qui  était  donné  à manger 
sur  du  pain  à trois  souris  ijlanches.  Toutes  ces  souris  ont  succombé 
après  trois  à six  jours,  sauf  une  seule  qui  a résisté.  L’autopsie  et 
la  culture  ont  montré  qu’elles  avaient  succomljé  au  virus. 

« 2°  Constatations  sur  les  champs  traités.  — Les  premières  cons- 
tatations ont  été  faites  le  7 février,  dans  les  champs  traités  en  pre- 
mier lieu,  soit  12  jours  après  le  traitement.  A ce  moment,  on 
remarque  que  l’aspect  extérieur  des  champs  est  très  différent  de 
ce  qu'il  était  ; les  petits  chemins  frayés  et  parcourus  par  les  cam- 
pagnols paraissent  abandonnés  ; l’iierhe  commence  à y repousser, 
et  très  fréquemment  on  observe  que  les  trous  sont  voilés  à leur  ori- 
fice par  une  toile  d’araignée,  ce  qui  donne  l’impression  que  les 
campagnols  sont  morts,  ou  du  moins  ont  abandonné  ces  parages. 

« Ce  jour,  7 février,  on  défait  une  vieille  meule  de  foin  datant  de 
deux  ou  trois  ans  placée  au  milieu  des  champs  et  dans  laquelle  on 
remarque  de  uomlireux  trous  de  campagnols.  Du  pain  et  de 
l’avoine  contaminés  avaient  été  répandus  autour  de  la  meule.  On 
trouva  48  campagnols  dont  47  morts  récemment,  et  un  seul  vivant. 
L’autopsie  et  la  culture  de  6 campagnols  pris  au  hasard  montrè- 
rent que  les  animaux  avaient  succombé  au  virus. 

« Le  8 février,  on  défait  une  autre  meule  de  paille  d’avoine 
située  sur  Ouradour  et  traitée  avec  de  l'avoine  depuis  six  Jours 
seulement . Cette  meule  est  récente  ; elle  date  de  la  fin  de  l’au- 
tomne dernier,  et  les  liottes  de  paille  dont  elle  est  formée  parais- 
sent fraîches.  On  y trouva  5 campagnols  vivants  et  pas  de  morts. 
Cette  meule,  peu  habitée  comme  on  le  voit,  était  placée  dans  le 
voisinage  des  habitations,  et  on  ne  remarquait  pas  dans  les  alen- 
tours, les  petits  chemins  frayés  ordinaires  des  campagnols.  Les 
ü campagnols  vivants,  ou  bien  ne  sortaient  pas  et  trouvaient  leur 


j)as  encore  eu  le  temps  de  produire  son  ellet.  Cette  seconde  hypo- 
thèse ne  peut  pas  être  admise.  En  etlet,  dans  un  champ  situé  a 
100  mètres  environ  de  la  meule,  traité  le  même  jour,  avec  de 
l’avoine  également,  on  trouva,  en  labourant  loO  mq.  environ, 
six  campagnols  dont  5 morts  et  l vivant.  Luis,  en  touillant  un  tas 
de  mauvaises  herbes  près  du  talus  de  la  route  voisine,  traitée  aussi 


pai*  de  Tavoine,  on  trouva  un  uid  de  9 cauipaguols  tous  morts  et 
pas  de  vivant. 

« Il  est  donc  à peu  près  certain  que  les  5 campagnols  trouvés 
vivants  dans  la  meule  n’élaient  pas  sortis  pour  manger  les  appâts. 

« Le  8 février  également,  dans  un  cham])  traité  avec  du  pain 
depuis  12  jours,  on  fait  quelques  raies  de  charrue  qui  amènent  la 
découverte  de  trois  nids  renfermant  respectivement  8,  i et  i cam- 
pagnols tous  morts. 

« Sur  un  l)ord  de  route  on  pioche  4 ou  5 mq.,  et  on  trouve 
3 campagnols  morts  dont  un  partiellement  dévoré. 

« En  piochant  dans  un  champ  isolé  au  milieu  des  vignes  (on  a 
été  obligé  de  piocher,  parce  (juc  la  charme  no  pouvait  fouiller 
assez  profondément  par  suite  des  i‘ochei‘s),  champ  traité  depuis 
neuf  jours  avec  de  l’avoine,  on  a découvert  trois  nids  renfei’inant 
12  canqiagnols  mords.  Dans  toutes  ces  foitillcs  on  n’a  pas  trouvé  un 
seul  campagnol  vivant. 

« Comparaison  avec  un  champ  lémoin  no7i  frai/é.  — Il  était 
rtécessaire,  pour  la  rigucitr  de  la  démonstration,  d’exanriner  ce 
qui  s'était  passé  sur  les  champs  voisitts  non  traités.  Otr  choisit  à 
cet  effet  un  champ  en  nature  de  jachère  situé  à environ  500  mètres 
de  la  route  fornrant  bordure  des  champs  traités.  On  laboura  envi- 
ron 170  nrq.  dans  lescpicls  on  trouva  23  cairrpagnols  vivairts,  sans 
un  seul  mort.  Ce  chillVc  correspond  à 1.350  campagnols  à l'hectare. 

« Expérience  sur  les  trous  des  cainpagnols.  — Sur  un  chanrp, 
entouré  de  vignes,  de  1 hectare  environ  on  conrpta,  dès  le  déhrrt, 
le  rromhre  des  trous.  Ce  norrrhre  fut  trouvé  de  12.484.  ()n  boucha 
tous  ces  troiui  en  foulant  le  sol  avec  le  talon.  Deux  jours  après  on 
compta  le  nomhiM'  des  ti’ous  réouverts  fraîchement.  Ce  nombre 
fut  de  1.304.  On  traita  alors  ce  champ  avec  de  l’avoine  imprégnée 
de  virus,  et  en  mettant  de  ])référence  les  [)incées  d’a[)pAts  près 
des  trous.  Huit  jours  après,  les  campagnols  devant  être  morts  en 
grande  proportion,  on  boucha  de  nouveau  les  trous.  Enfin  deux 
jours  plus  tard,  on  compta  les  trous  fraîchement  réouverts.  On 
n’en  trouva  plus  (jue  37.  Cette  diminution  dans  le  nombre  des 
trous  avant  et  après  le  traitement,  donne  une  idée  assez  approxi- 
mative de  la  diminution  des  campagnols  dans  les  cbanq)s. 

« Conclusion.  — En  résumé,  des  observations  que  nous  venons 
de  raj)porter,  il  résulte  que  10  à 12  jours  après  le  traitement,  les 
campagnols  sont  morts  sur  les  champs  traités,  dans  la  j)roportion 
de  95  0 0 environ.  Cn.  Chambkrland. 


w 11  n'est  pas  douteux  que  dans  cette  expérience,  l’épandage  du 
virus  sur  les  champs  n’ait  amené  la  destruction  presque  complète 
des  campagnols  qui  les  infestaient.  11  est  vrai  que  ces  rongeurs, 
ayant  dévoré  presque  tout  ce  qui  était  à leur  portée,  se  sont  jetés 
avidement  sur  les  appâts  contaminés  qui  leur  ont  été  otlérts. 
Dans  quelques  semaines,  il  sera  fort  intéressant  de  voir  si,  la 
végétation  ayant  repris  sur  le  territoire  traité,  celui-ci  est  envahi  à 
nouveau  par  des  campagnols  venus  du  voisinage.  M.  Metclmikoff, 
Chef  de  Service  à l'Institut  Pasteur,  se  rendra  dans  les  premiers 
jours  do  mars  dans  le  canton  d’Aigre  pour  faire  des  constatations 
à cet  égard,  et  je  m’empresserai  de  vous  communiquer  ses  obser- 
vations. 

« Les  résultats  seraient-ils  aussi  satisfaisants  dans  d'autres  con- 
ditions de  terrain  et  de  saison  ? On  ne  pourra  le  savoir  que  par 
des  expériences  variées  et  multipliées.  11  y a donc  un  grand  inté- 
rêt à les  poursuivre.  C’est  seulement  quand  elles  seront  réalisées, 
qu’il  sera  possible  d'apprécier  les  bénéfices  que  l’agriculiure  peut 
retirer  de  l’emploi  du  virus  contre  les  rongeurs. 

« Chaque  fois  qu’un  territoire  important  est  envahi  par  les  cam- 
pagnols, il  ne  faut  pas  compter  sur  les  efforts  des  particuliers, 
pour  venir  à bout  de  ces  rongeurs.  Les  uns  traitent  leurs  champs, 
les  voi.sins  ne  font  rien,  et  presque  toujours  le  virus  est  mal 
enqjloyé.  11  faut,  jjour  obtenir  un  résultat,  que  tout  le  terrain 
envahi,  soit  traité  en  peu  de  jours,  et  pour  cela  il  est  nécessaire 
que  tous  les  cultivateurs  agissent  ensemble.  11  nous  send^le  que 
ce  sera  le  rôle  des  professeurs  d’agriculture,  de  provoquer  1 union 
des  agriculteurs  et  de  diriger  la  campagne.  C’est  seulement  dans 
ces  conditions  que  la  lutte  peut  être  efficace.  M.  Prioton,  profes- 
seur départemental  d’agriculture,  a donné  en  Charente,  l'exemple 
qu'il  conviendra  de  suivre  à l’avenir. 

« Les  élèves  des  Ecoles  d’agriculture  sont  les  moniteurs  tout 
désignés,  pour  conduire  les  é<]uipes  sur  les  terres.  Nous  pensons 
que  daus  l’avenir,  il  ne  faudrait  pas  attendre  que  les  ravages 
.soient  aussi  étendus  pour  intervenir.  L’aitention  des  Professeurs 
<ragriculture  doit  être  attirée  sur  la  pullulation  des  rongeurs,  et 
aussitôt  qu’ils  auront  constaté  (pi’ils  se  multi])lient  dune  fa(:on 
anormale,  ils  provoqueront  les  mesures  nécessaires  à leur  des- 
truction avant  (pie  l’épidémie  locale  ne  devienne  un  véritable  fléau. 

« Veuillez  agréer,  Monsieur  le  Ministre,  1 hommage  de  mon 
respect.  Emile  Roux. 


N.-B.  « Malgré  le  grand  nombre  de  pci-sonnes  employées  à la 
manipulation  du  virus,  pendant  plus  de  huit  jours,  aucune  d elles 
ii’a  été  incommodée.  Les  volailles  et  les  animaux  domesticjues 
n’ont  pas  souüert  de  l’épandage  du  virus  en  grande  <piantité  dans 
les  champs  ». 

A la  suite  de  cette  démonstration  il  a été  traité  autour  d’ Ai- 
gre et  Üradour,  sous  la  direction  de  .M.  Prioton,  du  10  mars  au 
9 avril  de  la  même  année  (1904),  17  communes  comprenant  ensem- 
hle  18.980  hectares  et  on  a obtenu  sur  cette  vaste  étendue  les 
mêmes  résultats  (pi’à  Aigre. 

Ihîsuite,  pour  donner  satisfaction  à certaines  réclamations,  le 
ministre  de  l’agriculture  a ordonné  des  expériences  comparatives 
pour  la  destruction  de  campagnols  par  le  virus  et  par  la  strych- 
nine considéré,  à juste  titre,  comme  le  poison  le  plus  actif  que  1 on 
pouvait  préconiser  dans  ce  but. 

Voici  le  Cünq)te  rendu  de  ces  expériences  organisées  par 
M.  de  Lapparent,  inspecteur  général  <le  l’agriculture  et  présenté 
par  lui  au  ministre  le  22  janvier  190o. 

Expérience  de  Sai/U-Jniien  de  iEscap. 

« .Monsieur  le  Ministre, 

« Conformément  à vos  instructions,  j’ai  organisé,  dans  la  Cha- 
rente-Inférieure, des  expériences  comparatives  pour  la  destruction 
des  campagnols  par  le  virus  <le  l’Institut  1‘astcur  et  par  la  noix 
vomique.  , 

« J’ai  eu  (juel(|ue  peine  à trouver  deux  territoires  de  oO  hectares 
voisins  où  il  n’eiit  pas  été  fait  de  traitement  à la  noix  vomique  par 
les  proj)riétaires  sur  (piehjues  parcelles  isolées.  Obligé  de  renon- 
cer à en  découvrir  dans  l’arrondissement  de  la  Bochelle,  oîi  l’en- 
goiiment  pour  ce  traitement  est  général,  et  ayant  d’ailleurs  acejuis 
la  conviction  que  de  ce  côté,  ou  n’arriverait  pas  à modilier  l’opi- 
nion quel  que  fût  le  résultat  des  expériences  comparatives  ; j’ai  dû 
me  rabattre  sur  la  région  de  St-Jean  d’Angély,  bien  que  l’invasion 
y présente  une  moins  grande  intensité.  C’est  dans  la  commune 
de  St-Julien  de  l'Escap,  près  du  hameau  de  la  Grande  Elie  que 
deux  su})crficies  de  50  hectares,  séparées  par  une  distance  sufli- 
sante,  ont  été  délimitées,  ainsi  que  l’indique  le  plan  ci-joint.  Toutes 
les  dispositions  ayant  été  très  bien  prises  par  M.  Guyonnet,  profes- 


— 76 


sein*  spécial  à St-Jean  d’Aiigély,  il  s’est  occupé  dans  la  journée  du 
samedi  29  décembre,  en  compagnie  de  MM.  Dubourg,  Pivoton  et 
Lavaron,  professeurs  départementaux  et  de  M.  Perrier  de  la 
Batbie,  professeur  spécial,  de  faire  la  préparation  des  appâts  à la 
noix  vomique.  iM.  Dubourg  (jui  avait  procuré  ce  produit,  après  en 
avoir  fait  contrôler  la  teneur  en  strychnine  par  l’analyse,  a dirigé 
lui-même  cette  préparation.  Elle  a demandé  4 cbautfes  à 3 chau- 
dières contenant  en  moyenne  50  litres,  soit  en  totalité,  12  chauf- 
fes de  1 heure  1/2  chacune.  La  décoction  de  50  kilogs  de  noix 
vomique  a permis  de  préparer  500  kilogs  d’avoine  aplatie  Cette 
avoine  a été  répandue  à la  volée  dans  la  matinée  du  vendredi  30 
par  deux  équipes  de  25  personnes  sur  les  50  hectares  désignés, 
sous  la  direction  de  MM.  les  professeurs,  qui  recommandaient  de 
forcer  la  main  dans  les  parties  contaminées. 

« Pendant  cette  opération  on  procédait  à la  préparation  de 
600  kilogs  d’avoine  aplatie  au  moyen  de  72  l)outeilles  (de  75  c.)  de 
virus. 

« L’épandage  de  cette  avoine  a été  fait  dans  la  soirée  du  même 
jour,  sur  l’autre  territoire  de  50  hectares.  Je  dois  dire  que,  si  les 
quantités  répandues  moyennement  à l'hectare  ont  été  à peu  près 
équivalentes  à celles  employées  pour  la  noix  vomique  dans  toute 
la  partie  située  au  nord  du  chemin  de  la  Touzellerie,  elles  ont  été 
notal)lenient  supérieures  dans  la  parcelle  située  au  sud  de  ce  che- 
min. Le  jour  déclinant  ne  permettait  pas  la  surveillance  absolue 
des  distrihuteurs,  dont  plusieurs,  pour  avoir  plus  vite  fini,  for- 
çaient notablement  la  main.  Néanmoins,  l’étendue  où  il  y avait 
parité  (20  hectares  environ)  était  largement  suflisante  pour  que  les 
conclusions  à tirer  des  constatations  ultérieures  ne  puissent  être 
faussées. 


Constatations. 

Trai/emenl  au  virus. 

« 1°  Un  premier  labour  sur  une  surface  de  3 ares  au  lieu  dit  la 
Marquetterie  dans  un  jeune  sainfoin  appartenant  a M.  Jouliu, 
maire,  a mis  à découvert  6 nids  contenant  respectivement  8,  l -i,  6, 
8,  7,  2 morts,  soit  au  total  45  morts  et  l vivant. 

« 2"  Un  deuxième  lal)our  sur  une  surlace  de  1 are  au  lieu  dit  la 
Champagne  dans  un  terrain  rocailleux,  inculte  appartenant  a 


— / / — 


M.  Martin  a donné  : 1"’  nid  4 morts,  2"^  nid  1 mort,  au  total  o morts. 

« En  présence  de  ces  résultats  concluants  la  commission  n’a  pas 
cru  devoir  poursuivre  ses  investig-ations  sur  le  terrain  traité  au 
virus  Danysz. 

Traitement  à la  noix  vomique. 


« 1°  Sur  une  surface  de  3 ares,  occupée  par  un  jeune  sainfoin 


appartenant  à M.  llilairet  à la  Chagnie,  le  lalmur  a donné  le  résul- 
tat suivant  ; 

morta  vivants 

l®'’  nid 0 0 

2«  — 1 0 

— l 0 

4“  — 0 0 

Total  ...  T T 

« 2“  Champ  inculte  à la  Vallée  Moreau  surface  3 ares. 

morts  vivants 

1®*‘  nid ü 2 mulots 

2"  — . . . . 0 I — 

3“  — U 0 

3 mulots 


« 3>^  Labour.  Vieille  luzerne  à la  Vallée  Moreau,  3 ares.  Pro- 
priétaire Drahonnet. 

morts 

1 
0 
1 
2 
2 


1®''  nid 
2e  

3®  — 
4®  — 
3®  — 


Total 


vivants 

0 

0 

0 

0 

0 

ir 


« 4°  Labour.  Champ  inculte  à la  Vallée  Moreau,  1 are  5.  Pro- 
priétaire M.  Albert. 

vivants 


1®‘‘  nid 

2<‘  

3®  — 


Total. 


morts 

7 

0 

0 

T 


1 

0 

0 

T 


— 78  — 


« 5°  Labour.  Jeune  sainfoin  à la  Chagnie,  A ares.  Propriétaire 
M.  Martin. 

morts  vivants 


1®‘'  nid 

2e  

8“  — 
— 


<S«  — 
9“  — 


Total. 


4 

0 

2 

2 

0 

1 

1 

1 

1 

\2 


1 

0 

0 

2 

1 

0 


campagnol 


1 mulot 


0 

I 

b 


« Les  recherches  ont  été  faites  plus  nombreuses  dans  la  partie 
noix  vomique  parce  que  les  résultats  donnés  par  les  premiers. 
lal)ours  étaient  insuffisants  et  qu’il  était  difficile  par  suite  de  les 
comparer  avec  ceux  obtenus  par  le  virus. 

« La  noix  vomique  a donc  donné  21  campagnols  morts  sur  31 , soit 
une  destruction  de  70  0/0,  tandis  que  le  virus  a donné  4o  morts 
sur  46,  soit  une  destruction  de  98  0/0. 

Oiseaux. 

« Les  oiseaux  trouvés  morts  sur  le  territoire  traité  à la  noix 
vomique  dans  les  recherches  des  31  décembre  et  3 janvier  se 
dénombrent  de  la  façon  suivante  : 

« 6 pies,  10  alouettes,  20  verdiers,  2 corbeaux,  1 mésange, 

1 pinson,  soit  un  total  de  40  oiseaux  comptés. 

Observations  sur  le  terrain  non  traité. 

« Un  premier  labour  effectué  dans  une  chaume  sur  une  surface 
de  3 ares  à 100  mètres  de  la  portion  traitée  au  virus  a donné 
7 vivants  (campagnols).  Un  deuxième  lal)Our  pratiqué  dans  un 
jeune  sainfoin  on  partie  détruit  à 300  mètres  de  la  partie  empoi- 
sonnée à la  noix  vomique  sur  une  surface  de  3 ares  a mis  à décou- 
vert 2 campagnols  vivants. 

« Dans  ces  deux  observations  aucun  cadavre  de  campagnol  n a 
été  trouvé  ». 

Signé  ; De  1..\.1'i>.\.ue.\t. 


— 71)  — 


A titre  de  document,  il  nous  semble  intéressant  de  reproduire 
encore  ici  le  rapport  de  M.  Gillin,  professeur  départemental  d'agri- 
culture du  Puy-de-Déme  sur  les  résultats  obtenus  par  le  traite- 
ment au  virus  dans  13  communes  en  1909,  ainsi  ({ue  la  copie  d’un 
rapport  adressé  au  Ministre  île  l’agriculture  par  M.  Guerrapain, 
directeur  des  services  ag'ricoles  du  département  de  l’Aisne. 

Rapport  de  M.  Gillin. 


.NO.MS  DES  GOMMU.NES 

(dép.  (lu  Piij-cJe-üùine) 

NOMBRE 

de  bouteilles 
de  virus 
employées 

RÉSULTATS 

obtenus 
dans  les  prés 

RÉSULTATS 

obtenus 
dans  les  terres 
labourables 

liesse 

i-i-i 

Bons. 

Bons. 

Cliambon-sur-Lac.  . . 

•2H) 

Salisfaisanls. 

Salisfaisanls. 

Mazoires 

11 

Bons. 

Bons. 

.\jdat 

11 

Très  satisfaisants. 

Très  satisfaisants. 

La  Cliapelle-.Marcoiisse. 

312 

Très  lions. 

Très  bons. 

Coudes 

48 

On  n’a  pu  encore 
s’en  rendre  compte. 

Olloix 

9G 

Exeellenls. 

Excellents. 

Saulzet-le-Froid.  . . . 

144 

Desiniction  du  1 /3. 

Desiniction  du  1 /3. 

Aiirières 

288 

Assez  bons. 

Bons. 

La  Godivelle 

24 

Bons. 

id. 

La  Tour-d’.\uvergne 

44 

id. 

id. 

Tauves 

120 

id. 

id. 

Montpeyroux 

24 

id. 

id. 

Fait  à Clermont-Ferrand 
le  16  novembre  1909 


Rapport  de  M.  Guerrapain,  directeur  des  Services  agricoles  de  l’Aisne. 


Barenton-fJuf/mf.  — Quatre  caisses  de  virus  avaient  été  directement  com- 
mandées à 1 Institut  Pasteur  le  mercredi  30  octobre,  avant  la  réception  de 
la  circulaire  du  31  octobre,  portant  instructions  pour  les  commandes  de 
virus. 


) 


— 80  — 


Les  quatre  caisses  sont  arrivées  à Barenlon-Bugny  le  lundi  4 novembre 
dans  l'après-midi. 

Dès  le  lendemain  matin,  je  procédais  moi-mème  à la  préparation  des 
appâts  avec  du  personnel  mis  à ma  disposition  par  M.  le  Maire  de  Baren- 
ton-Bugny. 

Ces  appâts  se  composaient  de  250  kilos  d'avoine  aplatie  et  250  kilos  blé 
mélangés,  pour  45  bouteilles  de  virus  (les  2 caisses  ouvertes  ne  conte- 
naient, en  elfet,  ensemble  que  45  bouteilles). 

Le  tas  a été  laissé  en  repos  pendant  3 heures  et  à 2 beux’es  de  l’après- 
midi,  une  équipe,  composée  d’une  promotion  de  15  élèves-maîtres  de 
l’Ecole  normale  d’instituteurs,  que  j’avais  fait  venir  pour  une  application 
pratique,  et  40  femmes  et  enfants,  soit  55  personnes,  procédaient,  sous 
ma  direction,  h la  distribution  des  appâts. 

La  provision  en  avait  été  prévue  pour  un  premier  traitement  de  50  hec- 
tares environ  ; mais  comme  des  terres  récemmentremuées  pour  l’arrachage 
des  betteraves  et  le  semis  du  blé,  présentaient  moins  de  terriers,  une  éco- 
nomie d’appâts  s’est  trouvée  réalisée  et  on  a pu  couvrir  75  hectares  envi- 
ron d’un  seul  tenant. 

Les  appâts  ont  été  déposés  par  pincées  au  bord  des  terriers  et  sur  les 
passages  battus  des  rongeurs. 

L’épandage  a eu  lieu  dans  les  meilleures  conditions,  par  un  temps  bru- 
meux, avec  pluie  très  fine  ou  plutôt  un  fort  brouillard.  Il  n’a  pas  plu  dans 
les  quelques  journées  qui  ont  suivi. 

Il  fut  décidé,  en  raison  de  Turgence,  que  les  deux  autres  caisses  de  virus 
disponibles  ne  seraient  pas  employées  le  lendemain,  comme  prévu,  mais 
qu’elles  seraient  immédiatement  réexpédiées  à Leuze  où  des  dispositions 
avaient  été  prises  par  M.  Béranger,  professeur  d’agriculture,  pour  un  trai- 
tement le  jeudi  7 novembre,  sur  une  superficie  de  50  hectares. 

Les  résultats  obtenus  à Barenton-Bugny,  à la  suite  de  ce  premier  trai- 
tement, furent  très  satisfaisants.  Ils  sont  consignés  dansle  rapport  annexe 
de  M.  Béranger,  que  j’avais  chargé  d’un  second  traitement  sur  le  même 
territoire. 

Laon,  Ie20  janvier  1913. 

Le  Direcleiir  des  Services  agricoles  de  l'A  isiie, 
Signé:  A.  GuHiutAPAiN. 

Trailemenl  des  campagnols  par  le  virus. 

Dans  toutes  les  opérations  que  j’ai  dirigées,  l’avoine  aplatie  a servi  d’ap- 
pât après  avoir  été  imprégnée  de  virus  dans  des  bacs  ou  des  cuves  pour 
éviter  les  pertes  de  liquide. 

La  préparation  des  appâts  a toujours  été  faite  dans  la  matinée  avec  des 
précautions  minutieuses  (dosage,  pelletages,  obscurité)  et  je  les  ai  fait 


— 81 


répandre  dans  l’après-midi  par  le  personnel  mis  en  suffisance  à ma  dispo- 
sition. 

Partout  les  appâts  ont  été  semés  régulièrement  par  pincées  tous  les  deux 
ou  trois  pas,  par  l’équipe  marchant  de  front  entre  deux  lignes  de  jalons, 
chaque  opérateur  étant  distant  de  ses  voisins  d’environ  3 mètres. 

Cliaque  fois  que  cela  a été  possible,  j’ai  limité  l’opération  par  des  che- 
mins et  je  me  suis  appesanti  à faire  traiter  les  talus  etle[)ied  des  haies  de 
clôtures 

Sauf  à Leuze,  le  ciel  a toujours  été  couvert  et  brumeux. 

Leuze. 

TruilcmenI  du  7 novembre  avec  deux  caisses  virus  sur  les  quatre  caisses 
arrivées  à Barenton-Bugny  le  4 noveml)re.  Elles  furent  employées  les  7 et 
8 novembre  sur  environ  30  hectares  de  pâturages. 

Les  résultats  m’ont  été  communiqués  le  22  novembre.  La  proportion  des 
terriers  nouvellement  fréquentés  n’était  que  de  1/2  0 0 (un  sur  198  en 
20  mètres  de  superficie).  L’activité  du  virus  semble  donc  plus  durable  qu’on 
ne  l’annonce. 


Bureltea. 

» 

Traüenienl  du  1 3 Horrntre  avec  une  caisse.  Surface  traitée  23  hectares 
en  cultures  variées. 

Traitement  du  23  novembre  avec  deux  caisses.  Surface  traitée  30  hectares 
environ,  à la  suite  du  premier  traitement.  Le  même  jour  unevieille  luzer- 
nièrede  42  ares  est  défrichéedans  le  jiremier  centre  ; le  versoiramèneà  la 
surface  les  cadavres  de  campagnols  groupés  (3  à 10,  on  en  compte  un 
paquet  de  14)  la  charrue  n’en  déloge  plus  de  vivants. 

Monceau-sur-Oise. 

Traitement  du  27  Hom/iire  avec  deux  caisses.  33  hectares  environ  cultures 
variées.  L’invasion  est  plusgénérale  mais  moins  intense  que  dans  les  com- 
munes précédentes. 

•\  la  date  du  24  décembre,  M.  le  .Maire  m’avise  que  l'invasion  dans  les 
emblavures  est  manifestement  arrêtée. 


Lesgnielles-Sainl- G mnain . 


1 raitement  du.  28  novembre  avec  deux  caisses.  43  hectares  environ  cultu- 
res variées,  'frès  forte  invasion;  les  taupes  abondent  dans  les  terres  de 
labour  et  leurs  galeries  servent  de  couloirs  aux  campagnols. 

Danysz  0 


Trailemenl  du  18  décembre  avec  trois  caisses.  70  hectares  à la  suite. 

Le  27  décembre  je  constate  que  l’invasion  est  aussi  forte  dans  le  pre- 
mier centre,  en  bortlure  d’une  fondrière  boisée  qui  avait  été  négligée. 
Dans  la  partie  la  plus  éloignée,  100  terriers  sont  bouchés  d’une  poignée 
de  terre,  8 s’ouvrent  à nouveau.  Dans  la  partie  traitée  le  18  décembre,  je 
bouche  le  matin  du  même  jour  30  terriers  dans  un  herbage  et  50  autres 
dans  un  escourgeon  qui  avait  été  fort  malmené.  Aucun  ne  s’ouvre  dans  le 
pâturage,  8 sont  encore  fréquentés  dans  l’escourgeon  (IG  0/0). 

Saint-Michel  (Les  Watines). 

Traitement  du  11  décembre.  — Deux  caisses  sur  50  hectares  de  pâturages. 

Je  ne  compte  le  24  décembre  qu’un  seul  ouvert  sur  les  1 16  terriers  qui 
avaient  été  clos  la  veille  sur  20  mètres  carrés. 

Heaume. 

Traitement  du  12  décembre  avec  2 caisses.  45  hectares  environ  de  pâtu- 
rages disposés  en  cuvette.  A la  date  du  3 janvier  l’adjoint  faisant  fonc- 
tions de  maire  m’écrit  que  tous  les  terriers  de  la  partie  basse  sont  déser- 
tés, mais  que  ceux  des  parties  hautes  sont  encore  habités,  probablement 
par  réinvasion  car  la  partie  moyenne  est  également  purgée. 

Harenton-Buipiif. 

Trailements  des  19  et  20  décembre.  4 caisses.  2 ont  été  employées  sous  ma 
surveillance  : le  retard  dans  les  expéditions  ne  m’a  pas  permis  de  suivre 
l’emploi  des  deux  autres  le  lendemain. 

Pendant  l’imbibition  de  l’avoine,  je  me  suis  rendu  sur  les  lieux  traités  au 
début  de  novembre  parM.  Guerrapain,  directeur  des  Services  agricoles  de 
l’Aisne,  la  réinvasion  par  la  périphérie  était  choquante.  Le  traitement 
devant  être  fait  à coté  du  premier,  j’ai  fait  reprendre  une  bande  de 
50  mètres  sur  la  partie  déjà  traitée  en  novembre  par  M.  Guerrapain. 

Le  7 janvier  je  fais  clore  100  terriers  au  centre  premier  traitement, 
50  sur  la  partie  doublée  et  100  au  centre  du  second  traitement.  J’ai  eu 
resp'^ctivement  les  sorties  4,  2 et  5 soit  les  proportions  de  4 0 '0,  4 O'O 
et  5 0/0. 


. 1 uluois  sous-  fjoon  ( Pu isieu.'ié) . 

Traitement  du  21  décembre  avec  2 caisses.  45  hectares  environ  d embla- 
vures  sur  betteraves  sucrières. 

'Traitement  des  26,  27  et  28  décembre  avec  4 caisses,  dont  .1  employées 
sous  ma  surveillance.  Au  total  1 10  hectares  lu/.ernières  et  emblavures. 


83  — 


Le  dO  janvier  le  régisseur  le  mieux  à même  de  me  renseigner  (tors  des 
labours  de  semaille  il  faisait  suivre  chaque  brabant  d’un  gamin  auquel  il 
donnait  1/2  centime  par  campagnol  tué  à la  baguette)  m’annonce  que  les 
terriers  sont  ouverts  sur  luzernière  dans  la  proportion  d’un  peu  plus  de  I 0/0 
et  dans  les  emblavures  de  près  de  7 0/0.  Il  attribue  cet  insuccès  relatif  à 
la  re.ssource  qu’olTrent  les  collets  de  betterave  comme  nourriture  et  chemi- 
nement sous  terre. 

Cette  observation  confirme  celle  relevée  à Lesqiiielles  dans  l’escourgeou 
qui,  lui  aussi,  était  sur  betterave  à sucre. 

I.,aon,  le  20  janvier  1912. 

Le  Professeur  d' agriculture  de  Vervins, 
Signé  : Béranoer. 


Rapport  sur  les  mesures  prises  dans  l’arrondissement  de  Château- 
rhierry  (Aisne)  pour  combattre  les  campagnols. 

L’apparition  des  campagnols  dans  l’arrondissement  de  Château-Thierry, 
remonte  au  couro  de  l’été  de  la  précédente  campagne. 

L’invasion  qui  est  restée  limitée  à des  surfaces  assez  restreintes  sur 
quelques  points  du  territoire,  s’est  surtout  généralisée  sur  le  territoire  des 
communes  de  Beuvardes,  Epieds,  .Mont-Saint-Père,  Villeneuve-sur-Fère, 
en  contaminant  les  surfaces  suivantes  : * 

1'  Beuvardes 900  hectares 

2"  Epieds 450  — 

Sur  ces  450  hectares  sont  compris  200  hectares  formant  la  plus  grande 
partie  des  terres  de  la  ferme  de  la  Cense  à Dieu  commune  de  Mont-Saint- 
Père,  l’ensemble  de  ces  terres  en  deux  tenants,  étant  à cheval  sur  les  deux 
communes  d’Epieds  et  de  .Mont- Saint-Père,  soit  25  hectares  sur  Epieds  et 
175  hectares  sur  .Mont  Saint-Père. 

.3“  Villeneuve-sur-Fère  . . . .300  hectares. 


Enûn  les  traitements  pourraient  être  utilement  entrepris  en  continuant 
sur  le  territoire  de  la  commune  de  Fère-en-Tardenois,  limitrophe  de  la 
commune  de  Villeneuve-sur-Fère. 

Les  premièresconslata tiens  ont  été  faites  sur  la  commune  de  Beuvardes. 
ILes  premières  applications  de  virus  y ont  été  pratiquées  le  13  décembre 
seulement  par  suite  d’un  retard  apporté  dans  l’exjîédition  des  premières 
caisses  demandées.  La  prolongation  des  délais  de  livraison  demandée  par 
le  Laboratoire  des  virus  a quelque  peu  reculé  l'époque  de  la  deuxième 
aapplication. 

Les  deux  applications  ont  permis  d’utiliser  8 caisses  et  de  traiter  près  de 


— 8-4  — 


200  hectares  seulement  sur  les  900  hectares  qui  constituent  la  surface 
totale  contaminée. 

Sur  la  commune  d’Epieds,  constatations  faites  le  8 décembre  et  unique 
application,  le  26,  de  5 caisses  seulement,  sur  une  surface  de  120  hectares. 

Poui'  la  ferme  de  la  Cense  à Dieu,  commune  de  Mont-Saint-Père,  une 
seule  caisse  a été  utilisée  pour  traiter  25  hectares  de  cette  ferme  situés  sur 
la  commune  d’Epieds  et  faisant  suite  au  territoire  contaminé  de  cette  der- 
nière commune.  Enfin,  sur  la  commune  de  Villeneuve-sur-Fère.  aucun 
traitement  n’a  pu  être  effectué  jusqu’alors,  la  provision  de  virus,  mis  à 
notre  disposition  pour  l’arrondissement  étant  épuisée. 

En  ré'umé,  actuellement,  nous  avons  employé  14  caisses  sur  une  sur- 
face de  340  hectares  environ,  il  reste  à traiter  1.450  hectares  répartis  dans 
les  communes  énoncées,  savoir  ; 

700  hectares  sur  la  commune  de  Beuvardes,  330  hectares  sur  les  commu- 
nes d'Epieds  et  de  .Mont-Saint-Père,  300  hectares  sur  \a  commune  de  Ville- 
neuve-sur-Fère, et  120  hectares  sur  la  commune  de  Eère-en-Tardenois. 

Les  constatations  de  l’effet  produit  par  le  virus  sur  les  campagnols, 
n’ayant  pas  encore  été  faites  d’une  façon  suffisamment  complète,  le  détail 
des  résultats  obtenus  fera  l’objet  d’un  prochain  rapport  complémentaire 
qui  sera  envoyé  ultérieurement. 

Château-Thierry,  le  31  décembre  1912. 

Le  Professeur  d'af/riculture. 

Signé  : Hoc. 


Rapport  complémentaire  sur  les  résultats  obtenus  dans  1 application 
des  traitements  contre  les  campagnols  dans  l’arrondissement  de  Châ- 
teau-Thierry. 

Dans  un  précédent  rapport  je  signalais  l'importance  de  1 invasion  des 
campagnols  dans  l’arrondissement  de  Château-Thierry  qui,  actuellement, 
contamine  le  territoire  entier  d’une  commune,  celle  de  Beuvardes,  et  une 
grande  partie  de  celui  des  communes  limitrophes  : Epieds,  \illeneuve  sur- 
Fère,  Mont-Saint-Père,  Fère-en-Tardenois. 

Les  traitements  ont  été  pratiqués  sur  360  hectares  environ,  conformé- 
ment aux  instructions  du  Laboratoire  des  virus  de  l’Institut  Pasteur. 

Les  résultats  obtenus  sont  satisfaisants,  sauf  cependant  en  ce  qui  con- 
cerne la  ferme  de  la  Cense  à Dieu,  commune  de  Mont- Saint-Père,  où  la 
destruction  n’a  pas  été  aussi  radicale. 

Dans  toutes  les  autres  situations,  les  cadavres  des  campagnols  ont  été 
trouvés  nombreux  et  groupés  surtout  dans  les  parties  du  terrain,  les  plus 
élevées,  les  plus  saines  du  territoire  envahi  et  traité,  quelques  cadavres 
dans  les  galeries. 

Les  traitements  n’ont  pu  être  achevés  faute  du  virus  sultisant  et  il  reste 


— 8o  — 


encore  lAOO  hectares  susceptibles  de  recevoir  l’application  du  virus. 

Cette  application  se  fait  d’autant  plus  nécessaire,  que  les  intempéries 
sur  lesquelles  il  était  permis  de  compter  au  commencement  de  l'année,  ne 
sont  pas  venues  contribuer  à la  destruction  des  rongeurs. 

L’excès  d'humidité  dans  les  terrains  très  mouillants,  a,  en  quelques 
endroits,  chassé  les  campagnols.  Cependant  il  est  à craindre  que  si  les 
traitements  ne  sont  pas  continués  à bref  délai,  il  y aura  une  nouvelle  prise 
de  possession  du  territoire  expurgé  par  les  campagnols  des  parties  conta- 
minées qui  n’ont  pas  été  traitées,  et  cela  d’autant  plus  facilement  que  ces 
parties,  surtout  dans  la  communede  Heuvardes,  constituentun  seul  tenant. 

Dans  cette  région,  où  les  ravages  sont  très  accusés  sur  les  blés  d’au- 
tomne notamment,  il  y aurait  urgence  à continuer  les  traitements  com- 
mencés. Ces  traitements  pourraient  toujours  s’étendre  sur  700  « SOO  hecta- 
res au  moins. 

Les  cultivateurs  qui  avaient  commencé  les  traitements,  et  ceux  moins 
favorisés  qui  avaient  pris  toutes  leurs  dispositions  pour  traiter  et  qui  n’ont 
pu  recevoir  de  virus,  sont  dans  la  désolation.  Ils  ont  insisté  vivement  et  à 
plusieurs  reprises  pour  qu’il  soit  fait  droit  à leurs  demandes  et  assez  tôt 
pour  que  les  applications  puissent  être  faites  en  temps  utile,  c’est-à-dire 
dans  le  plus  bref  délai  possible. 

Château  ïbierry,  le  30  janvier  1013. 

Le  frofesseur  d'agriculture, 
Signé  : Hoc. 

Imi  résumant  toutes  les  donuées  que  nous  avons  pu  recueillir 
depuis  le  commeuceiueut  de  l’auiiée  1004  jusqu’à  la  fin  de  1912, 
nous  constatons  que  pendant  ces  9 années  on  a traité  au  virus  en 
France  près  de  000.000  hectares  envahis  par  les  campagnols  et 
d’après  les  constatations  faites  soit  par  les  professeurs  d’agricul- 
ture, soit  par  nous  môme  on  peut  évaluer  à 80  0/0  la  proportion 
de  résultats  satisfaisants  et  à 20  0/0  celle  des  résultats  incomplets. 

La  proportion  de  20  0/0  de  ces  insuccès  partiels  est  encoi’e 
beaucoup  trop  forte  pour  une  méthode  (jui  peut  et  devrait  tou- 
jours, sans  aucune  exception,  donner  des  résultats  excellents,  c’est- 
à-dire  une  destruction  pratiquement  complète  des  campagnols 
dans  les  champs  traités. 

Nous  en  avons  fait  venir,  pour  nos  expériences  de  laboratoire, 
des  milliers  de  toutes  les  contrées  oi’i  les  invasions  se  produisent 
plus  ou  moins  fréquemment  et  nous  n’en  avons  pas  trouvé  un  seul 
qui  ait  résisté  à l’ingestion  d’une  petite  quantité  de  culture  viru- 
lente. Nous  pouvons  donc  affirmer  avec  certitude  qu’il  n’y  a pas  en 
France  de  campagnols  réfractaires  au  virus  et  les  insuccès  ne  peu- 


— 86  — 


vent  être  dus  cju’à  des  accidents  ou  à nue  mauvaise  organisation 
du  traitement. 

l^irmi  les  accidents  il  faut  indiquer  les  fortes  pluies  qui  peuvent 
survenir  au  moment  de  la  distril)ution  des  appâts  et  les  détrem- 
per ou  les  mélanger  avec  la  terre,  les  Imndes  d’oiseaux  ou  les  trou- 
peaux de  moutons  qui  peuvent  enlever  une  bonne  partie  du  grain 
répandu  si  on  les  laisse  aller  sur  les  champs  traités  le  jour  même 
ou  le  lendemain  du  traitement.  11  est  évident  que  dans  tous  ces  cas 
la  quantité  de  produits  virulents  deviendra  insuffisante  pour  pro- 
voquer la  destruction  complète  des  campagnols. 

Parmi  les  causes  d'insuccès  qui  peuvent  provenir  d’une  mau- 
vaise organisation  du  traitement,  la  plus  fréquente  est  la  trop 
longue  conservation  des  appâts  préparés  qui,  mis  en  tas  ou  con- 
servés dans  des  sacs  ou  des  tonneaux,  peuvent  être  envahis  par  des 
cultures  d’autres  microbes  qui  affaibliront  ou  même  détruiront  le 
virus,  ou  encore  l'application  du  traitement  sur  de  petites  parcel- 
les isolées  et  entourées  de  champs  également  envahis  par  les  cam- 
pagnols. 

Dans  ce  dernier  cas  les  champ:^*  traités  sont  rapidement  envahis 
de  nouveau  et  il  devient  très  difficile  d’apprécier  les  résultats  que 
Je  traitement  a pu  donner.  Les  cultivateurs,  trompés  par  la  présence 
de  quelques  campagnols  vivants  sur  les  parcelles  traitées,  en  con- 
cluent trop  hâtivement  que  le  traitement  n’a  produit  aucun  effet. 

En  résumé,  les  résultats  obtenus  par  l’application  du  virus  sur 
(iüO.ÜOO  hectares  dans  les  conditions  les  plus  diverses  de  saison  et 
de  température,  dans  toutes  les  régions  de  la  France,  aussi  bien 
dans  les  plaines  du  Nord  que  sur  les  hauts  plateaux  de  la  Savoie 
et  du  centre,  nous  permettent  d’affirmer  que  le  virus  produira  tou- 
jours l’effet  désiré  quand  il  sera  préparé  par  un  personnel  com- 
pétent, et  qui  aura  à sa  disposition  une  installation  et  un  outillage 
convenables  et  (piand  tous  les  cultivateurs  intéressés  veilleront 
avec  soin  à la  bonne  préparation  et  distribution  des  appâts. 


- 1 


CHAPITHb]  Vil 


ORdAMSATlON  DK  LA  DKSTRUCTION  DKS  CAMl'AUNOLS 


Hien  (|u’il  soit  possible  d’atteiiulre  et  de  détniiec  les  campagnols 
<‘11  tonte  saison  etcpiel  que  soient  leur  nombre,  la  nature  et  la  quan- 
tité de  nourriture  que  ces  animaux  trouverimt  dans  les  cbani])s,  il 
n'en  est  pas  moins  évident  que  le  traitement  sera  d’autant  plus 
eflicace  que  les  campagnols  mettront  plus  d’empressement  à man- 
ger les  appAts  (ju’on  leur  aura  distribués  et  d’autant  plus  économi- 
<pie  ({lie  l’espace  à traiter  sera  plus  restreint. 

Ces  deux  conditions  se  trouvent  généralement  réalisées  pendant 
l’biver,  delà  lin  d’octobre  au  commencement  de  mars  et,  dans  cer- 
taines régions,  jusqu’à  la  fin  de  mars. 

C’est  donc  pendant  cette  époque  de  rannée  que  les  cultivateurs 
devraient  visiter  leurs  champs,  les  bords  des  routes  et  meme  (]uel- 
<pies  terrains  incultes  et  procéder  à la  destruction  des  campagnols 
partout  oii  ils  verraient  des  sentiers  et  des  trous  fréquentés. 

S’il  n’y  a pas  d’invasion  proprement  dite,  on  ne  trouvera  alors 
<[ue  quelques  nids  de  campagnols  sur  les  bords  des  routes  ou  des 
fossés  ou  dans  de  vieilles  prairies  artificielles  ou  naturelles  et  le 
traitement  de  ces  foyers  ne  demandera  ([u’une  bien  petite  dépense 
de  travail  et  d'argent. 

On  peut  affirmer  qu’une  commune  de  1 .000  ou  même  l.oOO  liec- 
tares  aurait  tout  au  plus  à faire,  dans  ce  cas,  la  dépense  de  24  l)ou- 
teilles  de  virus  et  de  200  à 250  kilos  d’avoine,  ce  qui  reviendrait  à 
peine  à 10  c.  par  hectare. 

Imi  répétant  cette  opération  chaque  année  pendant  3 ou  4 ans 
de  suite,  ou  tout  au  moins  chaque  fois  que  des  taches  à campagnols 
appréciables  seraient  signalées,  on  pourrait  avoir  la  certitude  de 
conjurer  a tout  jamais  les  apparitions  de  ces  grandes  invasions 


— 88  — 


qui,  lualgTé  remploi  de  moyens  les  plus  elTicaces,  causeront  tou- 
jours des  dommages  considérables. 

Cette  inspection  des  champs  en  hiver  et  le  traitement  préventif 
devraient  être  pratiqués  dans  toute  la  région  à campagnols  que 
nous  avons  indiquée  sur  la  carte  n°  10. 

Dans  certains  départements  plus  particulièrement  menacés  par- 
les invasions,  les  directeurs  des  services  agricoles  ont  conseillé  aux 
cultivateurs  de  créer  dans  chaque  commune  un  syndicat  de 'des- 
truction de  rongeurs. 

Voici  les  statuts  d’un  de  ces  syndicats  constitué  dans  la  com- 
mune à'Héricorirt  du  département  de  la  Haute-Saône. 

Syndicat  de  destruction  des  rongeurs.  Constitution  du  syndicat. 

« Article  1®*’.  — Il  est  formé  entre  les  propriétaires  et  cultivateurs  de  la 
commune  d’tléricourt  qui  adhéreront  aux  présents  statuts  un  syndicat  de 
lutte  contre  les  rongeurs,  conformément  à la  loi  du  21  mars  1884. 

Art.  2.  — Cette  association  prend  le  titre  de  « Syndicat  de  destruction 
des  rongeurs  de  la  commune  d'IIéricourt  ».  Son  siège  est  où  habite  le  pré- 
sident. Sa  durée  est  illimitée.  Elle  commencera  le  jour  du  dépôt  légal  des 
statuts. 

Art.  3.  — Le  syndicat  a pour  but  : 

I®  De  mettre  à profit  les  découvertes  provoquées  par  M.  le  Ministre  de 
l’Agriculture  pour  procéder  à la  destruction  des  rongeurs  (souris,  mulots, 
campagnols)  qui  dévastent  les  cultures. 

2o  D’organiser  méthodiquement  celte  destruction  en  procédant  ù des 
traitements  d’ensemble  sur  les  territoires  contaminés,  ces  traitements 
d’ensemlde  étant  les  seuls  qui  puissent  mettre  à l’abri  des  réinvasions 
ultérieures. 

3®  De  rassembler  tous  les  intéressés  pour  pratiquer  rapidement  et  dans 
les  meilleures  conditions  possibles  de  réussite  les  traitements  d’ensemble 
reconnus  efficaces. 

4®  De  faire  auprès  de  M.  le  .Ministre  de  l’Agriculture  les  démarches 
nécessaires  pour  obtenir  gratuitement  le  virus  indispensable. 

Adminislralion. 

.Vrt.  4.  — Le  Syndicat  est  administré  par  un  bureau  composé  de  3 mem- 
bres, élus  pour  deux  ans. 

Un  Président,  un  Vice-Président  et  un  Secrétaire. 

Ces  fonctions  ayant  un  caractère  de  dévouement  sont  absolument  gra- 
tuites. 


— 80  — 


\|.t.  5.  _ oès  que  les  dégills  notables  fui  sont  signalés,  le  Président, 
d’accord  avec  ses  collègues  du  bureau,  réunit  les  membres  du  syndicat 
afin  d'arrêter  les  mesures  à prendre  pour  enrayer  le  mal. 

Art.  G.  — Il  fait  auprès  de  l’Administration  les  démarcbes  nécessaires 
pour  l’exécution  de  ces  mesures  et  il  organise  les  traitements  d’ensemble 
avec  le  concours  gratuit  de  tous  les  intéressés. 

Art.  7.  — Pour  l’exécution  de  ces  traitements  d’ensemble,  les  membres 
du  syndicat  s’engagent  ; 

P' fournir,  dès  la  réception  du  virus,  des  quantités  d’appàts  (pain 
rassis,  blé  ou  avoine,  aplatis)  proportionnelles  à leurs  surfaces  cultivées. 

.V  prêter  un  concours  pratique  ou  pécuniaire  à la  surface  qu’ils  pos- 
sèdent dans  la  région  envahie  par  les  rongeurs  pour  rap|)lication  du  virus. 

3“  A se  conformer  à toutes  les  décisions  de  l’Assemblée  générale.  » 

Le  Présidetd  du  Si/ndicat, 
Peiidiuzet. 

Ou  ne  saurait  trop  encourager  la  formation  <le  telles  associa- 
tions, partout  où  les  invasions  des  campagnols  se  produisent  de 
temps  à antre.  Nous  l’avons  vu  dans  le  chap  II  et  cartes  X°  I à 10, 
les  grandes  invasions  reviennent  tous  les  trois  ou  (juatre  ans  dans 
certaines  régions,  tous  les  huit  ou  dix  ans  dans  d'antres. 

Les  dommages  causés  par  les  campagnols  pendant  une  grande 
invasion  peuvent  être  évalués  en  moyenne  à 30  francs  par  hectare, 
donc  à 50.000  francs  pour  une  commune  de  1.000  hectares  (voii* 
chap.  Il),  et  cela  malgré  l’efficacité  des  moyens  que  l’ou  aura 
employés  pour  les  détruire,  parce  (jue  on  ne  jiourra  jamais  détruire 
les  rongeurs  le  jour  même  de  leur  apparition  et  (pi’il  faudra  au 
moins  un  grand  mois  pour  organiser  et  appliquer  le  traitement.  — 
A cette  perte  de  50.000  fr.  il  faudra  encore  ajouter  5 à 0.000  fr. 
pour  l’achat  des  poisons,  des  appAts  et  pour  payei-  la  main- 
d'œuvre. 

Or  nous  avons  vu  plus  haut  qu’en  procédant  avec  méthode 
chaque  hiver  ou  chaque  printemps  à la  destruction  systématique  de 
campagnols  même  pendant  10  années  de  suite,  une  commune  de 
1.000  hectares  aurait  dépensé  un  millier  de  francs  en  tout  et  se 
serait  épargné  une  perte  de  50.000  francs  tout  au  moins. 

Les  cultivateurs  de  toutes  les  communes  comprises  dans  la  région 
à campagnols  (carte  n°  10)  devraient  donc  constituer  des  syndi- 
cats de  destruction  de  rongeurs  et  ces  syndicats  devraient  fonc- 
tionner d’nne  façon  constante.  Les  membres  du  bureau  de  ces 
syndicats  devraient  visiter  soigneusement  chaque  année,  avant  le 


— 90 


mois  de  mars,  le  territoire  de  leur  commune  et  prendre  les  mesu- 
res nécessaires  pour  traiter  les  parcelles  habitées  par  les  campa- 
gnols avant  la  reprise  de  la  végétation  au  printemps. 

En  procédant  de  cette  façon  les  cultivateurs  pourraient  avoir  la 
certitude  d’empêcher  les  grandes  invasions  et  d’éviter  les  domma- 
ges qui  en  résultent. 


^ r:  r 


W 


CHAPITRE  VIII 


RÉSUMÉ 


1®  II  y a on  Erauce  plus  de  2.000  (l)  communes,  réparties  dans 
i4  départements,  dans  lescpielles  nous  avons  constaté  la  présence 
de  campagnols.  Ils  occupent  g-énéralement  les  vallées  et  les  coteaux 
les  plus  lertiles,  cultivés  en  céréales,  betteraves  et  prairies  arti- 
ticielles. 

Leur  nombre  peut  varier  beaucoup  d’une  année  à l’autre.  11 
uug’uiente  généralement  de  mars  en  novembre  et  diminue  pendant 
la  mauvaise  saison,  mais  s’il  y a pendant  deux  ou  trois  années  de 
suite  dos  hivers  assez  doux,  sans  gelées  brusques  et  sans  inon- 
dations, alors  ils  apparaissent  pendant  la  belle  saison  en  nombre 
incalculable,  et  détruisent  toutes  les  récoltes.  Les  dommages  peu- 
vent atteindre  alors  jdusieurs  centaines  de  mille  francs  par  com- 
mune. 

Dans  les  territoires  à campagnols  on  a donc  à craindre  des  inva- 
sions partielles  plus  ou  moins  étendues  tous  les  deux,  trois  ou 
quatre  ans,  tantôt  dans  une  région,  tantôt  dans  une  autre,  suivant 
les  conditions  ebmatériques  plus  ou  moins  favorables  et,  tous  les 
neuf  ou  dix  ans,  de  grandes  invasions  générales  qui  peuvent 
s’étendre  sur  des  milliers  de  kilomètres  carrés  et  atteindre  d’une 
fa(;on  passagère  des  terrains  où  normalement  les  campagnols  ne 
trouvent  pas  de  conditions  favorables  à leur  développement. 

C’est  ainsi  que  depuis  vingt  ans,  nous  avons  eu  en  France  une 
grande  invasion  générale  de  campagnols  en  1893-1894,  en  1904- 
1905  et  en  1912-1913  et  dans  les  intervalles  de  petites  invasions 
pai-tielles  chaque  année. 

D’après  les  données,  encore  très  incomplètes,  (juenous  avons  pu 

(1)  Nous  ne  comptons  ici  que  les  coniinuiics  qui  se  sont  depuis  vingt  ans  adres- 
sées à l’Institut  Pasteur  pour  demander  des  renseignements  sur  lu  destruction 
des  campAgnols. 


— 9^2  — 


recueillir  depuis  ces  dernières  vingt  années,  on  peut  évaluer  les 
doininag'es  causés  par  les  campagnols  en  France  au  moins  à oO  mil- 
lions de  francs  par  an,  en  moyenne. 

2°  Jusqu’à  ces  derniers  temps  il  n’y  avait  en  France  rien  de 
prévu  ni  d’oi’ganisc  pour  combattre  ces  invasions.  Il  n’y  avait 
môme  pas  d’expériences  qui  auraient  permis  d’apprécier  avec  cer- 
titude la  valeur  réelle  des  moyens  de  destruction  préconisés. 

C’est  seulement  en  1904  que  de  telles  expériences  avaient  pu 
être  organisées  grâce  à l'initiative  de  M.  Mougeot,  alors  ministre 
de  l’agriculture.  Ce  sont  les  expériences  d’Aigre  et  de  Saint-Julien 
d'Escap  décrites  en  détail  p.  58  et  6J.  Elles  ont  permis  de  constater 
que  le  virus  bien  préparé  et  bien  appliqué  a produit  une  mortalité 
de  95  à 100  O/O  tandis  r|ue  le  traitement  aux  poisons  et  en  parti- 
culier à la  noix  vomique,  le  plus  actif  de  toutes  les  substances 
toxiques  que  Ton  peut  pratiquement  employer  en  grand,  n’a  pu 
donner  cju’une  mortalité  de  70  0 0.  Ces  expériences  ont  montré, 
en  outre,  que  le  virus  est  absolument  inotfensif  pour  tous  les  ani- 
maux autres  que  les  petits  rongeurs,  tandis  que  la  noix  vomique 
a tué  en  môme  temps  de  nombreux  oiseaux  utiles. 

3°  Pourtant,  employée  en  grand,  la  méthode  biologique  a donné 
dans  certains  cas  des  résultats  assez  variables.  Sur  600.000  hecta- 
res traités  au  virus  depuis  1904  on  a constaté  des  insuccès  dans  la 
proportion  de  20  0/0.  Sur  120.000  hectares  le  virus  n’a  pas  donné 
les  résultats  que  l’on  était  cependant  en  droit  d’en  attendre.  Nous 
avons  vu  en  effet  (Cbap.  VI) , qu’il  n’y  a pas  en  F rance  de  campagnols 
réfractaires  au  virus  ; le  produit  cpii  a donné  des  résultats  satisfai- 
sants sur  480.000  hectares  aurait  donc  dù  nécessairement  agir  de 
la  même  façon  sur  les  120.000  autres  hectares,  s’il  avait  été  pré- 
paré et  appliqué  dans  les  mêmes  conditions,  et  ces  conditions  ne 
peuvent  être  ni  irréalisables  ni  même  difficiles  à réaliser,  puisque 
elles  ont  pu  l’être  dans  la  grande  majorité  de  cas. 

Les  insuccès  constatés  ne  peuvent  donc  en  rien  diminuer  la 
valeur  de  la  méthode  parce  qu’il  est  évident  que  les  causes  de  ces 
insuccès  doivent  être  unic[uenient  attribuéesàquelquesdétails  d’exé- 
cution, soit  dans  la  préparation  des  bouillons  de  culture,  soit  dans 
la  préparation  et  la  distribution  des  appâts,  et  non  pas  à la  nature 
môme  du  virus. 

Jusqu’à  présent  ces  accidents  étaient  inévitables.  Si,  en  etlet,  nous 
possédons  actuellement  un  produit  assez  perfectionné  pour  détruire 
les  campagnols,  il  faut  encore  cpie  ce  produit  soit  convenable- 


ment  fal)riqiié  et  ])ien  appliqué  pour  produire  tout  son  eüét,  et 
nous  n’avons  pas  encore  d’organisation  suffisante  pour  faire  l’im  et 
l’autre,  pour  mobiliser  rapidement  tous  les  éléments  de  la  lutte 
quand  il  s’agit  de  combattre  les  grandes  invasions,  de  traiter  pres- 
que en  même  temps  des  centaines  de  communes  dans  20  ou  30  dépar- 
tements à la  fois,  comme  cela  s’est  produit  en  1912-13. 

Pour  répondre  à de  telles  éventualités,  nous  ne  disposons  pas 
encore  d’installations  capables  d’assurer  une  production  régulière 
de  virus  eu  quantité  suffisante  et  dans  les  départements  il  n'y  a 
pas  assez  de  personnel  compétent  pour  diriger  ou  surveiller  les 
traitements.  — Il  arrive  donc  que,  pour  répondre  aux  ])esoins  les 
plus  pressants,  pour  sauver  ce  (]ui  reste  encore  des  récoltes,  ou 
fait  (juelquefois  plus  de  mal  que  de  luen.  On  organise  à la  luUe 
des  installations  de  fortune,  on  n’a  j)lus  le  temps  ni  de  contrôler 
assez  rigoureusement  tous  les  produits  cpii  entrent  dans  la  compo- 
sition du  virus,  ni  la  richesse  et  la  pureté  des  cultures  microbien- 
nes et  on  impose,  aussi  bien  dans  les  -laboratoires  (jue  dans  les 
campagnes,  une  besogne  écrasante  à un  personnel  trop  restreint. 
C’est  ainsi  par  excm])lc  que  l’on  a imposé  aux  vétérinaires  dépar- 
tementaux chargés  de  la  fabrication  de  virus  en  1912  un  travail 
de  12  à 11  heures  j>ar  jour  pendant  deux  à trois  mois,  sans  un 
seul  jour  de  repos  eten  plus  de  leur  service  normal,  — et  aux  pro- 
fesseurs d’agriculture  de  diriger  le  traitement  dans  10  ou  15  com- 
munes à la  fois.  — Et  si  on  a obtenu  eu  1912  partout  des  résul- 
tats conq)arables  à ceux  consignés  dans  le  rapport  de  M.  Berner 
(20  insuccès  sur  131  communes  traitées)  c’est  uniquement  grêce  à 
l’admirable  dévouement  du  personnel  scientifique  des  départe- 
ments sinistrés  (vétérinaires  départementaux  et  professeurs  d'agri- 
culture) et  aussi  gréce  à la  valeur  réelle  de  la  méthode  (pii,  mal- 
gré des  conditions  de  travail  aussi  défectueuses  cpie  possible,  a 
permis  de  sauver  une  grande  partie  des  récoltes  en  1912  et  de  pré- 
server presque  partout  les  récoltes  de  1913. 

-4°  Boni*  venir  en  aide  aux  cultivateurs  éprouvés  le  gouverne- 
ment a lait  voter  parles  Chambres  par  deux  fois  des  sommes  assez 
importantes  : 295. OOO  francs  en  1904  et  250.000  francs  eu  1912, 
donc  en  tout  5io.000  francs  à répartir  entre  les  cultivateurs  de 
2.000  communes  jilus  ou  moins  dévastées  par  les  campagnols. 
Cela  ferait  donc,  en  moyenne  270  francs  }>ar  commune  pour  une 
période  de  9 ans,  c est-a-dire  bien  peu  de  clujse  pour  cbacjuc 
cultivateur  éprcjuvé.  11  n est  pas  douteux  (|ue  cette  somme 


— 94  — 


d’argent  relativement  importante  aurait  pu  être  Ijien  mieux  uti- 
lisée. 

I^n  consacrant  par  exemple  200.000  francs  à rinstallation  d’uu 
laboratoire  pour  la  fabrication  des  virus  dans  des  conditions  con- 
venables et  en  quantité  suffisante  pour  combattre  les  plus  grandes 
invasions  qui  pourraient  se  produire  en  France,  et  <à  peu  près 
autant  à payer  les  frais  des  études  systématiques,  des  expérien- 
ces, conférences  et  démonstrations  dans  les  régions  envahies,  on 
arriverait  certainement  en  peu  de  temps  à augmenter  sensible- 
ment les  rendements  des  récoltes  et  probalilemeiit  aussi  à préve- 
nir les  grandes  invasions  une  fois  pour  toutes. 

5“  Pour  organiser  cette  lutte  systématique  il  suffirait,  ainsi  que 
nous  l’avons  indiqué  dans  le  chapitre  Vil,  d’étendre  à tout  le  ter- 
ritoire à campagnols  les  mesures  prises  déjà  depuis  1904  dans  un 
certain  nombre  de  départements  ; de  former  dans  toutes  les  commu- 
nes de  ce  territoire  des  syndicats  de  destruction  des  rongeurs  et 
d’exécuter  scrupuleusement  les  ordonnances  adoptées,  c’est-à-dire 
faire  visiter  par  des  délégués,  en  novembre  et  décembre,  tous 
les  champs  cultivés  ou  incultes,  les  bords  des  routes,  talus,  fos- 
sés, etc...  ; de  noter  les  parcelles  habitées  par  les  campagnols  et 
de  traiter  ces  parcelles  le  plus  tôt  possible  et  en  tous  cas  avant 
le  mois  de  mars. 

Pour  ces  traitements  préventifs,  destinés  à détruire  les  quelques 
centaines  de  campagnols  qui  peuvent  exister  dans  les  champs 
d’une  commune  en  temps  normal,  l’Institut  Pasteur  peut  préparer 
un  virus  en  gélose  qui  peut  être  expédié  par  la  poste  et  peut  garder 
toute  son  activité  pendant  au  moins  un  mois. 

Les  cultivateurs  ne  seront  donc  pas  obligés  de  l'employer  aussi- 
tôt après  sa  réception  ; ils  pourront  choisir  les  moments  les  plus 
favorables  pour  effectuer  le  traitement,  mais  il  est  de  la  plus 
haute  importance  de  ne  pas  laisser  sans  traitement  le  plus  petit 
foyer  avant  la  fin  de  l’hiver,  sans  quoi  les  campagnols  se  multi- 
plieront pendant  la  belle  saison  et  deviendront  innombrables  à la 
fin  de  l'été. 


TABLE  DES  MATIERES 


\ 


Pages 

Introduction'.  — Les  campagnols 1 

Chapitre  premier.  — Caractères  zoologiqucs  et  classilicalion 

Chapitre  II.  — Importance  des  dommages  causés  par  les  campagnols  . 8 

Chapitre  111. — Distriliution  géographique 46 

Chapitre  IV.  — Les  déplacements 30 

Chapitre  V.  — Les  moyens  de  destruction 37 

Les  poisons 38 

Les  gaz  Ioniques iO 

Les  inconvénients  des  poisons -41 

Chapitre  VL  — De  l'emploi  de  cull  tires  des  microbes  pathogènes  ...  -42 

BacUlus  ti/p/ii  muriiim,  type  D 43 

Virulence 44 

Préparation  du  virus  en  grand 48 

Instructions  pour  l'emploi  du  virus .32 

Préparation  du  virus  en  bidons  de  20  litres 55 

Késultats  obtenus  par  le  traitement  au  virus 70 

Chapitre  VIL  — Organisation  de  la  dcslruction  de  campagnols . ...  87 

Chapitre  VIII.  — Késumé 91 


LAVAL.  — imprimerie  !..  UARNÉOUD  ET  C>».